Sécurité de la vieillesse

Ottawa enverrait sa facture aux provinces

Le chef libéral par intérim, Bob Rae, estime que les provinces devraient être consultées advenant une réforme du programme fédéral de la Sécurité de la vieillesse.

Sécurité de la vieillesse - rupture d'un pacte social


Hélène Buzzetti Ottawa — Le gouvernement conservateur n'a toujours pas dévoilé la réforme de la Sécurité de la vieillesse qu'il envisage que déjà certains craignent qu'elle se traduise par une facture plus salée pour les provinces. Car si Ottawa repousse l'âge d'admissibilité de 65 à 67 ans comme le veut la rumeur, les plus pauvres toucheraient alors de l'aide sociale provinciale pendant deux années supplémentaires.
La plupart des programmes d'aide sociale des provinces constituent une aide de dernier recours. Pour y avoir droit, il faut que le prestataire ait épuisé toutes ses autres ressources. Cela fait en sorte que, en général, les bénéficiaires quittent l'aide sociale à l'âge de 65 ans lorsqu'ils se qualifient au programme fédéral de la Sécurité de la vieillesse.
«Il n'y a pas d'âge limite pour recevoir des prestations du programme Ontario au travail [l'aide sociale ontarienne], mais les individus doivent d'abord tenter d'obtenir d'autres ressources, comme la Sécurité de la vieillesse, avant de se qualifier», confirme une porte-parole du ministère des Services sociaux et communautaires, Kristen Tedesco. Même règle du côté québécois, où les demandeurs ont l'obligation de demander d'abord les autres prestations auxquelles ils ont droit en vertu d'autres programmes.
Les rumeurs persistantes veulent qu'Ottawa repousse de 65 à 67 ans l'âge d'admissibilité à la Sécurité de la vieillesse. Les personnes les plus pauvres, qui n'ont d'autres revenus que ce programme, devraient donc percevoir l'aide sociale deux années supplémentaires en attendant de se qualifier.
Selon le porte-parole du ministère québécois de l'Emploi et de la Solidarité sociale, François Lefebvre, il y avait 8101 prestataires d'aide sociale de 64 ans en mars 2011 et 3692 de 65 ans. Cette brusque diminution s'explique entre autres par l'admissibilité des prestataires au programme fédéral. En moyenne, les ménages touchent 637 $ par mois.
Les changements au programme de Sécurité de vieillesse ont été évoqués pour la première fois la semaine dernière par Stephen Harper à Davos. Depuis, aucun détail n'a été fourni. Le ministre d'État aux Finances responsable de ce dossier, Ted Menzies, a fui les journalistes après la période de questions hier.
Le chef libéral par intérim, Bob Rae, estime qu'Ottawa s'apprête seulement à pelleter la responsabilité des plus pauvres dans la cour des provinces. «Nous commençons à avoir des discussions avec les provinces pour voir quel est le chiffre responsable, mais ça aura un impact sévère sur les provinces parce qu'elles devront encore prendre sous leur responsabilité, avec leur système de bien-être social, tous ceux qui ne sont pas admissibles pour leur pension [leur sécurité de vieillesse].» Pour cette raison, M. Rae croit que les provinces devraient être consultées avant que le changement au programme soit apporté.
Notons de plus que, pour une personne qui a perçu de l'aide sociale toute sa vie, l'obtention de la prestation de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti à 65 ans lui permet d'améliorer son sort. «Il devient moins pauvre qu'il ne l'était auparavant, note le fiscaliste de l'Université de Sherbrooke Luc Godbout. En rehaussant l'âge d'admissibilité, il y aura une prolongation d'une plus grande pauvreté.»
À la Chambre des communes, cette éventuelle réforme a abondamment alimenté les échanges encore hier. «Un rapport commandé par ce gouvernement démontre que le Canada ne fait pas face à une crise du financement des régimes publics de retraite. C'est le rapport Whitehouse. Je conseille au premier ministre de le lire», a lancé la chef du NPD par intérim, Nycole Turmel.
M. Harper, qui continue de dire que les réductions s'appliqueront seulement aux prestataires futurs, a répliqué que «les changements démographiques exercent des pressions non seulement sur notre système de revenus pour des années, mais également sur beaucoup d'autres programmes». C'est pourquoi, dit-il, son «gouvernement va agir pour assurer la viabilité de nos programmes pour toutes nos générations à venir».
Contrairement au Régime de pensions du Canada, le programme de Sécurité de vieillesse n'est pas un fonds capitalisé. Il s'agit d'un programme de revenus pour les personnes de 65 ans ou plus, qu'elles soient à la retraite ou non. Les Québécois en reçoivent aussi. Les prestations versées ne sont pas fonction de cotisations payées dans le passé comme pour un régime de retraite. Le programme s'apparente davantage à la prestation fiscale canadienne pour enfants, qui diminue à mesure que les revenus du citoyen augmentent. La prestation moyenne de Sécurité de la vieillesse est de 540 $ par mois (à quoi s'ajoute le Supplément de revenu garanti pour les plus pauvres). Un citoyen voit sa prestation diminuer s'il touche des revenus (de pension, de REER, de travail ou autre) de plus de 69 000 $ et atteindre zéro lorsque les revenus dépassent 112 000 $. Les prestations sont imposables.
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Ottawa — Le gouvernement Harper imposera le bâillon pour limiter les débats sur la création d'un nouvel outil d'épargne-retraite. Le projet de loi devant créer les nouveaux «régimes de pension agréés collectifs» n'est pas très controversé. Il doit offrir simplement une nouvelle option aux employeurs et aux travailleurs qui veulent épargner en vue de la retraite. Mais les députés de l'opposition ont utilisé ce débat pour attaquer le gouvernement Harper sur l'enjeu du programme de la Sécurité de la vieillesse. La majorité conservatrice a voté pour limiter à deux jours le débat en deuxième lecture sur le projet de loi sur les régimes de pension agréés collectifs. (La Presse canadienne)


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