Lors de la course à la direction du Parti québécois à l'automne 2005, Pauline Marois avait évoqué cinq années de « turbulences » advenant un vote en faveur de la sécession du Québec.
Cette déclaration lui avait mérité une volée de bois vert, notamment des trois autres aspirants à la succession de Bernard Landry. Elle a dû pédaler par en arrière et ajuster le tir en parlant plutôt « d'effervescence » - quel euphémisme - dans un Québec devenu indépendant, réitérant toutefois que « ça va brasser un peu », mais sans chaos total, pensait-elle, ajoutant qu'un tel changement majeur doit être bien préparé. Dans la catégorie des vérités de La Palice (quoiqu'à la fois truisme et tabou), cette déclaration de Mme Marois remporte certes la palme, peut-être à égalité avec la « cage à homard » de Jacques Parizeau.
Hier, nous avons discuté des demi-vérités et des faux-amis, s'agissant de la récupération du Brexit pour des fins politiques ici.
Aujourd'hui, nous verrons qu'il y a néanmoins des leçons à tirer, avec les mises en garde nécessaires, de la récente expérience référendaire au Royaume-Uni et, surtout, de ses impacts mal calculés.
Dans les îles Britanniques, avec la reprise des travaux parlementaires cet automne, nous constatons l'ampleur des défis et de l'angoisse résultant de la décision de quitter - en anglais exit, d'où le néologisme « Brexit » - cette entente internationale d'intégration économique et politique qu'est l'Union européenne. Dans une série spéciale d'articles sur le sujet, les quotidiens The Guardian et The Irish Times collaborent cette semaine afin de faire le point sur plusieurs des conséquences, tant actuelles qu'appréhendées, du Brexit pour l'Angleterre - économiques, au premier chef - mais aussi pour les régions telles que l'Écosse et l'Irlande du Nord, de même que pour la république d'Irlande, par ricochet. Nous allons nous limiter à ces dernières.
POSSIBLE MORCELLEMENT
Tout d'abord (nous en avons entendu parler au pays), la première ministre de l'Écosse, Nicola Sturgeon, a annoncé le 13 octobre dernier le dépôt imminent d'un nouveau projet de loi prévoyant la tenue d'un deuxième référendum sur l'indépendance. Rappelons que les Écossais ont voté à 62-38 % contre le Brexit au printemps, alors que dans l'ensemble du Royaume-Uni, c'est à 52-48 % qu'on a appuyé l'option de quitter l'Union européenne.
Secret de Polichinelle, le possible déclenchement d'une nouvelle procédure pour réaliser l'indépendance de l'Écosse, et ce, à moins de deux ans du dernier scrutin référendaire, était quelque chose dont on parlait déjà l'an dernier. Cela témoigne qu'un référendum victorieux peut avoir un effet domino et amener le morcellement d'un État. Avec toutes les nuances nécessaires, l'ex-Yougoslavie est un autre exemple fort, dans ce sens.
En ce qui concerne la région de l'Irlande du Nord - et indirectement pour la république d'Irlande -, l'hypothèse maintenant bien réelle de se voir sortir, contre son gré, de l'Union européenne crée des impacts déjà sentis sur le plan économique, en plus des nombreux effets appréhendés, y compris sur le processus de paix entre les républicains (catholiques) et les loyalistes (protestants). Soulignons que l'Irlande du Nord, partie du Royaume-Uni, a voté au référendum sur le Brexit, mais nettement contre à 56-44 %. Le premier ministre adjoint pour l'Irlande du Nord, Martin McGuinness, parle de devastating impact du Brexit, en outre en brandissant le spectre d'un retour aux « Troubles », puisqu'on remet en question les termes de l'accord du Vendredi saint (Belfast Agreement), notamment la possibilité d'avoir un passeport irlandais - et par le fait même européen - pour les citoyens du Nord.
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