Si seulement j’avais le droit de vote… - J’en profiterais au maximum. Je ferais partie du 35% de jeunes de 18 à 34 ans qui prennent la peine d’exercer leur droit démocratique, droit pour lequel plusieurs se battent et meurent à travers le monde. Vous savez, cette chose que nous appelons droit mais que certains pourraient qualifier de privilège ou même de rêve?
Ah! Si seulement j’avais le droit de vote… - Malheureusement, je dois me contenter du rêve de voter. Mais pour qui voterais-je? Moi qui ne suis qu’une goutte perdue dans la masse océanique de millions d’électeurs qui, selon leur positionnement entre les deux pôles de la sphère hydrographique, au gré des courants et des vagues, décideront de la direction que prendra ce grand pays s’étendant d’un océan à l’autre pour les cinq prochaines années à venir. Et bien, nageant dans un coin du fleuve St-Laurent baignant la côte de Beaupré, juste aux abords de Québec et à deux brassées du torrent que sont les chutes Montmorency, je dois dire que la couleur qui semble ressortir du millilitre que je suis est le bleu. Bleu pâle, et non bleu foncé. Bleu pâle comme l’eau fraîche et limpide de la rivière Montmorency qui, après avoir dévalé en cascades les parois de la falaise, pleine d’énergie et de vigueur, s’en va se jeter 83 mètres plus bas dans l’eau foncée et un peu souillée du fleuve. La démarcation qui s’en trouve ainsi créée entre l’eau bleue pâle de la chute et l’eau bleu foncé du reste du fleuve, visible durant les beaux jours de l’été, démontre bien l’incompatibilité de ces deux courants, de ces deux couleurs, qui se confrontent et ne se mélangent pas très bien. Vous l’aurez compris, je suis bleu pâle comme le Bloc Québécois et la grande étendue bleu foncé conservatrice qui s’ouvre devant moi me rebute autant qu’elle m’effraie.
Si seulement j’avais le droit de vote… - Je voterais pour le Bloc Québécois. Pourquoi? Je pourrais étaler les raisons pour lesquelles je ne voterais pas pour chacun des autres partis, mais ce serait trop négatif, n’est-ce pas? Alors je voterais pour le Bloc parce que je me suis posé 4 questions primordiales. Suis-je différent, en tant que Québécois francophone, des autres Canadiens? Oui. Le statu quo actuel avec les autres provinces est-il une bonne façon de reconnaître cette différence? Non. Le ROC me semble-t-il ouvert à reconnaître cette différence dans un futur proche par des actions et non seulement par des paroles en l’air? Non. Alors le Canada est-il mon pays? Non.
Ce qui fait de moi un souverainiste convaincu à l’âge de 16 ans. Je n’étais pas au monde en 1867 lors de la création du Canada, je n’étais pas là non plus en en 1980 lors du premier référendum, et le 30 octobre 1995, date du deuxième référendum, j’avais 7 mois. Je connais mon histoire par contre, et je sais qu’à chacune de ces trois occasions, la place du Québec au sein du Canada s’est décidée par la tricherie et dans l’illégalité, que ce soit par une élection référendaire (donc qui pouvait être remportée avec moins de 50% des voix, ce qui fut le cas) à laquelle des électeurs ont pu participer sans exister, par des dépenses huit fois supérieures à la loi référendaire québécoise ou par une série d’actes répréhensibles commis par le Parti Libéral du Canada que l’on appelle «scandale des commandites». Le Canada est une fraude pour moi, une illusion, un mirage. C’est drôle, j’entends souvent des fédéralistes me parler de pourquoi le Québec ne devrait ou ne pourrait se séparer du Canada, mais jamais on ne m’a exposé quels sont les avantages pour le Québec de faire partie du Canada. Qu’avons-nous à y gagner? De la péréquation? Cadeau empoisonné. De la reconnaissance? Je n’en vois aucune. Des amis? Savez-vous comment certains Rest-of-Canadians décrivent les fucking frenchies?
Si seulement j’avais le droit de vote… - Je m’opposerais corps et âme à une majorité conservatrice, qui ne respecte pas du tout mes valeurs de démocratie, d’égalité des chances, d’équité et de justice pour tous. Comment peut-on reconnaître le droit à la vie d’un fœtus mais pas à un criminel? Comment peut-on aussi peu respecter l’environnement et les générations futures qui auront à vivre avec les pots cassés qui ne seront pas réparables? Comment peut-on autant ne pas respecter la démocratie, en voulant supprimer le financement des partis politiques alors que l’on sait très bien que cela ne fera qu’avantager l’ami des riches compagnies pétrolières et de la droite évangéliste canadienne, et j’ai nommé le Parti Conservateur? Comment peut-on autant museler les médias et restreindre l’information se rendant à la population? Comment peut-on vouloir faire autant reculer un pays sur presque tous les plans?
