Réponse à Antoine Robitaille

Extrême-droite, dites-vous?

Tribune libre

Dans un article publié le 4 novembre 2010, à propos de la lettre des «136», Le Devoir et le journaliste Antoine Robitaille me présentent comme un «signataire embarrassant pour Pauline Marois» et affirment erronément que je suis un «militant condamné pour vandalisme [qui] caresse des idées d’extrême droite». Permettez-moi de rétablir les faits: je n’ai jamais été condamné, je n’ai jamais commis d’actes de vandalisme et je ne caresse pas des idées d’extrême droite.
La justice m’a accordé une absolution inconditionnelle, ce qui est justement l’inverse d’une condamnation, après que j’eus enlevé une dizaine de pancartes électorales en anglais, à Gatineau, et que j’eus écrit «FLQ», «Québec libre» et «français» sur les vitres et l’enseigne du local des West Quebecers, une association qui fait la promotion de l’usage de l’anglais au Québec. Je n’ai ni détruit, ni mutilé gratuitement des œuvres d’art ou des équipements publics, comme le veut la définition du mot «vandalisme».
Compte tenu de l’inaction de l’État québécois devant les reculs du français, j’ai pris avec désintéressement la défense de mon peuple. Je suis coupable d’avoir écouté mon cœur et j’ai toujours assumé les conséquences de mes actes. Ainsi, j’ai accepté de verser 500 $ aux West Quebecers en guise de dédommagement pour le nettoyage de leurs vitres et le remplacement de leur enseigne, déjà marquée par d’autres graffiteurs avant moi. Contrairement à ce qu’affirme M. Robitaille, je n’ai pas été puni d’une amende.
Fidèles à leur orientation ultrafédéraliste, le journal Le Droit et le site Cyberpresse, de la société Gesca, m’ont forgé un personnage d’épouvante au moyen d’amalgames, de demi-vérités et de mensonges purs et simples. Dans leurs pages, je suis devenu intolérant, fasciste, xénophobe, antisémite, violent et, bien sûr, extrémiste. Une fois le personnage bien campé, il ne reste plus qu’à l’insérer au moment voulu dans la trame habituelle, qui vise à empêcher les Québécois de penser comme un peuple libre. Voici un exemple de déformation de mes propos par les journalistes du Droit.
Le 21 novembre 2008, le journaliste Patrick Duquette écrivait ceci:

«[…] les seuls vrais Québécois sont les “Québécois de souche”. “Et un vrai Québécois de souche, c’est quelqu’un dont les ancêtres sont arrivés ici avec les Français”, précise Jean-Roch Villemaire.»

Or, voici ce que j’ai expliqué en réalité à M. Duquette:
«Je déplore qu’il n’existe pas de citoyenneté québécoise et que, par conséquent, et les immigrés, et les Québécois “de souche” ne sont que des citoyens canadiens. Dire que tous les gens qui habitent au Québec sont forcément des Québécois est aussi faux que dire que tous les gens qui habitent au Canada sont forcément des Canadiens. Des centaines de milliers de personnes habitent au Canada en tant que visiteurs, réfugiés ou résidents permanents et n’ont pas le droit de vote. Voilà pourquoi il faut créer une citoyenneté québécoise, de manière à ce que ce soit l’État québécois, et non l’État fédéral, qui décide qui a le droit de vote et qui est éligible au Québec.»

