Zineb : «Nous sommes tous menacés par le fascisme islamique»

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La ruse sémantique de l'islamophobie

Peut-on comparer fascisme et islamisme ? C'est l'avis d'Hamed Abdel-Samad, libre-penseur germano-égyptien vivant sous protection policière et dont l'essai polémique Le Fascisme islamique, après des péripéties éditoriales, sortira finalement en 2017 chez Grasset. C'est aussi l'avis de Zineb El Rhazoui, journaliste franco-marocaine et militante féministe menacée de plusieurs fatwas, qui a échappé à la mort en étant en vacances le 7 janvier 2015, jour où ses collègues tombaient sous les balles des frères Kouachi. Après avoir quitté Charlie Hebdo le 9 septembre, la trentenaire publie aujourd'hui Détruire le fascisme islamique, court mais brûlant texte qui s'en prend aux islamistes comme aux « collaborationnistes » français qui, selon elle, ont oublié que les musulmans ne sont pas une communauté, mais des individus. Entretien.



Vous dédiez votre livre aux « athées musulmans ». Est-ce parce qu'ils ne sont guère représentés dans les médias aujourd'hui?



Zineb El Rhazoui : Pour moi, le seul mécanisme de représentation valable et légitime dans une démocratie, c'est le vote. Il n'y a donc pas plus de gens qui représentent réellement les athées musulmans que de gens qui représentent les musulmans croyants en France. Je pense à tous ces représentants communautaires autoproclamés qui ne représentent qu'eux-mêmes et qui n'aurait jamais dû être des interlocuteurs de la République. Pour en revenir aux athées musulmans, ils existent, ils sont nombreux, et je leur dédie ce livre parce qu'en France, on est en train d'adouber l'idée que les musulmans seraient une race. Quand on critique l'idéologie islamique, on est forcément raciste. Eh bien non ! Le fait est que les sociétés musulmanes sont aussi diverses que toutes les sociétés dans le monde et elles ont aussi énormément de libres-penseurs et d'athées qui sont hélas réprimés. Ces personnes font preuve de beaucoup de courage. Mais ils ne sont pas aussi minoritaires qu'on pourrait le penser. On a tendance à oublier que la première impulsion du Printemps arabe a été faite par une jeunesse libertaire qui voulait une société laïque. Évidemment, on sait comment les islamistes ont récupéré le mouvement. C'est ce qui se passe aujourd'hui en Europe. Les islamistes volent des luttes auxquelles ils n'ont jamais contribué, ils volent des concepts qui ne sont pas les leurs, voire qu'ils ont combattus. Aujourd'hui, ces islamistes se prévalent de démocratie, d'antiracisme, alors qu'on sait bien qu'ils sont très éloignés de la démocratie et qu'ils sont les tenants d'une idéologie extrêmement raciste.



Vous revenez sur le fameux terme « islamophobie ». Pour vous, ce serait une « ruse sémantique »...



Déjà, il faut rappeler que l'islamophobie n'existe pas en terre d'islam. Parce que là où l'islam a la force de coercition, il n'a pas besoin d'un concept comme ça. Il y a le délit de blasphème, d'apostasie, d'atteinte à la religion... Ceux qui tiennent des propos qualifiés d' « islamophobes » en Europe, dans le monde musulman, ils seraient mis en prison, fouettés, agressés ou assassinés. Le dernier assassinat date de moins d'un mois, avec l'écrivain jordanien Nahed Hattar qui a été tué alors qu'il se rendait à son procès pour « insulte » à l'islam. Là-bas, les islamistes disposent de moyens légaux pour faire taire tous ceux qui critiquent leur idéologie. En Europe, ils n'ont pas ces moyens-là et ils ne peuvent pas nous mettre en prison. Ils peuvent soit nous assassiner, comme ce qu'ils ont fait avec la rédaction de Charlie Hebdo. Ou alors s'ils ne veulent pas emprunter la voie terroriste, le seul moyen qui leur reste est de recourir à cette ruse sémantique qu'est l'islamophobie. Critiquer leur idéologie, c'est être raciste, puisqu'elle serait inhérente à leur race...



Pour vous, les islamistes partagent avec l'extrême droite le fait de ne pas considérer le musulman comme un individu, mais comme le membre d'une communauté...


