Dans cet article de The Independent du 23 mars 2013 sur la fermeture de 13% des écoles de Chicago pour cause de faillite financière, on signale d’abord, comme essentielle pour notre propos et sur quoi l’on revient plus loin, l’expression employée par le journaliste de «post-financial crisis world»... (WSWS.org du 23 mars 2013 publie également un article sur le cas.)
Il s’agit de la description de la dernière mesure prise par le maire de Chicago, le bras droit et exécuteur des hautes œuvres d’Obama pendant les premières années du règne. Mais il faut ajouter, comme un marron glacé sur le gâteau, que Rahm Emanuel avait eu l’exquise idée de se trouver avec sa famille en vacances de ski pendant que ses services annonçaient la liquidation de ces 13% des écoles de la ville de Chicago (61 écoles en tout). Un maire de cette trempe, cela nous en dit plus que le fait de savoir s’il est simplement un homme du Système agissant conformément aux standards de cette position, que sur le fait désormais de peu d’intérêt de se rappeler qu’il fut et reste soupçonné par certains d’être un agent d’Israël. «Yes, we can close schools», comme titre The Independent, histoire de rappeler aux fidèles de son Église la trempe de leur gourou en chef qui se fit élire en 2008 président des USA en s'appuyant sur le slogan Yes, we can.
Tout s’y trouve pour faire de Chicago, dans cette occurrence, un cas d’école, – selon un attristant jeu de mots venu par inadvertance. (Pourtant, nous dit-on, Chicago n’est la grande ville US la plus mal notée dans cette catastrophe budgétaire générale. La comptabilité et la situation de Detroit et de Philadelphie, par exemple, c’est pire.) Les écoles fermées sont situées dans des quartiers dits défavorisés, surtout fréquentés par des Africains-Américains et des Latinos. Pour la ville de l’homme-lige du premier président africain-américain, et la ville où lui-même, Obama, a fait sa carrière politique, le symbole est d’une belle signification. Les enfants privés d’écoles devront donc aller dans d’autres écoles, hors de leur quartier, mais cela représente une aventure tragique : Chicago est aujourd’hui la capitale US du crime et des morts violentes par agression, et la nécessité de leur imposer des parcours quotidiens importants expose ces enfants au risque d’être des victimes dites “collatérales” des diverses guerres de gangs qui font rage…
«The announcement sparked national horror yesterday as the sorry state of the city’s finances, which are well known locally, was highlighted to the country. Chicago isn’t alone. Other cities, including Detroit, which is now facing the possibility of what could be the largest municipal bankruptcy in US history, and Philadelphia, have resorted to shutting undersubscribed schools to save money. Chicago has closed scores of school buildings over the past decade. The city’s problems – though less severe than elsewhere in the US – have similar root causes to those in places such as Detroit: burdensome pension liabilities accumulated in the boom times and falling birth rates have become too much to bear in the post-financial crisis world. With the national and regional economy still struggling, the money coming in to city coffers cannot keep up with Chicago’s commitments.
»But the size of the closures announced have sparked concern, particularly as the institutions in question are primarily attended by African-American and Hispanic students, and are situated in low-income neighbourhoods. Officials led by Chicago Mayor Rahm Emanuel, however, say there are too many vacant seats in the city’s public school system. The Chicago Teachers Union thinks otherwise, with its President Karen Lewis labelling the closures an “abomination.” “This is cowardly and it is the ultimate bullying job. Our mayor should be ashamed of himself,” she told the Associated Press.
»The closures will mean that many children will have to venture into neighbourhoods other than their own to attend classes, which is causing concern among parents given the high frequency of violent crime in certain parts of the city. Irene Robinson, 48, said six of her grandchildren attend the soon-to-be-closed Anthony Overton Elementary in the Bronzeville area. She said news of shutdown was “like a death in the family.” “It’s that sad,” she told the Chicago Tribune. “What’s gonna happen to these kids? Kids are being killed right now. They [sic] innocent. Why put them in harm’s way? It’s sad. It’s scary. It’s outrageous.” […]
»Much of the public anger at the school closures was today directed at Chicago Mayor Rahm Emanuel, a former chief of staff for President Barack Obama, who was on a skiing holiday with his family when the announcement was made. “I find it extremely cowardly for the mayor’s administration to announce these actions while he is vacationing out of town,” Karen Lewis, the President of the Chicago Teachers Union, said. “They are also making this announcement days before… spring break.”»
Le cas étant exposé dans toutes ses implication, et nous rappelant les ravages de la crise budgétaire sur tous les services publics US, jusqu’aux plus essentiels, on doit revenir à cette expression venue sous la plume du journaliste de The Independent de «post-financial crisis world». Cette expression, par son ampleur, suggère effectivement une situation désormais installée d’une façon structurelle, cette structure étant celle du “monde d’après la crise financière” ou “monde post-crise financière”, – cela n’impliquant nullement un monde débarrassé de cette crise et de ses effets, bien au contraire. Sans doute, sans aucun doute, le journaliste n’a-t-il pas écrit l’expression pour exprimer aussi pleinement une situation générale de type structurel. Peu importe dans ce cas, nous prenons la chose comme telle, comme le résultat de la nécessité implicite (inconsciente) dans le chef du journaliste de rendre compte d’une perception, en même temps que comme un symbole de la situation en général.
