Lettre ouverte aux élus

Gouverner et prendre des risques

Tribune libre

En ces temps d'entrée dans une autre nouvelle année, puis-je en marge des voeux traditionnels vous partager une réflexion citoyenne pas des moins préoccupantes: Gouverner et prendre des risques.
Notre gouvernement fédéral a, par l’argument de la crise économique, entrepris de restreindre le droit des femmes à l’équité salariale. Cette décision n’est pas soutenable, elle est rétrograde. Si l’argument de l’austérité devait s’imposer, il conviendrait logiquement de couper la cerise des salaires des hommes pour financer la justice envers les travailleuses. Ça ne serait pas «déshabiller Paul pour habiller Marie», car le droit acquis n’est garanti que par la capacité de payer et d’être juste. Heureusement, cette crise aura été plus grave dans les discours de politiciens soucieux d’avoir les pieds et les mains au volant, que dans les coffres d’entreprises et de l’état, gabegies non considérées. Mais, le mal sera fait, et le comble, les décideurs et leurs conseillers n’en répondront aucunement! Un politicien ne devrait-il pas répondre personnellement des ses erreurs de jugement?
Dans un contexte concurrentiel et incertain, la stabilité et a fortiori le progrès sont assurés par la prise de risque. Nous vivons un monde concurrentiel. Car, l’espace vital est limité, et la tarte n’est pas élastique pour assouvir la faim de tous. Les entreprises sont en concurrence soit de produits, soit de services, de prix, de proximité, voire d’images et de façons de faire ou de philosophie. Ainsi, l’écologie ou la sensibilité à l’environnement intéresse de nombreuses entreprises. Sont en concurrence des entreprises existantes, entre elles et contre d’autres inconnues du futur imprévisible. Dans ce monde dit moderne et hostile, les individus se font de la concurrence pour leur mieux être ou pour la survie. Les communautés, les régions, les pays, les continents, sont également en perpétuelle compétition existentielle.
Pour vaincre les forces négatives de la concurrence, les dirigeants d’entreprises prennent des décisions et initient des actions risquées. Des fois ces choix portent de bons fruits et les décideurs en sont récompensés. Bien souvent hélas leurs fruits sont pourris, et tout le monde est puni. Au niveau des individus, c’est pareil. Chacun se bat pour une place au chaud, et les places sont limitées. Beaucoup de personnes prennent des risques énormes, et rarement elles en sont loyalement récompensées. Chacun sait comment. Et c’est de même que ca marche. Peu de gens intelligents ont compris que la solidarité peut battre la concurrence en efficacité. Ils fonctionnent en coopératives mais malgré la preuve d’efficience, cette formule demeure marginale. Il lui faudrait une impulsion politique pour la mettre sur orbite.
Concernant l’ordre politique, la concurrence fonctionne en mode intermittent. C’est durant la campagne électorale que les politiciens dégustent la sauce du risque. Une fois investis, les élus font des choix dits politiques qui leur vaudront des palmes si les fruits sont bons. Mais, lorsque les fruits sont empoisonnés, les dégâts seront sans conséquence proportionnelle pour les concernés. Soit leur ampleur sera connue après le mandat gouvernemental, soit il n’est pas facile d’établir le lien et la valence de cause à effet d’une décision politique, soit il n’est pas de notre imaginaire politique de punir les erreurs de jugement. Je crois que ca devrait changer. La justice équitable doit aussi faire en sorte que l’on soit aussi bien payé comme le sont les politiciens, pour faire avancer la société, et qu’au moins des remboursements soient requis si l’on la fait régresser.

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François Munyabagisha79 articles

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Psycho-pédagogue et économiste, diplômé de l'UQTR
(1990). Au Rwanda en 94, témoin occulaire de la tragédie de «génocides»,

depuis consultant indépendant, observateur avisé et libre penseur.





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