J’ai été très déçu lorsque Le Devoir a, lui aussi, agité comme un épouvantail le personnage fictif créé par les journalistes de Gesca. M. Robitaille a caricaturé grossièrement ma pensée en sélectionnant quelques bribes d’information peu représentatives et en rejetant tout le reste. Ayant déjà écrit quelques éphémères mots de sympathie à l’occasion du décès du politicien autrichien Jörg Haider, je caresserais automatiquement des idées d’extrême droite, selon M. Robitaille. L’intérêt que j’ai pu porter aux mouvements nationalistes dans le monde est devenu une tare indélébile sous la plume des journalistes en mal de sensationnalisme.
Quoique des déclarations de M. Haider aient pu soulever la controverse et quoique je n’aie aucunement l’intention de faire son apologie, il n’était ni un criminel, ni un dictateur et était très aimé d’une grande partie de ses concitoyens. Ce n’est certainement pas le cas de tous les politiciens canadiens, parmi lesquels figurent beaucoup de gens à la moralité très douteuse qui ne servent pourtant pas de prétexte pour jeter l’opprobre sur leurs sympathisants.
En effet, le gouvernement du Canada, libéraux et conservateurs confondus, ne s’est jamais excusé pour avoir fait emprisonner près de cinq cents civils innocents en 1970, sans aucune justification. Il ne s’est pas excusé non plus pour avoir récidivé avec un millier d’arrestations arbitraires et souvent brutales lors du sommet du G20 de juin 2010.
Le gouvernement du Canada appuie inconditionnellement les activités terroristes d’Israël, notamment contre les Palestiniens et les Libanais. Il est soupçonné d’avoir collaboré à la torture de prisonniers de guerre en Afghanistan. Il a livré Maher Arar en pâture aux sous-traitants syriens de la CIA. Il a participé à la détention et la torture d’un enfant-soldat, Omar Khadr. Il a laissé Abousfian Abdelrazik, un citoyen canadien innocent, moisir pendant six ans au Soudan. Il collabore gentiment avec Paul Kagame, dictateur rwandais accusé récemment du massacre de centaines de milliers de Hutus en RDC. Avec les fameux certificats de sécurité, il arrête, détient et harcèle des gens, puis les menace de les expulser du pays, sans jamais leur faire connaitre les raisons de ces mesures.
Le comportement du gouvernement du Canada étant parfois digne d’un régime totalitaire, les amis Facebook de Stephen Harper risquent-ils bientôt d’être taxés d’intolérance, de racisme et d’extrémisme par M. Robitaille?
Si M. Robitaille avait vraiment voulu se renseigner à mon sujet, il n’avait pas besoin que je l’appelle. Il aurait pu trouver facilement, dans ma page Facebook, dans le site Internet Vigile (vigile.net) ainsi que dans l’édition papier du Droit du 24 octobre 2009[1], une lettre intitulée «Inacceptable vous-même!», qui constitue ma réplique à un éditorial calomnieux écrit à mon sujet par Pierre Jury, un autre journaliste de Gesca. Il aurait pu lire notamment le passage suivant, beaucoup plus révélateur de mes opinions que l’inquisition à laquelle il s’est livré[2]:
«Alors, qu’est-ce que le nationalisme? C’est la solidarité et le désir de justice sociale pour les siens, y compris ceux qui se joignent à la nation par l’immigration. Je suis à des années-lumières des idéologies répugnantes, comme le nazisme, motivées par la haine de l’autre. Ma dénonciation de certaines pratiques d’immigration n’est pas inspirée par un sentiment xénophobe; je critique plutôt l’exploitation de la misère par la mondialisation sauvage. Je suis solidaire des populations autrefois victimes du colonialisme et aujourd’hui écrasées par le capitalisme néocolonial. Les affiliations que me reproche Le Droit relèvent au mieux de l’ignorance, au pire de la calomnie. Tant qu’à vouloir me coller des étiquettes, il serait plus honnête d’associer ma démarche politique à des figures contemporaines qui m’inspirent vraiment, comme Hugo Chavez et Evo Morales, ou à des figures historiques comme Che Guevara, Patrice Lumumba et Malcolm X. Extrême-droite, dites-vous?»

