Mathieu Turbide - C'est en criant à tue-tête pour qu'on l'entende malgré son micro coupé que le conseiller municipal indépendant de Pointeaux- Prairies, Nicolas Montmorency, aura fait sa dernière intervention au conseil municipal, hier soir.
Pendant la période des questions de l'opposition, le jeune conseiller a reproché au maire Gérald Tremblay et aux autres élus du conseil de ne pas l'avoir défendu lorsqu'il a été «roulé dans la boue» par les médias anglophones, pendant l'été.
Nicolas Montmorency avait lancé, au mois d'août, la suggestion de changer le nom de la rue Amherst, en raison du passé militaire douteux de l'officier britannique Jeffrey Amherst. Selon certains historiens, Amherst aurait ordonné d'utiliser des bactéries pour éliminer des populations amérindiennes.
«Je me suis fait rouler dans la boue, A mari usque ad mare de ce bien peu respectueux pays qu'est le Canada. À la une de plusieurs journaux, on m'a traité d'idiot, de raciste, d'ignorant», a-t-il dit, avant d'accuser le maire Tremblay et le chef de l'opposition, Benoît Labonté, d'être restés «assis sur votre chaise [...] dans le confort de votre indifférence la plus totale».
Mais comme son intervention se prolongeait bien au-delà du temps permis pour poser sa question, le président du conseil, Marcel Parent, lui a demandé à deux reprises de conclure et de poser sa question.
Cris et applaudissements
Mais pendant que le conseiller continuait de parler rapidement, sans prendre son souffle -et sans poser sa question -, son micro a été coupé.
C'est alors que Nicolas Montmorency s'est mis à crier afin que les conseillers et les personnes assises dans l'assistance puissent l'entendre. Il a continué son discours de cette manière pendant plus de deux minutes.
On l'a entendu citer Diane Lemieux, nouvelle recrue de Gérald Tremblay, quand elle avait dit que l'Ontario n'avait «pas de culture», mais que Montréal en avait bel et bien une, ce qui a provoqué des applaudissements dans l'assistance.
Nicolas Montmorency a été élu en 2005 sous la bannière de Vision Montréal, mais il siège comme indépendant depuis 2006. Il a annoncé récemment qu'il ne serait pas candidat aux prochaines élections.
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Discours de Nicolas Montmorency à l’Hôtel de ville de Montréal 22 septembre 2009
Lors du dernier conseil, j’ai soumis deux motions : l’une concernant la rue Amherst, et l’autre au sujet de la francisation des lieux publics de Montréal. Je ne m’attarderai pas sur la question d’Amherst, car à mon avis j’ai fais ce qui devait être fait, ne voulant pas qu’un génocidaire soit honoré dans sa ville. Pour le reste, vivez avec votre conscience. Par contre, je ne peux passer sous silence votre silence sur la motion au sujet du visage français de Montréal, parce que bien au-delà du symbole, il s’agit de l’avenir de toute une nation et de sa culture, et de l’image qu’elle en projette.
Au moment où les médias anglophones ont pris connaissance de ma proposition, je me suis fait rouler dans la boue, ad mare usque ad mare de ce bien peu respectueux pays qu’est le Canada envers ses communautés francophones. À la une de plusieurs journaux, on m’a traité d’idiot, de raciste, d’ignorant. On m’a accusé de tous les maux des anglophones montréalais, dont quelques membres se pensent au bord de leur extinction!
Vous comprendrez donc mon désarroi, quand aucun d’entre vous ne s’est levé pour m’appuyer, venant en quelque sorte approuver ces discours haineux en mon endroit. Tous et chacun, du maire au chef de l’opposition, vous êtes restés assis sur votre chaise, bien installé dans le confort de votre indifférence la plus totale. Vous n’avez peut-être pas apprécié mes propos à votre égard, mais sachez que je les pensais très sincèrement.
Le français est menacé à Montréal, c’est une évidence à laquelle il ne semble, ici, n’y avoir que moi qui la voit, en plus des 90% des francophones de notre ville. Sur la rue ou à la maison, les Montréalais de toutes origines peuvent bien parler la langue qu’ils veulent, c’est un enrichissement culturel pour tous les Québécois. Par contre, à Montréal, la langue commune et publique, c’est le français : pas l’anglais. C’est le français et rien d’autre. Ceux qui ont peur de l’affirmer, qui n’osent pas vivre et partager fièrement notre héritage en public sont les véritables colonisés. Ils vivent dans le passé, dans cette époque du Québécois né pour un petit pain. L’avenir de notre pays ne passe pas par une uniformisation de sa culture.
Notre avenir, c’est une ville comme Barcelone, une ville fière de sa culture et dont les habitants se tiennent debout pour la faire respecter, même s’ils sont si peu nombreux à parler leur langue.
Notre avenir, c’est notre spécificité, notre passé historique qui nous fait prendre conscience – du moins pour certains d’entre nous – de la beauté et de la richesse que sont toutes les cultures. Ça, on peut l’affirmer avec fermeté à travers le monde.
Mais avant, il faut aussi savoir se respecter soi-même, ne pas avoir peur d’oser être ce que nous sommes et surtout, de le montrer.
Comme l’a si bien dit Diane Lemieux alors qu’elle devenait ministre de la culture du Québec, il n’y a pas de culture proprement canadienne. Par contre, ce que je dis, c’est qu’il y a une culture propre à Montréal, propre au Québec, et que nous devons tout faire pour la protéger, pour qu’elle rayonne à travers le monde. Alors arrêtons de vouloir nous comparer à des villes comme Toronto, une ville forte économiquement, mais qui comble un vide culturel en copiant ce qui se fait ailleurs.
N’oublions jamais que Montréal, c’est aussi l’avenir du Québec tout entier. C’est ici, qu’on le veuille ou non, qu’est en jeu notre essor culturel, qui doit rayonner plus fort que jamais.
J’adresse ma question au maire de Montréal, mais également à tous ceux qui sentiront le besoin de répondre. Quel avenir entrevoyez-vous pour Montréal? Une petite ville sans particularité? Une petite ville comme tant d’autre, qui perd la base de sa culture au profit de ce qu’on retrouve partout ailleurs? Soyez réalistes, arrivez au 21e siècle! Notre richesse, notre force, c’est notre culture, c’est notre langue! Faisons de Montréal une ville forte sur le plan international, faisons de Montréal ce qu’elle doit être, une ville à notre image.
Monsieur Tremblay, Madame Harel allez vous faire honneur au poste que vous prétendez, pourriez vous faire honneur à tous vos ancêtres francophones qui se sont battus avant vous, et dire haut et fort que Montréal, c’est une ville de langue française.
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