Deuxième réplique au «Saint-Bock»

Tribune libre

Tout resterait dans un instantané que nous ne rendrions pas davantage justice à la révolution actuellement en cours. Nous aurions beau heurt de prétexter émeutes et fantasmes pour se réfugier derrière l’écran de sa propre incompréhension. La lutte étudiante persiste contre vents et marées. En soi, le gouvernement a pris sur lui de tenter une sortie de crise violente, convulsive. Ça n’en rendra pas plus les paramètres de l’équation qui visent à une plus grande démocratie. Nous croyons à une complémentarité des tactiques. Nous vivons dans le réel de la démocratie délibérante bien que nous tenons compte d’un aspect «société du spectacle».
En reprenant ce passage : «La désobéissance civile devient une notion fourre-tout qui justifie la multiplication des incivilités. Des groupes organisés annoncent leur intention de mépriser la loi. La rhétorique politique se radicalise à une vitesse inquiétante. Un vocabulaire idéologique délirant vient polluer la délibération publique. La métropole est devenu le théâtre d’affrontements inconcevables il y a quelques semaines à peine.», je ne saurais pas mieux dire l’inaptitude du gouvernement John James. Avant tout, je tiens à signaler que l’incivilité et le mépris se rendent bien au vu et au su de la conduite lamentable de ce même gouvernement.
Si nous comprenons uniquement le langage des émeutes urbaines – et je suis fort certain que ce n’est pas le cas –, reprenons cet instantané de la terrasse du Saint-Bock. Il ne fallait quand même pas espérer que la défense publique de Richard Martineau resterait lettre morte. En assaisonnant le tout du contexte exceptionnel de la loi spéciale en cours, pourrons-nous dire que le langage de la rue réinstaure une certaine parole perdue? Nous pouvons en tout cas accepter la réalité et l’apprivoiser en nous mettant en face de nos responsabilités.
D’aucuns redoutent les comparables historiques. Pour ma part, je persiste dans une lecture des enjeux qui se réfère à l’imaginaire politique connu. Pour nous, il est possible de se référer à la Révolution tranquille et aux événements entourant Mai 68 et Octobre 1970. Nous venons d’apprendre par ailleurs que Jean-Paul Sartre fut étroitement surveillé par la GRC. Il est quand même ironique de constater que Jean-Paul Sartre a suivi les traces du Général en s’intéressant à la question de l’indépendance du Québec. Nous reviendrons sur les pas de Charles De Gaulle.
Et vint le Vive le Québec libre… mal compris en sa contrée, le Général fit face à une contestation de son leadership lors des événements culminant à Mai 68. Jean-Paul Sartre eut son mot à dire sur ces entrefaites. Ici même au Québec et dans une contrée plus lointaine, le Canada, Pierre Elliott Trudeau a orchestré le coup de force antidémocratique contre la nation québécoise. Comme son action s’échelonna dès le départ et sur de longues années, nous pouvons tenir compte d’un charisme ayant opéré et d’un rapport des forces lui étant favorable.
Dans la situation qui nous préoccupe actuellement, la grève étudiante accueille l’hostilité et l’indifférence du gouvernement John James. Contrairement à Trudeau, le gouvernement ne peut tirer parti d’un rapport de forces lui étant favorable. Il aurait beau escompter avoir survécu à une pétition appelant la démission du premier ministre et regarder de haut les manifestations qui se superposent eu égard aux pétitions raillées, le retour sur terre se fait toujours attendre. Jamais prompt à s’amender de ses règles de conduite, le gouvernement récolte ce qu’il sème.
Ici même au Québec, Victor Lévy Beaulieu incarne le monstre sacré des médias. Reprenant à son compte certaines paroles de Jean-Paul Sartre, l’écrivain et dramaturge en profita pour encenser l’action et le discours de Gabriel Nadeau-Dubois. À l’heure des médias instantanés et de l’information continue, l’image du leader naturel finit par imprégner les attentes du public et de ces mêmes médias. Nous aurions beau tenter de descendre en flammes les Amir Khadir, Gabriel Nadeau-Dubois et Victor Lévy Beaulieu de ce monde, ce genre de personnalités finit par renaître de ses cendres l’air de rien.
Métaphoriquement, il fut souvent question durant la grève étudiante d’un gouvernement qui faisait la sourde oreille et nous sommes entrés dans le registre de l’autisme récemment pour tenter un effet-miroir déformant l’action de l’extrême-gauche anarchiste. Non seulement ce n’est point rendre justice à la réalité d’une certaine partie de notre communauté humaine. Au contraire, nous nous devons de rectifier le tir en ce qui a trait à la dénonciation du refus patent du gouvernement de se mettre les yeux en face des trous. Nous ne pourrons limiter les effets de cette violence à l’œuvre tant et aussi longtemps que nous laissons ce gouvernement se comporter comme il entend. Entendre rien à rien n’impose pas la loi par osmose.


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