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[1] Les écrits diffamatoires à mon sujet ont tous été publiés non seulement dans [l’édition papier du Droit->22626], mais également par Cyberpresse, ce qui n’est pas le cas de ma réplique.
[2] Avant de fermer ma page Facebook, j’y comptais environ un millier d’amis, sur lesquels je n’ai pas fait systématiquement enquête. M. Robitaille dit avoir trouvé parmi eux des gens qu’il qualifie de néofascistes? S’il avait cherché un peu, il y aurait vu également des personnes qui se situent nettement à gauche sur l’échiquier politique.
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Lettre des «136» - Un signataire embarrassant pour Pauline Marois
_ Le militant condamné pour vandalisme caresse des idées d'extrême droite
Antoine Robitaille 4 novembre 2010 Québec
Québec — Une des 136 signatures au bas de la lettre de soutien à la «gouvernance souverainiste» de Pauline Marois, publiée en nos pages hier, a créé un profond malaise au sein du PQ. Celle de Jean-Roch Villemaire, jeune militant péquiste de l'Outaouais, qui avouait au Droit en 2008 avoir «certaines affinités» idéologiques avec le leader d'extrême droite autrichien Jörg Haider, ainsi qu'avec le chef du Front national français, Jean-Marie Le Pen. «Si j'avais su ce qu'il a fait dans le passé, je n'aurais pas accepté sa signature», a confié hier au Devoir Alexandre Thériault-Marois, président sortant du Comité national des jeunes du PQ qui a corédigé la lettre pour défendre Pauline Marois.
À la mi-septembre, M. Villemaire a été condamné à 500 $ d'amende pour avoir volé et vandalisé des pancartes électorales unilingues anglaises d'une candidate aux élections municipales de novembre 2009. Il n'aura pas de casier judiciaire puisqu'il a reçu une absolution inconditionnelle. Il a aussi reconnu avoir peint les graffitis «FLQ», «primauté au français» et «Québec libre» sur l'édifice et l'enseigne de l'organisme West Quebecers, qui défend les droits des anglophones à Gatineau. À l'époque, les gestes, ainsi que des menaces par courriel, avaient été revendiqués par la «Ligue de défense nationale».
Selon M. Thériault-Marois, c'est M. Villemaire qui a offert mardi de signer la lettre intitulée «Gouverner en souverainiste et faire l'indépendance». «On l'a accepté comme représentant jeune. Je l'avais rencontré au Grand rassemblement des jeunes [à Victoriaville, début octobre]. On n'a pas vérifié les CV des gens!» En 2008, M. Villemaire a été candidat, lors d'une élection partielle dans Hull, pour le Parti indépendantiste (PI), qui plaide pour que la souveraineté se fasse sans référendum, après une seule victoire électorale. En mai 2008, Le Droit rapportait que M. Villemaire, lors d'un débat, avait réclamé un moratoire sur l'immigration tant que le Québec n'était pas un pays. Pauline Marois avait aussi été sa cible, notamment pour ses projets de Constitution et de citoyenneté québécoises, pourtant deux des éléments clés de la «gouvernance souverainiste».
Sur un blogue dont les archives ont été aujourd'hui éliminées, M. Villemaire, le 15 octobre 2008, rendait un hommage au chef du FPÖ, Jörg Haider, qui venait de mourir accidentellement. Il suggérait aux internautes d'«adresser un message de condoléances à celui qui fut un haut représentant de l'esprit national autrichien». M. Haider avait notamment soulevé un tollé pour avoir vanté les mérites de l'Allemagne nazie quant à ses politiques d'emploi.
Sur le profil Facebook de M. Villemaire, hier, des liens avec une vingtaine de sections locales de CasaPound, un mouvement néofasciste italien, figuraient dans sa liste d'amis. En fin d'après-midi, le profil Facebook avait disparu.
M. Villemaire n'a pas répondu aux multiples demandes d'entrevue téléphonique ou par courriel de la part du Devoir, hier.


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    4 décembre 2010

    J'espère que M. Robitaille a honte. Il fait figure de plagiaire des minables histoires d'horreur de Gesca. Cela pue l’infect potinage mercantile. Et Le Devoir n'a même pas publié la réplique de M. Villemaire. Il y a longtemps que j'ai mis fin à mon abonnement, et je ne suis pas prêt de changer d'idée.

  • L'engagé Répondre

    30 novembre 2010

    Votre réponse articulée montre que vous êtes en définitive bien plus dangereux comme cela... Nous n'avons pas encore défini la meilleure stratégie pour défendre la langue, la vôtre vous a causé des problèmes... À l'avenir nous écrirons RIN, PI ou «Québec mon pays» plutôt que FLQ et nos poserons des affiches sur le mobilier urbain plutôt que de peindre sur les vitres.

