L'opinion de Bernard Landry #41

Une loi de fous!

L'opinion de Bernard Landry

Ce titre provocateur reprend mot pour mot une phrase utilisée par Pierre Elliott Trudeau pour décrire la Loi 101 de René Lévesque et Camille Laurin, adoptée en 1977. Si je m'inspirais de ce style méprisant pour qualifier le jugement récent de la Cour Suprême du Canada, qui annule la loi 104, votée à l'unanimité par notre Assemblée Nationale, vous devinez facilement ce que je pourrais en dire!
Il est même curieux de qualifier de jugement cette décision, tellement ceux et celles qui l'ont prise ont démontré n'en avoir aucun. Ils ont brisé une de nos lois qui était le bon sens même et appuyée par tous nos députés. Le texte de cette loi avait pour but de protéger ce facteur majeur d'intégration à notre identité nationale qu'est l'apprentissage de la langue française par les nouveaux arrivants. Cette exigence est d'abord dans l'intérêt de ceux que nous accueillons. La Cour Suprême, en permettant de la contourner, compromet l'avenir de ceux dont elle prétend protéger les droits chimériques. Cette décision devrait servir à nous faire réaliser une fois de plus que le gouvernement par les juges, que Trudeau a imposé au Québec, nous empêche encore et toujours de gérer notre destin national.
Qu'y a-t-il de plus juste pour les enfants des immigrants que de fréquenter les mêmes écoles que nos enfants et de s'instruire dans la langue de la nation qu'ils ont librement choisie comme nouvelle patrie? Si cette exigence tellement évidente ne leur convenait pas, il était facile pour eux d'aller s'installer ailleurs. Certains ont plutôt choisi par l'astuce de tenter de la contourner en envoyant leurs enfants pour une courte période dans les écoles anglophones privées. Ils acquéraient de cette manière, et en payant, le droit perpétuel aux écoles publiques anglaises pour toute la famille et ses descendants. Il est clair que le Québec respecte scrupuleusement les droits de sa minorité anglophone d'environ 8% de la population. La Loi 101 a même généreusement élargi ce droit à des immigrants arrivés ici avant sa proclamation.
Nous avons été, d'une certaine manière, trop complaisants en nuisant ainsi pendant des années à l'intégration d'un très grand nombre de nos compatriotes issus de l'immigration. Il est étonnant qu'un intellectuel soi-disant progressiste comme Pierre Elliott Trudeau n'ait pas compris la justesse et la justice d'une chose aussi évidente, et qui se pratique dans toutes les démocraties. Pourrait-on penser qu'un immigrant arrivant aux États-Unis, en France, en Italie ou au Danemark, puisse réclamer pour ses enfants un enseignement public dans une autre langue que la langue nationale. Un professeur de droit comme Trudeau ne pouvait pas ne pas être au courant de ces évidences. Par quelle invraisemblable acrimonie contre la nation dont il était le fils, a-t-il pu nous imposer contre la volonté de René Lévesque comme celle de Claude Ryan et de notre Assemblée Nationale, une constitution dont l'un des buts principaux -tous les experts sont d'accord- était de démolir une loi qu'il considérait comme "une loi de fous"?
Toujours est-il que ces obsessions trudeauistes continuent à faire leurs ravages en cherchant à démolir morceau par morceau la Charte de la langue française. Des juges, tous nommés par Ottawa, et toujours majoritairement non québécois, perpétuent l'un des objectifs majeurs de celui qui a instauré le gouvernement par les juges et leur a donné tant de pouvoir.
Cette fois leur jugement, censé favoriser la justice, fait scandaleusement le contraire et viole une valeur québécoise fondamentale d'égalité de tous devant la loi, quels que soient leurs moyens de fortune. Il consacre la possibilité pour un immigrant riche, ou aidé par d'éventuelles fondations anglophiles, d'utiliser cette "passerelle" par l'école anglaise privée, compromettant ainsi les chances d'intégration de ses propres enfants.
C'est créer l'injustice en invoquant faussement la justice.
Notre Assemblée Nationale avait parfaitement réglé ce problème du contournement astucieux. Mais les juges du plus haut tribunal du Canada, au lieu d'accepter tout simplement cette décision judicieuse, ont choisi, par une décision fumeuse, d'accréditer la possibilité de comportements inciviques. Puis, leur décision absurde rendue, comme s'ils en soupçonnaient quand même l'incongruité, les juges donnent un an à notre Assemblée Nationale pour instaurer peut-être des procédures d'examen au cas par cas. On voit venir les contestations sans fin, les faux espoirs, et les retours à... la Cour Suprême du Canada.
Trudeau, décidément mal inspiré, a en plus dit de la constitution qui permet de tels errements: "qu'elle allait durer mille ans"! La vraie folie, c'est évidemment d'accepter de continuer à vivre dans un tel régime imposé, quand notre nation a la possibilité de choisir la liberté.
Bernard Landry


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