Le ministre Audet a introduit hier un premier mécanisme visant à endiguer l'évolution de la dette publique du Québec. En faisant appel à Hydro-Québec, on crée le Fonds des générations, qui sera capitalisé et qui, espère-t-on, devrait contribuer à diminuer l'endettement du Québec de 30 milliards d'ici 2025. Du coup, compte tenu du flou des sources d'approvisionnement de ce fonds, la porte s'ouvre à une éventuelle hausse des tarifs d'électricité pour rembourser la dette, une possibilité que Québec se réserve d'ailleurs. Du coup également, le gouvernement introduit une redevance sur l'eau captée.
Dans cette offensive visant à réduire le poids de la dette, le gouvernement mise d'abord sur une croissance économique plus forte que l'augmentation de la dette inhérente aux dépenses d'immobilisations. Mais la pièce maîtresse est la création du Fonds des générations.
La formule a surpris hier. Le Fonds des générations sera géré par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Avec ce fonds, capitalisé, on fait le pari que le rendement obtenu sera supérieur au coût de la dette. Ce taux devrait osciller entre 4,5 % et 5,2 % au cours des prochaines années (obligation canadienne à dix ans) alors que le rendement moyen dégagé par la Caisse de dépôt l'an dernier est d'environ 15 %. L'effet net sera une réduction de 30 milliards de dollars de la dette d'ici 2025, avec un ratio dette-PIB passant à 25 %, prévoit-on, ce qui correspondrait à la moyenne canadienne actuelle. Ce ratio est de 43 % à l'heure actuelle compte tenu d'une dette de 118 milliards (et d'une dette nette de 104 milliards) dont le seul paiement des intérêts se chiffre actuellement à sept milliards, «ce qui en fait le troisième poste du budget des dépenses après la santé et l'éducation», a souligné le ministre.
Ce fonds pourra s'alimenter à même cinq sources de revenu. Le ministre Audet a parlé hier des droits hydrauliques payés par Hydro-Québec à compter de janvier prochain et des droits déjà perçus auprès des producteurs privés d'hydroélectricité. Il pense aussi à une partie des bénéfices provenant de la vente d'électricité à l'étranger, d'une redevance sur l'eau captée et de la vente d'éléments d'actif non stratégiques.
Les deux premières sources sont clairement ciblées avec des redevances devant passer de 374 millions en 2007-08 à 897 millions en 2025-26. Quant aux trois autres sources, les documents du ministre indiquent que l'«impact est à déterminer».
Une vaste zone grise, donc, qui a fait dire à François Dupuis, directeur, chef économiste adjoint et stratège au Mouvement Desjardins, que «la porte est ouverte à une éventuelle hausse des tarifs d' Hydro-Québec pour réduire la dette».
Dans sa présentation d'hier, Michel Audet a d'ailleurs présenté ce fonds comme étant «le point de départ d'une réflexion plus large sur la dynamique des finances publiques du Québec». Il n'a pas été sans préciser que «le gouvernement se réservera la possibilité, en fonction de l'évolution de la situation, d'affecter au Fonds des générations d'autres sources de revenus».
Pour l'heure, dans sa réponse aux médias hier, le ministre des Finances a clairement exclu qu'Hydro-Québec puisse transférer le poids de ces redevances aux consommateurs. En passant par la filiale Production, la société d'État ne pourra pas évoquer ces droits lors de ses démarches auprès de la Régie de l'énergie, a-t-il souligné. Puisque ces sommes ainsi transférées feront diminuer les résultats consolidés d'Hydro-Québec, la société d'État espère qu'elle compensera avec des gains d'efficacité interne et qu'elle aura recours à plus d'exportations, a-t-il ajouté sans autres détails.
On veut également s'assurer que ce fonds ne sera pas éventuellement utilisé à d'autres fins. «L'Assemblée nationale sera appelée à adopter une loi créant le Fonds des générations. Cette loi assurera la population que les efforts consentis seront durables et déterminera les ressources consacrées au remboursement de la dette, qui deviendra ainsi un processus irréversible.»
Captage d'eau
Ce mécanisme associé à la réduction de la dette a été l'occasion pour le gouvernement de lancer l'idée d'instaurer une redevance sur l'eau captée au Québec. «Avant d'envisager la mise en place de cette redevance, il faudra cependant compléter divers travaux, notamment sur le plan juridique, afin de déterminer le niveau de taxation adéquat et les modalités de perception», lit-on dans les documents budgétaires. Mais sur la base de l'expérience menée en Colombie-Britannique, les revenus du Québec provenant de l'eau captée pourraient être de l'ordre de 11 millions, a-t-on chiffré tout en rappelant que la plupart des provinces ont déjà légiféré pour préciser que l'État est propriétaire de l'eau.
Le Québec recèle 3 % de l'eau douce de la planète, prend-on soin de rappeler. Et on évalue à 3,5 milliards de mètres cubes le volume d'eau prélevé au Québec chaque année.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé