Agence France-Presse

Trump accuse les renseignements américains d'être «naïfs»

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Trump désengage ses troupes en Syrie mais menace l'Iran


Les mots surprennent dans la bouche d'un président américain: Donald Trump a accusé mercredi les chefs de ses propres services de renseignement d'être «naïfs», après avoir été contredits par ces derniers sur plusieurs axes majeurs de sa politique étrangère.


Si ce n'est pas la première fois que Donald Trump s'en prend à ces grandes agences fédérales très respectées aux États-Unis, cette rafale de tweets se distingue par son ton particulièrement agressif et ironique.


Syrie, Corée du Nord, Iran: mardi devant le Sénat, Gina Haspel, directrice de la CIA, et Dan Coats, directeur du renseignement, tous les deux nommés par Donald Trump, avaient dressé un tableau des grandes menaces mondiales reflétant un désaccord marqué avec l'analyse du locataire de la Maison-Blanche.


«Les membres des services de renseignement semblent être extrêmement passifs et naïfs concernant les dangers que représente l'Iran. Ils ont tort!», a rétorqué M. Trump mercredi matin.





Selon Mme Haspel, l'Iran respecte toujours «techniquement» l'accord conclu en 2015 avec les grandes puissances pour l'empêcher de se doter de la bombe atomique, dont les États-Unis se sont retirés l'an dernier comme l'avait promis Donald Trump pendant sa campagne.


Et si les Iraniens envisagent de «prendre leurs distances» avec ce texte, c'est, a-t-elle noté, en raison de l'absence de retombées économiques, Washington ayant rétabli des sanctions draconiennes contre Téhéran après son retrait, qui avait suscité la colère des alliés européens des États-Unis.


«Quand je suis devenu président, l'Iran causait des problèmes dans tout le Moyen-Orient et au-delà. Depuis notre retrait du terrible accord sur le nucléaire iranien, ils sont TRÈS différents, mais restent une source potentielle de danger et de conflit», a poursuivi M. Trump sur Twitter.


«Méfions-nous de l'Iran. Les membres des services de renseignement devraient peut-être retourner à l'école!», a encore écrit M. Trump, arrivé au pouvoir en janvier 2017 sans la moindre expérience politique, diplomatique ou militaire.


Autre sujet d'analyses divergentes: la Corée du Nord.


«Nos évaluations continuent de montrer qu'il est peu probable que la Corée du Nord abandonne toutes ses armes nucléaires», ses missiles et «ses capacités de production», avait souligné Dan Coats devant le Congrès.


Malgré la suspension des essais nucléaires et balistiques «depuis plus d'un an» et «le démantèlement réversible de certaines parties des infrastructures», «nous continuons à observer des activités non compatibles avec une dénucléarisation totale», avait-il ajouté.


Dans un tweet, M. Trump a lui évoqué mercredi matin «une bonne chance» d'aboutir à la dénucléarisation. «Les relations entre les États-Unis et la Corée du Nord n'ont jamais été aussi bonnes», a-t-il écrit.


«Pas de tests, rapatriement des dépouilles (de soldats américains morts durant la guerre de Corée, NDLR), retour des otages», a-t-il ajouté, réaffirmant sa volonté de rencontrer une nouvelle fois le leader nord-coréen Kim Jong Un, après leur premier sommet de Singapour en juin 2018.


«Énormes progrès»


Sur la Syrie aussi, Donald Trump a tenu à répondre, par courts messages interposés, aux conclusions du renseignement américain.


«D'énormes progrès» ont été accomplis depuis deux ans, a-t-il souligné, sans cependant être aussi catégorique que lorsqu'il avait lancé, le 20 décembre: «Nous avons gagné contre le groupe EI, il est temps de rentrer».


Le groupe État islamique «contrôle encore des milliers de combattants en Irak et en Syrie», avait mis en garde la veille Dan Coats.


«Il faut saluer nos agences de renseignement, qui continuent à fournir des analyses rigoureuses et réalistes des menaces auxquelles nous sommes confrontées», a réagi le démocrate Adam Schiff, président de la commission sur le renseignement à la Chambre des représentants.


«Le fait que la Maison-Blanche n'écoute pas est terriblement dangereux», a-t-il ajouté.


Signe du malaise provoqué par certaines positions de Donald Trump jusque dans les rangs des plus fidèles républicains, le chef du Sénat, Mitch McConnell, a présenté cette semaine un amendement soulignant qu'Al-Qaïda, le groupe Etat islamique et «leurs associés en Syrie et en Afghanistan continuent de représenter une menace sérieuse» pour les États-Unis.


Très rarement critique du président en public, le sénateur républicain a mis en garde contre «le danger d'un retrait précipité de ces deux conflits». Ce texte pourrait être soumis à un vote dès jeudi.


Le 45e président des États-Unis avait suscité un tollé au sein de son propre camp lorsqu'il avait, lors d'une conférence de presse à Helsinki avec Vladimir Poutine, semblé accorder plus de valeur aux propos de son homologue russe qu'aux conclusions des agences de renseignement américaines sur l'ingérence de Moscou dans la campagne présidentielle de 2016.