Les deux ne défendent évidemment pas le même projet de société, sauf quand il y a la Manif pour tous, où on les a vus défiler main dans la main sans aucun problème. Mais islamistes comme extrême droite ont les mêmes outils sémantiques. L'extrême droite refuse de voir les musulmans comme des individus et des citoyens comme les autres, mais les considère comme une communauté qui doit être régie par des lois à part. Les islamistes eux aussi refusent que le musulman soit un individu intégré dans sa société ou qu'il soit soumis aux mêmes devoirs que l'ensemble de la société. Ils insistent pour que les musulmans soient une communauté avec des passe-droits, qui grignote le socle commun de la laïcité pour se créer ses propres lois, tout cela en prétextant de la différence culturelle.




Une idéologie qui a recours à la violence, à la pensée unique, au sexisme répressif, à l’alliance de la religion et de la politique



Comme Hamed Abdel-Samad, vous établissez de nombreux parallèles entre les fascismes et l'islamisme. Mais peut-on comparer une idéologie occidentale et nationaliste du XXe siècle avec une religion née dans la péninsule arabique au VIIe siècle ?



L'argumentaire d'Hamed Abdel-Samad, dans son livre, rejoint le mien sur plusieurs points, mais il diffère dans les emprunts historiques qu'il fait. Par exemple, il fait référence au grand mufti de Jérusalem allié à Hitler. Pour moi, ce sont des choses qui relèvent de la conjoncture historique. Ce qui m'intéresse, ce sont les éléments constitutifs du fascisme, c'est-à-dire un totalitarisme absolu, une idéologie qui part du postulat d'appartenance à une communauté persécutée qui doit se défendre et adopter la pensée unique pour faire régner une hégémonie sur les autres communautés. On retrouve ça dans l'islam. On y retrouve aussi l'adoption d'un uniforme, d'un visuel, d'un drapeau unique, d'un prêt-à-parler. Les adeptes du fascisme islamique en France, peu importe qu'ils parlent à la maison le français, l'arabe dialectal marocain, le berbère, le kabyle ou autre, utilisent tous les mêmes formules et le même jargon.


Dans le fascisme, il y a également une haine viscérale des intellectuels, des arts et des lettres. C'est-à-dire la négation absolue de la création et de la différence de pensée. Au Maroc, l'une des premières choses que le Parti de la justice et du développement (PJD), pourtant présenté comme modéré, a faites en arrivant au pouvoir, c'est de commencer à parler d'« art propre », de s'en prendre aux chanteuses trop maquillées, aux arts visuels, à la danse et évidemment aux intellectuels.


Une autre caractéristique commune, c'est l'aversion profonde pour le corps des femmes et des homosexuels. Dans le nazisme, c'est la mère aryenne qui doit enfanter. Mais dans le fascisme islamique, c'est carrément une volonté de faire disparaître le corps de la femme de l'espace public en le couvrant d'une espèce de sac-poubelle noir. Et dans la plupart des pays où l'islam est au pouvoir, on retrouve la peine de mort pour les homosexuels, comme en Arabie saoudite, en Iran ou en Mauritanie. Dans les pays qui se disent plus modérés comme le Maroc, l'homosexualité est condamnée de trois ans de prison. On pourrait ainsi énumérer pendant des heures les parallèles. On est dans une idéologie qui a recours à la violence, à la pensée unique, au sexisme répressif, à l'alliance de la religion et de la politique... Toutes ces caractéristiques techniques et méthodologiques font de l'islamisme un fascisme.






Le fascisme prône la pureté raciale. Dans l'islamisme, il n'y a pas de races, mais une religion qui dépasse les frontières...




L'idée de race en islam est effectivement différente de la race comme on l'envisage dans le fascisme. Ce n'est pas pureté du point de vue génétique, mais une pureté de l'oumma. Mais comme dans le fascisme, on retrouve l'intolérance absolue, le rejet, par le crime et l'extermination s'il le faut, de tout ce qui est différent. Il faut rappeler que certains versets coraniques disent qu'il n'y a pas de différences entre un Arabe et un non-Arabe que par la foi. Plutôt que de faire de ce précepte un principe d'antiracisme, on en a fait une définition de la frontière entre ceux que les islamistes appellent « la maison de l'islam » et les autres qui sont « la maison de la guerre ». On peut faire couler le sang de tous ceux qui se situent en dehors de l'islam.