Si seulement j’avais le droit de vote… - Je saurais départager le parti qui représente vraiment les intérêts du Québec à Ottawa, c’est-à-dire principalement le contraire des intérêts des conservateurs, de celui qui tente de cultiver l’ambigüité sur plusieurs de ses positions pour à la fois séduire les Québécois et ne pas se mettre à dos le reste des Canadiens. C’est bien simple : le Bloc Québécois n’a de candidat qu’au Québec, il n’a pas à plaire au reste des Canadiens, il n’a pas à faire de compromis sur ses positions. Le NPD quant à lui ne peut pas représenter fidèlement les Québécois si son électorat est en grande partie anglophone et que chaque position en faveur du Québec lui fera perdre des votes dans le ROC. Faut-il encore rappeler le financement public par le gouvernement fédéral du projet hydroélectrique du Bas-Churchill au Labrador? Vous savez, le projet qui a été entériné par tous les partis fédéralistes lors de cette campagne? Les Québécois se retrouveraient-ils à financer par le biais de leurs impôts la construction d’infrastructures hydroélectriques qui feraient directement compétition à Hydro-Québec, alors que le Québec n’a jamais demandé un sou à Ottawa pour la construction de nos infrastructures dont nous sommes si fiers? Où est la justice et l’équité là-dedans?
Si seulement j’avais le droit de vote… - Jack Layton n’aurait pas mon appui. La montée des néo-démocrates est une bonne chose dans le ROC, j’en conviens, je ne demande pas aux anglophones de comprendre les problèmes identitaires québécois de toute façon. Seulement, au Québec, la montée du NPD, maintes et maintes fois comparée à un tsunami orange, est selon moi un phénomène d’entraînement où toutes les petites gouttes d’eau désorientées du fleuve St-Laurent se sont senties interpellées par celles qui étaient blasées d’aller toujours dans le même sens et qui voulaient modifier complètement le sens du courant. Raison valable. Ne sommes-nous pas frustrés de voir que, tout comme l’eau du St-Laurent qui part des Grands Lacs et coule vers le Québec, les décisions se prennent toujours en Ontario et s’écoulent vers le Québec, qui subit? Par contre, tout comme la vague adéquiste qui frappa le Québec en 2007, le tsunami néo-démocrate sera selon moi un phénomène temporaire, qui culminera en un point et en suite retombera dans un creux. Car au final, si l’on revoit un peu la physique des ondes, les gouttes d’eau qui forment le tsunami ne se déplacent pas réellement : sous l’effet du choc, elles transmettent l’énergie de l’onde d’une particule à l’autre mais restent toujours à la même place. Ainsi selon moi, les électeurs devenus soudainement néo-démocrates seront probablement déçus par une équipe beaucoup trop inexpérimentée et reviendront appuyer le Bloc. Quand? Mystère.
Si seulement j’avais le droit de vote… - En attendant, je m’implique activement en politique, en militant au sein du Parti Québécois et du Bloc Québécois et en travaillant ardemment à la réélection de Michel Guimond dans Montmorency-Charlevoix-Haute-Côte-Nord. Qui sait? Peut-être ma contribution sera-t-elle plus importante qu’un simple vote?
Gabriel Laurence-Brook
16 ans
Membre du Parti Québécois et du Bloc Québécois
Si seulement j'avais le droit de vote...
Lettre d'un jeune de 16 ans qui aimerait tant pouvoir voter le 2 mai
Tribune libre
Gabriel Laurence-Brook3 articles
16 ans Membre du Parti Québécois et du Bloc Québécois
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
2 mai 2011Vous ète un tres bonne exemple de maturité,ce que bien des gens plus agé que vous non pas atteint encore. Vous n'avez peutètre pas une grande connesence de l'histoire,mais vous avez un tres bonne connesence du présent,et vos yeux de jeune homme on sus voir les injustices que les francais d'amérique ont à faire face chaque jour de leur existence.Merci d'avoir partager vôtre avis politique avec des gens comme moi qui depuis des années se vôut à la cause la plus noble,qui est de donner à leurs semblables un pays ou ils pouront vivre et prosperer à leurs facons.
Archives de Vigile Répondre
2 mai 2011Gabriel, si à 16 ans vous avez la capacité d'écrire un tel texte, eh bien! vous avez un bel avenir devant vous. Mes félicitations!
Jean-François-le-Québécois Répondre
2 mai 2011@ Gabriel L.-Brook:
« Moi qui ne suis qu’une goutte perdue dans la masse océanique de millions d’électeurs...».
Non, cher Gabriel, chaque vote compte. Et toutes mes félicitations, pour ce texte si magnifiquement rédigé.
Vous me redonnez confiance en l'avenir, en notre jeunesse, et en la nation québécoise. Merci beaucoup!
Peut-être pourrez-vous voter, lors d'un troisième référendum? Souhaitons-le!