Le nouvel opium du peuple

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La technologie n'amène aucune libération

Bye, le documentaire qui relate la quête d’Alexandre Taillefer pour comprendre la cyberdépendance qui a conduit son fils au suicide est bouleversant.


Dans un cybercafé, huit jeunes sur les vingt présents ont songé au suicide. « La vérité, c’est que les parents, vous êtes les derniers à qui on veut en parler. »


On peut développer une dépendance plus ou moins grave aux jeux vidéo, à la porno en ligne ou aux réseaux sociaux.


Leur dénominateur commun est le temps hallucinant et croissant passé devant un écran.


Dérives


J’ai l’âge de me rappeler nos illusions quand cette révolution technologique s’est mise à déferler.


Le jeu serait bon marché et accessible. La productivité serait décuplée. L’information circulerait plus vite. Tout le monde pourrait s’exprimer.


On envisageait un monde plus libre, plus convivial, plus équitable. Les lendemains allaient chanter.


Ouais...


Des jeunes ont accès à une technologie qui accentue un désarroi préexistant et peut les conduire à commettre l’irréparable.


On perd un temps fou à gérer des messages inutiles, à construire une image de soi et de sa famille souvent mensongère.


Nous sommes bombardés de publicités manipulatrices taillées selon nos goûts.


Des gouvernements lancent des armées de trolls à la chasse aux opposants.


Les enragés du web répandent leur fiel toxique et noient les commentaires intelligents.


Les faussetés circulent sans le moindre filtre. La vérité peine à être entendue.


Les accusations pleuvent sans vérification. Les fraudeurs s’en donnent à cœur joie.


Mes étudiants trouvent tous les livres trop longs et sont beaucoup moins attentifs.


Plus faciles que jadis, les plagiats semblent augmenter.


Les repas et les spectacles sont perturbés par la consultation des écrans et les sonneries intempestives.


Le patron vous envoie un courriel à une heure tardive et s’impatiente.


Les employés envoient des courriels tard en soirée pour construire leur image de gars qui travaille fort.


La recherche du consensus est de plus en plus difficile, car chacun se retranche dans un univers où il ne se nourrit que des données qui renforcent ses opinions.


Tout cela alimente le cynisme, la morosité, la division et le stress, en plus de nous faire perdre de vue les enjeux communs vraiment importants.


Réagir


Je ne dis pas que tout cela est entièrement mauvais.


Oui, la productivité augmente si vous faites le bon usage de la technologie. Oui, si vous avez une vie sociale équilibrée, Facebook permettra de l’enrichir encore.


Mais si vous avez au départ une fêlure, il y a là de quoi vous perdre.


Et si vous êtes animé de mauvaises intentions, il y a là une arme d’une extraordinaire puissance à votre portée.


La promesse initiale n’a pas été tenue.


Il faut collectivement se pencher là-dessus. Ça presse.