On nous dit qu’on n’a pas le droit de critiquer le Coran, car il serait un livre merveilleux, d’amour et de paix. C'est un mensonge



Vous faites de l'islam un bloc totalitaire. Mais n'y a-t-il pas une multitude d'écoles et de courants ?


Je distingue l'islam et les musulmans. Qu'est-ce qu'un musulman ? Un musulman, ça peut être quelqu'un, comme moi, qui est né dans cette foi, c'est-à-dire un musulman de culture. Ça peut être quelqu'un qui a choisi cette foi. Ça peut être un vrai laïc ou au contraire quelqu'un qui respecte la religion au pied de la lettre. Il y a autant de musulmans différents que d'êtres humains, et les musulmans ne sont bien sûr pas un bloc. En revanche, je me pose la question du « vrai islam ». On nous oppose souvent cet argument : « le vrai islam, ce n'est pas ça »... Allons donc le chercher dans les textes ! On nous dit que c'est une religion merveilleuse, de paix et d'amour. Mais regardons ! Les islamistes, à chaque fois qu'un acte terroriste est commis, nous disent : « Ah non, ce n'est pas ça l'islam ! » Mais en même temps, quand on veut critiquer l'idéologie qui mène au terrorisme, on nous dit « non, non, là vous êtes islamophobe, et vous portez atteinte à l'ensemble des musulmans ». Cette équation ne tient pas la route.



Parlons donc des textes.
Vous soulignez que dans le Coran, il y a des passages sur la violence, l'esclavage et la polygamie. Mais dans l'Ancien Testament, on peut retrouver la même chose !


Bien sûr. Ces livres sont écrits par des hommes et ils sont donc le reflet de leur époque. Mais la différence du Coran, aujourd'hui, par rapport à d'autres religions, c'est qu'il existe une idéologie qui est en train de s'imposer même en Europe, sous des cieux où on attache pourtant beaucoup d'importance à la raison : c'est l'idée que le Coran est une constitution. Le jour où le Coran sera un livre dont l'usage sert uniquement à la spiritualité, un livre à histoires et mythes qu'il faut rattacher au contexte de l'époque, il pourra siéger parmi les autres livres des monothéismes. Le problème, c'est que cette contextualisation est refusée non seulement par les plus radicaux, mais par une vaste majorité. Vous ne trouverez aucun imam qui vous dira qu'il y a une partie du Coran qui est obsolète et qu'il faut la mettre de côté. Le Coran est considéré comme un corpus législatif. Quelle que soit la question qui se pose, on va fouiller dedans. Dans les Épîtres de Saint-Paul aux Corinthiens, vous trouvez une injonction à porter le voile. Mais aujourd'hui, y a-t-il un État chrétien dans le monde qui impose aux femmes de porter le voile ? Est-ce qu'on a un terroriste chrétien qui tue parce que les femmes ne portent pas le voile ? C'est cette approche au texte qui est problématique à deux niveaux. Parce que les islamistes considèrent que le Coran doit régir notre quotidien. Mais aussi parce que nous, on nous dit qu'on n'a pas le droit de critiquer le Coran, car il serait un livre merveilleux, d'amour et de paix. C'est un mensonge qui entoure le contenu réel de ce livre.



Pour le spécialiste de l'islam Olivier Roy, les djihadistes actuels relèvent plus du nihilisme et d'une quête de la mort que d'une radicalité religieuse. Salafistes et djihadistes se dissocieraient ainsi de plus en plus. D'un côté, il y aurait des amish intégristes, mais non violents, qui se retirent de la société ; de l'autre des petits délinquants qui fument du haschisch, fréquentent les boîtes de nuit, avant d'entrer dans une quête de la mort. Qu'en pensez-vous ?


C'est une analyse qui encore une fois dédouane l'islam de cette idéologie fasciste qui a grandi en son sein. Les terroristes disent bien qu'ils sont des musulmans et qu'ils font cela au nom de l'islam. Et il ne faudrait pas qualifier ces gens par les désignations qu'eux-mêmes se sont choisies ? Évidemment, cela ne veut pas dire que tous les musulmans sont des terroristes. Mais le fait de chercher à dédouaner l'islam ne lui rend pas service. Pourquoi ne traite-t-on pas l'islam avec les mêmes outils rationnels que le reste des idées ? C'est un paternalisme insupportable, un vrai racisme inversé. Je cite au début du livre un extrait éloquent de Sartre, dans lequel il explique avoir essayé de s'éloigner du racisme au maximum qu'il a pu. Mais il se souvient que lorsqu'un écrivain issu des colonies lui apportait un manuscrit, il n'osait pas lui dire que c'était mauvais et il utilisait des « circonlocutions », alors qu'à un Occidental, il aurait franchement exprimé la vérité. Sartre explique que ça, c'est du racisme.


