'' La déclaration d'André Boisclair, demain, ou plus tard, ou jamais... ''

Boisclair agit avec intelligence

Tribune libre

À propos des énormités méprisantes d'une chroniqueuse de Toronto, la rédaction de Vigile écrivait, en ce 20 septembre : '' La déclaration d'André Boisclair, demain, ou plus tard, ou jamais... ''. On présume ici une certaine critique à l'égard du chef péquiste, qui rappelle celles qu'on lui sert souvent depuis son accession à ce poste, il y a quelques mois à peine; Il semble, quoi que ce ne soit que mon interprétation des choses, que des militants péquistes, souvent de générations plus agées que la sienne, s'impatientent de temps à autre. Le chef, disent-ils, devrait réagir plus promptement, plus vigoureusement, plus clairement, ouvrir son jeu, expliquer ses positions.

Or, dans ce cas-ci comme souvent auparavant lorsqu'on l'a pressé de se manifester, je pense que Boisclair agit avec intelligence. En effet, il est fort justifié de laisser d'abord les fédéralistes inconditionnels québécois répondre aux fédéralistes francophobes canadiens -- ce qu'ils font en ce moment -- lorsque ces derniers se manifestent. On évite ainsi une polarisation contre-productive du débat. Cela est essentiel.

Imaginons que le chef du PQ eut été parmi les premiers à monter aux barricades : Au mieux, cela n'aurait pas changé grand chose, et au pire, on aurait dit : Voilà, les séparatistes se sentent visés, on a touché un point sensible. Ou bien : C'est ça, encore les péquistes qui protestent pour profiter de la situation.

Au contraire, le chef indépendantiste reste en réserve, puis, un peu plus tard, tire calmement mais fermement les conclusions qui s'imposent - et qui, bien entendu, militent de façon plus qu'évidente pour l'indépendance -. Il peut se dire en accord avec le contenu de la déclaration du premier ministre du Québec, tout en se demandant, par exemple, s'il est approprié que ce dernier prenne le temps de répondre directement et si rapidement aux sornettes d'une chroniqueuse. Peu importe ce qu'il choisit de dire et de faire dans les détails, un petit peu de recul devrait lui permettre d'être plus crédible et rassembleur.
Dans ce genre de situation, vaut mieux laisser les Québécois faire leur réflexion eux-mêmes. Ils verront bien que ce propos raciste-soft et méprisant a été publié dans un quotidien crédible et éminemment respecté de la métropole canadienne, et qu'il y a tout lieu de croire que ce n'est pas un accident.
Autrement, on a l'air de dire aux gens comment penser, et on tourne inutilement le fer dans la plaie, comme si on disait : Vous voyez, on vous avait averti, vous auriez dû voter pour le OUI. Cela n'a pour effet que de braquer et d'insulter les gens qui, pour toutes sortes de raisons plus ou moins défendables, se sentent encore canadiens.

N. Payne


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    22 septembre 2006

    Tout à fait d'accord avec N. Payne. Boisclair doit continuer à réagir avec pondération et tact. Les fédéralistes mous au Québec commencent à réaliser que les vrais extrémistes ne sont plus les défenseurs de la loi 101, mais ce qu'il faut bien appeler les racistes haineux de Toronto qui ont trouvé dans le Globe & Mail un médium à leur convenance. Ces red necks ne peuvent pas supporter qu'une loi soi-disant ultranationaliste, tout en assurant au Québec la prépondérance au français dans les échanges publics, favorisent en même temps le multiculturalisme. Leurs attaques répétées n'ont rien de fortuit ; elles sont explicites, consenties, délibérées. Loin de s'excuser, ils vont en remettre. Leur but est de casser le consensus qui prévaut dans la société québécoise, creusant ainsi l' « abîme » qui, selon l'article récent de J. Simpson, sépare le Québec du reste du Canada. Ne soyons pas surpris si elles s'intensifient dans les mois à venir.
    François Deschamps

  • Archives de Vigile Répondre

    21 septembre 2006

    Commentaire fort pertinent M. Payne.
    De plus, on lit aujourd'hui sous la plume de Joël-Denis Bellavance:
    «Hier, le chef du Parti québécois, André Boisclair, a d'ailleurs fait un rapprochement entre les propos de Mme Wong et l'épisode du fleurdelisé foulé aux pieds par un groupe d'anglophones opposés au bilinguisme officiel en Ontario, il y a 16 ans.»
    Il a donc réagi! Il faudra commencer à se demander si Boisclair est vraiment discret ou tout simplement censuré. Je suis sûr que ça plait à beaucoup de fédéralistes de voir que leur tactiques pour occulter le chef péquiste fonctionne même avec les indépendantistes convaincus.
    Alain Rivet