Des funérailles religieuses

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« Les Québécois de souche sont tous des catholiques sociologiques. »

L’être humain vit de symboles. Les rites de passage comme la naissance et la mort marquent l’arrivée et la fin de la personne sur cette Terre.


L’ex-premier ministre Landry, homme de conviction et d’espoir, a certainement consenti aux funérailles religieuses qui se déroulent aujourd’hui à l’église Notre-Dame, un des joyaux architecturaux du Québec. Mais c’est avant tout un lieu sacré où la parole est sacrée.


Les Québécois de souche sont tous des catholiques sociologiques. La culture québécoise est inextricablement liée à la foi qui était avec la langue les deux faces de notre identité.


Les incroyants d’aujourd’hui qui ne font plus baptiser leurs enfants et refusent la sépulture à l’église se privent de deux rites de passage qui remontent aux origines du christianisme.


Réflexion personnelle


La liturgie de la mort est à la fois une expérience esthétique et religieuse. Elle offre des paroles qui renvoient ceux qui y assistent à une réflexion sur leur propre vie et leur propre mort.


Les chants et la musique élèvent les esprits. Il n’y a pas de place pour la familiarité et la trivialité. Devant la dépouille, les célébrants posent des gestes sacrés, permettant aux fidèles présents de communier en esprit avec celui qu’ils ont aimé, admiré et respecté.


Ce n’est pas devant un premier ministre que l’on s’incline, mais devant un homme, en l’occurrence un homme habité par des espérances à la fois personnelles et collectives. Un homme modeste et fier, un homme courageux, mort au bout de son souffle tout en conservant celui de son esprit.


Ces obsèques religieuses qu’il a choisies révèlent l’homme qu’il a été. Un homme moderne, mais habité par les traditions, un laïc qui n’a rien sacrifié à sa culture chrétienne.


Recueillement


Pour ses funérailles aujourd’hui, Bernard Landry a convoqué les grands compositeurs de la musique sacrée pour nous élever l’âme et choisi les paroles récitées depuis des siècles auxquelles s’ajoutent des gestes séculaires et le doux parfum d’encens. La lumière des cierges de l’église de son enfance dans ce temple où avant lui d’autres dirigeants politiques ont été portés à leur dernier repos éclairera l’assemblée recueillie.


La volonté des mourants est sacrée. C’est pourquoi de nombreuses cérémonies funèbres se déroulent désormais hors des églises. Dans des salons funéraires, voire même dans un cinéma, comme ce fut le cas récemment pour madame Lise Payette qui, incroyante, a refusé un service religieux. J’y ai assisté. Ce fut une cérémonie remplie de respect et de dignité. Les témoignages étaient à la fois émouvants et éloquents et Ginette Reno a magnifiquement interprété la chanson de Jean-Pierre Ferland, Un peu plus haut. Mais il m’a semblé qu’il manquait une dimension spirituelle devant le mystère de la mort.


On ne peut pas inventer en quelques décennies des rites laïques pour remplacer une liturgie religieuse vieille de deux mille ans. J’ignore si Bernard Landry avait conservé la foi de son enfance. Mais personne ne s’étonnera qu’il ait choisi des funérailles religieuses qui demeurent un trait culturel de notre identité collective en mutation.