Lorsque Olivier Roy dit que ce n'est pas une radicalisation de l'islam, mais une islamisation de la radicalité, j'ai envie de lui répondre que personne ne se réveille du jour au lendemain en se décidant à rejoindre Daech. Le terroriste est la main qui frappe, mais il y a un cerveau qui pense et ordonne de passer à l'action ! Il y a une chaîne de production du terrorisme. Ce n'est pas le résultat logique de la délinquance ou des problèmes sociaux. On a énormément de délinquants ou de défavorisés sur cette planète qui ne se transforment pas en terroristes. Le terrorisme est le fruit d'une idéologie. Nier le caractère criminel de cette idéologie, c'est se priver de moyen de lutter efficacement contre elle. Ce que dit Olivier Roy, c'est l'équivalent de ceux qui, après la Seconde Guerre mondiale, assuraient que « non, non, tous les nazis n'ont pas du sang sur la main ». Oui, tous les nazis n'ont pas tué. Il ne s'agit pas de juger des gens pour des crimes qu'ils n'ont pas commis, mais il faut juger une idéologie qui a promu des crimes. Et pour combattre l'idéologie nazie, on ne s'est pas contenté de combattre ces crimes comme des crimes de droit commun, sur un simple plan judiciaire, mais on a interdit sa littérature et ses manifestations – même pacifiques.




Qu’est-ce qu’un modéré ? Quelqu’un qui n’appelle pas au terrorisme ? Certes, mais ça ne suffit pas



Vous qualifiez une partie de l'extrême gauche de « collaborationniste ». N'est-ce pas exagéré ?


Je parle à la fois d'une partie de l'extrême gauche, mais aussi d'une partie des féministes et de certains hommes politiques. C'est une catégorie de l'extrême gauche qui, d'une façon illusoire, perçoit les musulmans comme une communauté qui serait un nouveau prolétariat. Cette approche est, encore une fois, extrêmement condescendante et paternaliste, voyant les musulmans comme une communauté inférieure, faible qu'il faut aider et épauler. Cette partie de l'extrême gauche ne s'intéresse qu'à une catégorie de musulmans, ceux des quartiers pauvres issus de l'immigration. Alors que l'idéologie islamiste, on le sait, est financée par les gens les plus riches au monde, l'Arabie saoudite ou le Qatar. Par ailleurs, elle ne prend pas en compte le fait que dans les pays musulmans, la gauche radicale et libertaire s'est toujours fait laminer par les islamistes. Dieu que c'est dur que d'être athée dans ces pays ! Notre extrême gauche en France a par exemple oublié que Khomeiny a emprisonné et exécuté les communistes en Iran. L'islamisme avance masqué. Au début, quand ces gens n'ont pas le pouvoir, ils se présentent avec un programme attrape-tout, des velléités de revendications sociales et de projets ouvriers. Mais une fois arrivés au pouvoir, ils se retournent complètement contre ça. Aujourd'hui, est-ce qu'il y a une seule théocratie islamique qui respecte le droit des ouvriers ou les revendications de la gauche radicale ? C'est une erreur grossière de notre extrême gauche française.



Vous vous en prenez même « imams modérés », auxquels font souvent appel les médias. Pourquoi ?


Tout d'abord, un imam reste un imam. On ne peut bien sûr pas lui demander de défiler sur un char de la gay pride. J'ai bien conscience que sont des hommes de religion, et dans une société plurielle telle que je la souhaite, ils ont bien sûr le droit d'exister. Toutefois, j'ai des sérieux doutes sur la modération de ces gens. Qu'est-ce qu'un modéré ? Quelqu'un qui n'appelle pas au terrorisme ? Certes, mais ça ne suffit pas. Quelqu'un qui, après chaque attentat, condamne le geste ? Merci, mais ces imams condamnent quelque chose qui est déjà condamné par la loi. Là où on aurait vraiment besoin d'eux, c'est pour condamner les textes qui produisent ce type d'attentat au lieu de continuer à nous chanter les louanges de l'islam. Cette modération, je ne la vois pas non plus lors d'un débat comme celui sur le burkini. Il n'y a pas eu un seul, je dis bien un seul imam qui a levé le petit doigt pour dire qu'on peut tout à fait être musulmane et mettre un bikini. Non, ils préfèrent crier à l'islamophobie et condamner le fait qu'on ne laisse pas des femmes en burkini déployer leur stratégie militante.



