Le pouvoir des pilules

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«Car quoi qu’on en dise, ce qu’on appelle la santé mentale est aussi une question d’environnement politique, culturel, social et psychologique»






Tout le monde le sait, mais La Presse nous l’a heureusement rappelé il y a quelques jours : on consomme de plus en plus d’antidépresseurs au Québec. On pourrait aussi dire qu’on en consomme de plus en plus dans le monde occidental.




Je devine la mise en garde des prudents : qu’un sociologue ou un chroniqueur ne se mêle pas de ce sujet ! Il appartient­­­ aux médecins, aux psychiatres, aux pharmaciens.




Individualisme




Et généralement, on s’incline : on vénère tellement les médecins dans le monde contemporain qu’on traite quelquefois le corps médical comme le clergé d’autrefois. Et pourtant, il faut réfléchir globalement à la consommation croissante d’antidépresseurs.




Car quoi qu’on en dise, ce qu’on appelle la santé mentale est aussi une question d’environnement politique, culturel, social et psychologique.




Et une société ultra-individualiste, qui disloque les familles, décompose les repères identitaires et condamne de plus en plus de gens au travail précaire, sans leur donner les moyens de se projeter dans l’avenir, est une société qui fragilise psychologiquement ceux qui l’habitent.




Si on ajoute à cela la toute-puissance de l’écran, qui nous soumet à internet en nous donnant l’illusion de la connexion globale, les conditions idéales sont réunies pour créer un malheur massif.




Lorsqu’ils se sentent aliénés, les hommes peuvent se révolter. Mais contre quoi se révolteraient-ils aujourd’hui­­­ ? Comment lutte-t-on contre la déliaison sociale ? On ne sait pas par où commencer.




Psychiatrisation




Une société aussi profondément abîmée que la nôtre ne se répare pas en un mandat électoral, ni même en une seule génération. Alors la tentation est grande de miser sur une régulation pharmacologique du désordre établi.




On convainc les gens qu’ils ne peuvent pas grand-chose à leur malheur : il serait simplement le fruit d’un dérèglement chimique du cerveau.




On psychiatrise massivement une population. À travers cela, indirectement, on la dépolitise. Peut-être serait-il temps de voir les choses autrement ?



 




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