Venezuela: peinant à mobiliser la rue, Guaido se rapproche de l'armée américaine

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Le poulain de la CIA semble bien isolé

CARACAS — Peinant à mobiliser la rue après le soulèvement manqué, l'opposition vénézuélienne se rapproche de l'armée américaine, faute d'avoir pu entamer le soutien des militaires au président Nicolas Maduro.


L'opposant Juan Guaido, reconnu président par intérim du Venezuela par une cinquantaine de pays dont les États-Unis et le Canada, a demandé à son représentant à Washington Carlos Vecchio de prendre contact avec le commandement américain pour l'Amérique du Sud (Southcom).


Carlos Vecchio a écrit samedi à l'amiral Craig Faller, qui dirige le Southcom, pour mettre en place une «coopération stratégique et opérationnelle afin d'en finir avec la souffrance de notre peuple et restaurer la démocratie», selon un tweet publié lundi qui reproduit ce courrier.


Le Southcom avait affirmé jeudi être «prêt» à discuter du «soutien» qu'il pourrait apporter aux responsables de la Marine vénézuélienne «qui ont fait le bon choix».


Selon l'entourage de Carlos Vecchio, la rencontre pourrait avoir lieu dans les prochains jours.


C'est la première fois qu'un rapprochement entre le camp de Guaido et l'armée américaine est rendu public. Washington, qui n'a de cesse de renforcer ses sanctions contre Caracas, n'écarte pas une intervention militaire au Venezuela.


Caracas a vivement réagi lundi par la voix de la vice-présidente Delcy Rodriguez.


«Nous avons lu et nous rejetons une chose répugnante, un courrier envoyé par un des putschistes qui se cache à Washington, où il demande une intervention militaire au Venezuela», a-t-elle déclaré à la télévision, au côté du général Vladimir Padrino, son ministre de la Défense.



Au Venezuela, où Nicolas Maduro et Juan Guaido sont engagés dans un bras de fer depuis trois mois et demi, l'armée est un acteur central du pouvoir : elle contrôle le secteur du pétrole, poumon économique du pays, et plusieurs ministères.


Le vent a tourné


Depuis qu'il s'est déclaré président par intérim le 23 janvier, Juan Guaido n'a eu de cesse d'appeler les militaires à rompre le rang et à tourner le dos au chef de l'État socialiste. Il comptait pour cela sur le soutien de dizaines de milliers de personnes, qui descendaient dans la rue à chacun de ses appels à manifester.


Mais depuis le soulèvement manqué du 30 avril et l'offensive du pouvoir contre les «traîtres» à l'origine de la tentative de rébellion, le vent semble avoir tourné dans la rue.


Samedi, ils n'étaient qu'entre 1500 et 2000 sur la place Alfredo-Sadel dans un quartier de l'est de Caracas majoritairement acquis à l'opposition, selon des journalistes de l'AFP.


Au contraire de précédentes manifestations anti-Maduro, qui ont rassemblé des foules beaucoup plus importantes, celle-ci n'a pas quitté la place pour sillonner les rues de la capitale.


«Érosion naturelle»


Le pouvoir de mobilisation de Guaido a subi une «érosion» qui est «naturelle», a expliqué à l'AFP Félix Seijas, directeur de l'institut de sondages Delphos, qui situe à 59 % le niveau de confiance des Vénézuéliens en Guaido, contre 63 % lorsqu'il était au plus haut.


«Guaido a vendu l'idée que le soutien à Nicolas Maduro au sein de l'armée n'était pas si important», mais il a été démenti par les faits et «a désormais moins de pouvoir de négociation», selon le cabinet Eurasia Group.


En parallèle à ce rapprochement entre l'opposition vénézuélienne et l'armée américaine, un général vénézuélien considéré comme proche du pouvoir a appelé les forces armées de son pays à se soulever contre Nicolas Maduro dans une vidéo diffusée sur internet.


«Le temps est venu de nous soulever, de lutter (...), il est temps que les forces armées nationales prennent conscience» de la situation, a déclaré Ramon Rangel, qui se présente comme général de division de l'armée de l'air vénézuélienne, dans une vidéo postée dimanche sur YouTube.


Selon la spécialiste des questions militaires et présidente de l'ONG Control Ciudadano Rocio San Miguel, la déclaration de Rangel est «très importante», car elle montre que «le chavisme militaire est en rupture avec Maduro», a-t-elle écrit sur Twitter.


Le Conseil de sécurité de l’ONU tiendra mardi - à la demande pour la première fois des Européens - une réunion à huis clos sur le Venezuela. La dernière réunion remonte au 10 avril et avait été demandée, comme les précédentes, par Washington.




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