Le voile est pour vous « l'une des formes les plus rétrogrades de discrimination et de réification des femmes ». Mais les études et les sociologues nous disent que les femmes salafistes qui portent le jilbab en France le font volontairement. Certains vont même jusqu'à parler d'un féminisme musulman...



Je peux concevoir que celles qui portent aujourd'hui le voile, intégral ou non, n'ont pas été forcées manu militari à le faire. Si cela avait été le cas, il y aurait des plaintes, car en France, des lois permettent de se défendre. En revanche, de là à dire que c'est un choix libre, il y a quand même tout un monde... La féministe algérienne Wassyla Tamzali a vu, au cours de la décennie noire en Algérie, des centaines de milliers de femmes faire ce « choix libre » d'un seul coup. C'est quand même curieux. Wassyla Tamzali explique ainsi que le voile n'est pas un choix, mais un consentement. Peut-on réellement parler de « choix libre » lorsqu'on sait que dans plusieurs pays dans le monde, si vous ne portez pas le voile, vous êtes fouettée sur la place publique ? Pour moi, il deviendra un habit comme les autres le jour où les Saoudiennes pourront porter le voile le lundi, un jean le mardi et se mettre en bikini le mercredi. Ce jour-là, je dirai « OK ». Mais tant qu'il y a des endroits où les femmes sont couvertes de la tête au pied et qu'elles sont fouettées par la police religieuse si elles ne le font pas, qu'on ne vienne pas me parler de choix.


Celles qui parlent de choix en France sont en réalité soit des femmes qui ont consenti à porter le voile, soit des militantes de l'idéologie islamique qui empruntent les outils dialectiques des droits de l'homme et des libertés individuelles pour justement imposer la négation des droits de l'homme et de la liberté. Cet habit est un uniforme en Arabie saoudite et dans d'autres pays. En tant que féministe, je ne peux que farouchement être opposée au voile, intégral ou foulard simple, car sa fonction reste la même : couvrir la femme, l'enlaidir pour diminuer les érections inopinées. C'est une insulte à la fois pour la femme, perçue comme un objet sexuel à recouvrir, et l'homme, vu comme un primate en rut qui ne peut pas s'empêcher de violer dès qu'il voit une touffe de cheveux. Mais attention, cette aversion pour le voile ne veut pas dire que je dénie la dignité humaine à toutes les femmes qui le portent. Parce que derrière le voile, il y a un être humain, qui a des droits. Mais ces femmes ont des droits en tant qu'individus et citoyennes, et non pas en tant que ninjas couverts de la tête au pied. Je fais référence au discours du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), qui a recours à une ruse sémantique en parlant systématiquement de « femmes musulmanes », alors qu'en réalité, si elles ont été rejetées, c'est à cause de l'idéologie qu'elles représentent et non pas parce qu'elles sont nées dans une culture musulmane.





Ceux que vous nommez « collaborationnistes » sont, selon vous, les idiots utiles des islamistes. Mais n'avez-vous pas peur d'être l'idiote utile de l'extrême droite ? Le site Riposte laïque s'émerveille ainsi de voir une « femme de gauche qui parle comme Riposte laïque »...




J'ai bien vu qu'un site comme Riposte laïque m'adore, parce que je suis issue d'une culture islamique, je viens du bled, j'ai étudié en arabe, et je dis des choses qui leur font plaisir. Suis-je une idiote utile de l'extrême droite ? En réalité, lorsque j'exprime ce qui me semble être un discours de bon sens, je me préoccupe peu de la récupération qui peut être faite. J'en ai marre qu'en France, ce sont toujours les extrêmes qui posent les jalons du débat. Quand on émet une opinion, il faut surtout faire attention à se distinguer de l'extrême droite, tout ça pour finir dans un ventre mou silencieux qui a abandonné des questions importantes aux extrêmes. Si l'extrême droite a envie de récupérer mon discours, je les prie aussi de récupérer les passages les concernant, quand j'explique qu'eux et les islamistes ont la même vision d'une société en déniant aux musulmans leur individualité. Et puis, je n'oublie pas non plus que Charlie Hebdo a été accusé d'être un journal d'extrême droite alors que c'est un journal issu de la gauche libertaire et bouffeuse de curés. Lorsqu'on est un bouffeur d'islamistes, lorsqu'on déteste cette idéologie, on n'est pas raciste. Allez voir dans le monde musulman les critiques virulentes tenues par des gens qui ne connaissent même pas l'existence du Front national en France et qui ont risqué leur vie, et parfois l'ont donnée, pour tenir un discours de vérité vis-à-vis de l'islam. C'est le piège que nous tendent les islamistes. Il est grand temps de retrouver la raison et de dire que la critique de l'islam n'est pas l'apanage des racistes. Nous devons récupérer le débat !




