Le "Chinois" de Saint-Georges

"Mon ami Chen n'a jamais demandé d'accommodements raisonnables et il a prouvé qu'un immigrant peut bien vivre en région et enrichir cette dernière"

Laïcité — débat québécois


Par Pier Dutil
Au moment où les Québécois vivent des moments parfois troublants face aux accommodements raisonnables (?) demandés par certaines communautés ethniques et alors que des sondeurs essaient de nous convaincre que l'on est racistes, permettez-moi de vous présenter brièvement l'histoire de mon ami Chen.
Mon ami Chen est arrivé au Canada il y a maintenant plus de 25 ans. Au lieu de s'établir dans le quartier chinois de Montréal, il s'est mis à la recherche d'un endroit où il espérait pouvoir démarrer un commerce lui permettant de vivre décemment et d'élever une famille.
Il a abouti à Saint-Georges de Beauce où il a acquis un tout petit dépanneur. À force de travail, d'une courtoisie sans pareil, d'un service à la clientèle rare dans ce genre d'établissement, Chen s'est taillé une place importante. Son dépanneur, il l'a vite trouvé trop petit. Aussi a-il acquis le terrain voisin pour en construire un nouveau, plus grand.
Peu à peu, il a introduit une gamme de produits chinois que des habitués viennent s'y procurer. À ceux qui l'accusaient au début de venir voler des "jobs", il a répliqué en en créant un certain nombre.
Sa courtoisie et sa gentillesse lui ont lentement, mais sûrement, gagné le respect de ses concitoyens. Son commerce n'a cessé de croître et il a même pu faire venir en Beauce plusieurs membres de sa famille pour y former l'unique "quartier chinois" de Saint-Georges.
À mesure qu'il s'intégrait dans sa communauté, mon ami Chen s'est impliqué dans diverses activités, mais en mettant toujours de l'avant ses origines chinoises. On lui demande de participer à une parade de pontons sur la Chaudière; son ponton aura l'allure d'une pagode chinoise. On organise des fêtes pour célébrer le 150e anniversaire de notre communauté; Chen propose d'organiser un festival de bateaux dragons qui regroupera quelque 750 participants et attirera plusieurs milliers de spectateurs. Il a même initié des dizaines de ses concitoyens au tai-chi.
Jamais il n'a renié un aspect de sa culture. Au contraire, il n'a cessé de la promouvoir, de la faire découvrir et apprécier à ceux qu'il côtoie quotidiennement.
Aujourd'hui, mon ami Chen est un citoyen actif et respecté dans sa communauté. Quant on l'interpelle en l'appelant "le Chinois", il n'est pas insulté; il en est plutôt fier. À Noël, au jour de l'An, au Nouvel An chinois, au Yom Kippour ou durant le ramadan, il est fidèle au poste à son dépanneur, accueillant ses clients avec sa gentillesse habituelle.
Mon ami Chen se plaît en Beauce. Il a apporté et il continue d'apporter beaucoup à notre communauté, cela sans renier ses origines et sa culture. Bien au contraire, il a su nous les faire apprécier. Il est aujourd'hui respecté de tous.
Pourtant, il n'a jamais demandé d'accommodements raisonnables et il a prouvé qu'un immigrant peut s'établir, bien vivre en région et enrichir cette dernière.
PIER DUTIL

L'auteur réside à St-Georges-de-Beauce.


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