PERSPECTIVES

Doutes raisonnables

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Pas question de faire confiance à Ottawa






Denis Lebel avait donné raison aux producteurs agricoles québécois de douter de l’appui indéfectible d’Ottawa. Déjà, dès les premiers jours de négociations entourant le Partenariat transpacifique (PTP), «The Globe and Mail» nous apprend que le Canada a surpris en abattant rapidement la carte d’un accroissement des importations laitières dans ses discussions bilatérales avec les États-Unis.



Les manifestations des agriculteurs devant les bureaux de ministres conservateurs se succèdent aussi rapidement que le dévoilement d’études mettant l’accent sur la pertinence, l’apport et les retombées du modèle de gestion de l’offre retenu ici et que l’on voit ailleurs, en Ontario et dans l’Est canadien. Les chiffres de leur argumentaire se veulent plus convaincants que ceux appuyant la contre-argumentation. Aussi, les échecs associés à la déréglementation vécue dans certains pays se veulent probants. Il devient difficile de justifier qu’un système ayant démontré sa fonctionnalité depuis près de 50 ans, qui a résisté à 12 accords commerciaux négociés avec 43 pays depuis 1994 puisse être aussi facilement rabaissé au rang de monnaie d’échange.


 

Jeudi, devant quelques centaines de producteurs massés devant son bureau de circonscription, Maxime Bernier, ministre d’État fédéral à l’Agriculture, voulait se faire rassurant. On peut lire, dans un texte de La Presse canadienne, qu’il leur a rappelé ces ententes de libre-échange signées avec 37 pays depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur. Chaque fois, la gestion de l’offre avait été préservée. Aux agriculteurs insistant pour que l’engagement soit de protéger « intégralement » le système actuel, Maxime Bernier a répondu que le mandat du négociateur fédéral était « de préserver le système de gestion de l’offre de façon intégrale, avec ses trois piliers, c’est-à-dire le contrôle de la production, le contrôle des prix et le contrôle des importations ».


 

L’heure juste


 

Lundi, devant le bureau de Denis Lebel à Roberval, les centaines de producteurs agricoles ont eu l’heure juste. Le ministre a manifesté sa solidarité, mais pour déclarer sans ambages : « vous voulez entendre le mot intégral, je peux vous dire que mon support va être intégral jusqu’à la fin. Le résultat de la négociation, je ne suis pas capable de vous le promettre », a-t-on entendu dans un reportage de Radio-Canada.


 

Déjà, les producteurs québécois ont dû apprendre qu’il leur fallait céder des parts de marché aux fromages européens dans un accord de libre-échange, celui avec l’Union européenne, laissant autrement miroiter des retombées sensibles pour le Québec. Quant au marché de la zone Pacifique, il se veut plutôt lointain pour le Québec, tant géographiquement que du point de vue de ses intérêts économiques. Surtout que la Chine y est absente. Le Québec se doit d’y être, ne serait-ce que pour la présence de ses partenaires au sein de l’ALENA. Il est toutefois plus aisé de comprendre que cette zone économique élargie revêt un intérêt plus grand pour le reste du Canada.


 

Le système de contrôle centralisé des quantités et des prix, avec barrière tarifaire protégeant le marché intérieur contre les importations étrangères, couvre 40 % de l’agriculture québécoise. Il se veut aussi très présent en Ontario et en Nouvelle-Écosse. Il apporte stabilité du revenu aux producteurs et d’approvisionnement aux transformateurs dans un contexte où l’industrie québécoise doit cohabiter avec la proximité « d’une puissance mondiale laitière et avicole », soulignent les représentants des producteurs de lait, de volaille et d’oeufs. Et alors que les États-Unis et l’Europe doivent multiplier les subventions pour stabiliser les revenus de leurs producteurs.


 

Le Canada n’aurait pas à concéder quoi que ce soit, dit-on. Mais sous la pression des États-Unis et du Japon faisant d’une libéralisation du secteur agricole canadien une condition sine qua non… Le premier ministre Stephen Harper souhaite un accord signé avant les élections. Dans le calcul électoraliste qui se dessine, les premières indications vont dans le sens d’une conservation de la gestion de l’offre avec ouverture d’une partie du marché aux produits d’importation. Surtout qu’une élimination du régime exigerait des gouvernements d’importants dédommagements financiers compensatoires.


 

De toute façon, et l’Institut de recherche en économie contemporaine l’a déjà démontré récemment, la politique commerciale du gouvernement conservateur a plutôt été défavorable au Québec.







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