Il faut faire attention à se distinguer de l’extrême droite, tout ça pour finir dans un ventre mou qui a abandonné des questions importantes aux extrêmes !



Vous vivez toujours sous protection policière. Comment allez-vous à titre personnel ?



(Rires). Je pense que dans ma tête, je vais beaucoup mieux que ceux qui veulent me tuer. Je suis en paix avec moi-même et le reste de l'humanité. Je ne veux tuer personne et je suis farouchement opposée à la peine de mort. J'espère que ces criminels, qui nous pourrissent notre vie à tous, seront arrêtés et jugés dans des procès qui prendront aussi en compte leur idéologie. Je trouve absurde que quelqu'un comme moi, qui n'ai jamais commis aucun crime, vive dans une prison ambulante, tandis que cette idéologie continue à vouloir se présenter comme fréquentable dans notre société. Quel fond faudra-t-il qu'on touche pour que nous prenions enfin collectivement conscience que nous sommes face à un fascisme dangereux qu'il faut combattre comme tel. Lorsque que je vois que je vis sous protection policière, je pense à toux ceux qui étaient assis à une terrasse le soir du 13 novembre ou à tous les gamins qui étaient allés regarder le feu d'artifice le 14 juillet à Nice. Ils n'étaient pas plus menacés que moi et pourtant ils sont morts. C'est pour ça que nous sommes tous menacés, vous, moi, nos enfants, nos parents, par le fascisme islamique ! C'est notre modèle de société qui est visé, et nous vivons tous avec cette anxiété permanente liée au terrorisme. C'est en disant ensemble que ne nous ne sommes plus dupes de l'islamisme, que nous le refusons en bloc que nous montrerons aux extrêmes que nous faisons très bien la différence entre un individu et une idéologie, et que ce que nous condamnons, c'est une idéologie et non pas une soi-disant communauté ou une culture.



Votre éditeur, Ring, a été présenté comme une « sulfureuse maison d'édition proche de l'extrême droite » par Arrêt sur images, les Inrocks ou le Petit Journal...


J'ai connu Ring à travers Raphaël Sorin, son conseiller littéraire. J'approuve la démarche de Ring qui est celle d'être ouverte à des auteurs diversifiés. Il y a une vraie liberté, on a carte blanche pour s'exprimer. Ring va aussi éditer le blogueur palestinien Waleed Al-Husseini qui a fait de la prison pour blasphème et qui fait partie de ces athées musulmans auxquels je dédie mon livre. Moi, je suis une fille qui vient du bled et a connu les luttes réelles pour la démocratie, la liberté de picoler comme de faire l'amour. J'ai été journaliste au Maroc où, de facto, on est en liberté conditionnelle. Les petites querelles de chapelle du marigot parisien m'échappent donc complètement.



Vous avez quitté Charlie Hebdo le 9 septembre en expliquant que « le journal n'est plus le même »...


Ce journal n'est évidemment plus le même parce que les meilleurs d'entre nous sont morts. Parmi ceux qui ont survécu, beaucoup sont partis. Aujourd'hui, je me sens étrangère dans ce journal et je tourne la page. Mais ça reste une expérience qui m'a formée. On a vécu quelque chose qui est capital dans l'histoire du journalisme et de notre pays. Je reviendrai certainement un jour sur cette expérience. Mais aujourd'hui, je suis d'abord très heureuse d'être en vie. Avec ce rappel permanent de la mort qui rôde, j'ai tout simplement envie de vivre. Je quitte Charlie en paix.







Détruire le fascisme islamique, de Zineb (Ring, 70 p., 6,90 €).


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