Nous quittons le cas spécifique de Chicago et de ses écoles fermées, non sans élargir notre jugement ci-dessus sur l’effondrement des capacités des services publics et en notant qu’il s’agit d’une évolution structurelle dans le sens de la destruction de la “civilisation” telle qu’elle est communément admise, notamment selon la doxa moderniste. Ce que nous voulons mettre en évidence, c’est qu’on peut prendre cette expression de “monde post-crise financière” comme le constat implicite, d’ailleurs substantivé par le sujet auquel il s’applique, de la vérité d’une situation du monde sans équivalent avec ce qui a précédé la crise financière : il y a le monde d’avant et il y a le monde d’après la crise financière, et l’on sait bien, et l’on voit bien (situation de Chicago comme exemple), que le second exprime une situation catastrophique sans aucune relation avec le premier. L’expression admet donc tacitement que la crise financière ne fut pas une crise comme les autres, si tant est qu’on puisse la définir par le mot “crise” signifiant que cette situation cesse dès lors que l’effondrement des banques est accompli, et “redressé” on a vu comment. On peut donc raisonnablement avancer l’hypothèse que l’expression “monde d’après la crise financière” ne désigne nullement un monde où il y a eu une crise, qui fut résolue, et cela remettant les choses dans sa voie normale du Progrès (doxa moderniste, suite) ; qu’elle désigne au contraire un monde entré dans la situation paradoxale d’une “structure crisique” générale (et non plus sectorielle), qui exprime en vérité un nouvel état du monde. Le mot “crise” qu’on continue à employer (comme nous-mêmes faisons) n’a plus la signification qu’on lui prête habituellement, qui est le contraire d’une structure. Il acquiert nécessairement, contre sa signification courante, un sens structurel qui constitue le véritable bouleversement de cette «époque» (sens maistrien) commencée à l’automne 2008.
On sait bien entendu que c’est notre jugement, non seulement portant sur l’époque commencée en 2008, mais sur la situation générale de la modernité dont les origines remontent à plusieurs siècles. Bien entendu, notre jugement est particulièrement affirmé concernant la séquence commencée à l’automne 2008, où l’on ne peut plus parler stricto sensu de “crise financière” de l’automne 2008, mais bien d’un événement déclencheur, détonateur et révélateur de la nouvelle époque qu’il inaugure. Quoi qu’il en soit, il est intéressant de trouver cette sorte d’expression «post-financial crisis world» qui acte implicitement et inconsciemment cette nouvelle situation, dans les colonnes d’un quotidien de la presse-Système. Cela signifie qu’en dépit de toutes les annonces de “reprise”, de “sortie de crise”, etc., depuis début 2009, s’impose inconsciemment la pensée qu’on est entré dans une structure nouvelle du monde, qui est crisique, qui est globale, qui est une nouvelle situation du monde… Pour nous, il s’agit d’une situation décisive, et le terme “crise” ne peut plus être utilisé dans ce cas sans le qualificatif d’“effondrement” (du Système), l’expression “effondrement du Système” pouvant éventuellement remplacer le mot “crise”.
Si nous relevons ce cas qui semblerait anodin, c’est qu’il ne l’est pas pour nous, par ailleurs confirmé par l’évolution générale du style des commentaires dans la presse-Système, par la disparition progressive de l’indication des effets de l’utilisation des chiffres économiques bidouillés sur les signes de la “reprise”, la disparition progressive des arguments sur la “reprise” et le reste, la disparition progressive même de cette forme de pensée qui fait de la “crise” l’exceptionnalité confirmant la règle au profit de son contraire qui est le retour des “lendemains qui chantent”. Il est effectivement essentiel que les psychologies des divers services-Système que les forces humaines en place assument pour tenter d’assurer la survie du Système, soient de plus en plus pénétrées par l’idée du contraire. Assumer que le «post-financial crisis world» est ce qu’on décrit chaque jour du chaos du monde, et notamment la situation des écoles de Chicago sous le magistère éclairé du maire Rahm Emanuel, c’est commencer à prendre en compte l’idée de l’effondrement du Système. Prendre en compte cette idée, c’est commencer à accepter la vérité de la situation dont elle rend compte et, par conséquent, accélérer l’effondrement du Système dont la surpuissance se nourrit également de l’intensité de la foi que ses employés ont inconsciemment en lui, nécessairement pour pouvoir tenir leur place ; cette foi étant en en chute radicale comme on le voit, et par conséquent la surpuissance du Système se transmutant encore plus vite en dynamique d’autodestruction. Le langage courant et non élaboré de cette sorte d’intervention par cette sorte de sapiens-Système pérennise la catastrophe, lui donne toute sa vérité et remplace décisivement les débats sur l’évaluation de la réalité que permet la manipulation du système de la communication. Encore une fois, comme nous le répétons souvent, l’entrée de la vérité de l’effondrement du Système dans les psychologies est une part essentielle de ce processus d’effondrement.
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