Réhabilitation d'Yves Michaud

Le PQ refuse le débat sur la motion

Affaire Michaud 2000-2011


Yves Michaud: «Je m’aperçois que je dois complètement réviser mon jugement et je suis obligé de conclure que Pauline, elle ne peut donner que ce qu’elle a et ce qu’elle a, c’est pas beaucoup.»
_ Photo : Jacques Nadeau - Le Devoir

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Robert Dutrisac - L'affaire Michaud a rebondi hier à l'Assemblée nationale quand Québec solidaire a présenté une motion pour reconnaître «l'erreur» commise dix ans plus tôt par les élus. Les libéraux voulaient en débattre pour mieux la défaire afin de casser du sucre sur les nationalistes «ethniques». Divisés, les péquistes ont refusé d'entrer dans le jeu. Yves Michaud, de son côté, dénonce le manque de courage de Pauline Marois.
Québec — Les députés péquistes ont refusé de donner leur consentement pour que soit débattue une motion, présentée par le député de Mercier, Amir Khadir, de Québec solidaire, qui affirmait que l'Assemblée nationale «reconnaît avoir commis une erreur» le 14 décembre 2000 en condamnant M. Yves Michaud pour une intervention «qui ne comportait pas de propos offensants à l'égard de la communauté juive».
«C'est un vrai piège tendu par les libéraux, qui voulaient refaire un procès à Yves Michaud et M. Michaud ne mérite pas un procès», a déclaré, hier, la chef du Parti québécois, Pauline Marois.
De leur côté, les libéraux voulaient faire leurs choux gras de cette motion et profiter du débat pour accuser le PQ de «nationalisme ethnique». Hier, dans un point de presse, le leader parlementaire du gouvernement, Jean-Marc Fournier, s'en est donné à coeur joie, donnant un aperçu des attaques que les libéraux auraient réservées aux péquistes. «On voit bien que les vieux démons du nationalisme ethnique viennent hanter le Parti québécois», a-t-il lancé, rappelant la déclaration sur les «votes ethniques» de Jacques Parizeau le soir du référendum de 1995. «On voit aujourd'hui que le Parti québécois n'a pas la capacité d'exprimer haut et fort qu'au Québec, tous les Québécois ont le droit de faire des choix démocratiques qui leur appartiennent sans qu'on les juge, sans qu'on les traite de traîtres.»
Le PQ divisé
La motion présentée hier a plongé dans l'embarras le caucus péquiste, qui est profondément divisé sur cette question. Un député comme Sylvain Simard, par exemple, s'oppose farouchement à ce qu'on présente quelque excuse que ce soit à Yves Michaud.
Parmi les dix députés toujours à l'Assemblée nationale qui ont voté il y a dix ans pour la motion dénonçant «sans nuances, de façon claire et unanime, les propos inacceptables à l'égard des communautés ethniques et en particulier à l'égard de la communauté juive tenus par Yves Michaud», seule Louise Beaudoin a présenté ses excuses à M. Michaud. Jeudi, c'était au tour du député d'Abitibi-Ouest, François Gendron, et du député de Bertrand, Claude Cousineau, de faire part de leur regret dans des lettres qu'ils ont fait parvenir chacun de leur côté à l'intéressé.
Dans une lettre datée de jeudi, Pauline Marois a demandé au président de l'Assemblée nationale, Yvon Vallières, de proposer un mécanisme pour qu'une telle situation ne se reproduise plus: toute personne qui ferait l'objet d'une motion de blâme devrait être entendue avant que l'Assemblée nationale n'en soit saisie. La chef péquiste, qui refuse de présenter des excuses formelles, a joint Yves Michaud au téléphone jeudi pour tenter de l'amadouer. En vain.
Michaud déchante
Le contenu de la lettre est «lénifiant et fragmentaire», écrit Yves Michaud dans un courriel envoyé à Pauline Marois. «J'attends des députés de mon parti qu'ils s'excusent d'avoir procédé au lynchage d'un citoyen sans aucune raison valable», affirme-t-il. Les élus ne devraient pas avoir le droit de blâmer dans une motion un citoyen à moins d'une atteinte à leurs droits et privilèges, plaide-t-il.
Yves Michaud avait appuyé Pauline Marois lors de la course à la direction en 2005. Il déchante aujourd'hui. «Je m'aperçois que je dois complètement réviser mon jugement et je suis obligé de conclure que Pauline, elle ne peut donner que ce qu'elle a et ce qu'elle a, c'est pas beaucoup.» Quant aux députés péquistes, ils écopent aussi. «Qu'est-ce qui fait qu'il y a un avachissement, une telle obéissance servile des élus de la nation?» se demande-t-il, concluant à «une déréliction totale, une bassesse, un affaiblissement du parlementarisme».


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