  • Gilles Verrier Répondre

    30 novembre 2010

    Monsieur Villemaire,
    Il vous faudrait faire preuve de charité envers M. Robitaille. On ne peut lui en vouloir car, comme il tire son existence d'un système médiatique soutenu par pleins de commanditaires à l'épiderme éventuellement sensible, son objectivité relative ne peut qu'en pâtir. Son propos doit aussi être présentable à la profession. On accepte de faire ce qu'il fait comme il le fait (d'autres font bien pire me direz-vous !) ou on gagne sa croûte ailleurs et autrement... et plus honorablement. Bernard Frappier le fait bien ! À chacun ses choix et ses deuils à assumer...
    Cette mise au point de routine étant faite, passons.
    Je vous dirais qu'il presse de mêler les cartes ou de les démêler vraiment. La droite honnête est aujourd'hui à gauche alors que la gauche penche dangereusement à droite. La gauche est en effet la complice de la droite malhonnête dans son immigrationnisme (pas méchamment, mais naïve, un peu à la manière de Bernard Landry...) et son «mondialisme autrement», qui se présente non sans euphémisme sous le nom d'«altermondialisme», qui n'est qu'un leurre et une duperie.
    L'alter mondialisme, dont la balloune a presque fini de se dégonfler, n'étant, tout compte fait, qu'un appui populiste à la droite financière mondialiste.
    M. Villemaire, je vous ai appuyé sur le forum du RRQ lorsque des vierges offensées et un peu incultes hurlaient, «Oh mon Dieu !», quelle engeance ce Villemaire, c'est un appui au FN (Front national en France). Ha ha ha ..! On finit par en avoir marre à la fin de cette go-gauche qui méprise les vraies voix contestataires, comme celle de Marine LePen, comme s'il s'agissait de la peste.
    La Suisse vient d'exprimer sa souveraineté. Elle vient de voter pour que les criminels issus de l'immigration soient retournés dans leur pays d'origine, la «gauche» moraliste et bien pensante à la Trudeau, faites moi rire, désire garder ces criminels au sein de la société d'accueil ! Est-ce du racisme que de refouler les criminels alors que l'on garde les autres, soit l'immense majorité des immigrants honnêtes ? La gauche «trudeauiste» d'Europe et d'Amérique, pour qui n'a de valeur que l'individu-individualisé, nous dit que oui...
    Dans une vidéo récemment mise en ligne, Marine LePen se distingue (et pas à peu près!) de la droite et de la gauche (les deux !) en pointant du doigt la complicité de la droite et de la gauche (l'une et l'autre !) dans la crise qui étrangle notre économie. Une crise dont les seuls à passer à la caisse sont ceux de la classe moyenne et les travailleurs industriels, pour ce qu'il en reste ! Nous savons tous que les emplois industriels ont été pour la plupart été exportés en Chine et ailleurs en Asie (Inde, Indonésie, Bangla Desh, Sri Lanka) par nos héroïques amis de l'avidité capitaliste apatride, là, je ne vous apprends rien !.
    À l'instar de Georges Marchais (Parti communiste Français), qui s'en prenait au grand entrepreneur Bouyges, qui en voulait,lui, des immigrants et en masse, il faut mettre fin à l'immigration. Du même coup, il faut interdire la délocalisation des industries, même si encore là la mesure arriverait un peu tard. Tertio, l'État national du Québec doit s'établir pour pouvoir battre monnaie de son plein droit. Le reste, c'est du figuratif et de la littérature et ne fera jamais de nous un peuple libre. Bon, j'admets qu'il faille commencer par déclarer l'indépendance formelle, ...en rester là serait toutefois un infanticide.
    N'est-il pas temps de mettre à jour l'idée d'indépendance ? Oui, ce l'est. Et c'est plus que jamais une idée d'actualité qu'attend avec espérance le monde entier. La décolonisation des années 60 ne fut qu'un subterfuge, un projet avorté symboliquement par l'assassinat d'un Patrice Lumumba, et l'on voit bien aujourd'hui que tout cela est nul. Il faut donc mettre à jour l'indépendance, mille fois plus important que de mettre à jour le concept ambiguë et tant manipulé de social-démocratie.
    Unissons-nous aux peuples du monde. Rétablissions ou établissons des frontières pour rétablir les conditions d'une solidarité internationaliste librement consentie.
    Video de Marine LePen - http://www.egaliteetreconciliation.fr/Marine-Le-Pen-Sortir-de-la-Loi-de-1973-4765.html
    L'indépendance c'est le pouvoir régalien de battre monnaie. C'est un peu beaucoup une condition incontournable de la souveraineté, l'essence de la souveraineté.
    GV