La schizophrénie des solidaires

30e4610aa4ece8f2e60b2349749ab99a

Les messages confus de l'extrême gauche

Québec solidaire soufflera ses 10 chandelles en février prochain. Dix ans pour une formation politique, c’est assurément l’âge de raison, voire même l’âge adulte.
Néanmoins, il semble que ce n’est pas pour autant un gage de maturité politique. Le plus récent bilan du parti dressé par la porte-parole Françoise David n’en faisait certainement pas la démonstration.
Aux questions des journalistes sur la possibilité d’une alliance électorale avec le Parti québécois en 2018, Françoise David n’a pas voulu fermer la porte. On ne se sabordera pas, mais on est ouvert au dialogue, a-t-elle dit pour l’essentiel. Des « alliances ponctuelles » seraient possibles.
Pourtant, c’est la même femme qui a déjà déclaré qu’elle refuserait de s’asseoir aux côtés de Pierre Karl Péladeau. « Une candidature odieuse » avait affirmé la porte-parole de QS en mars 2014.
Que l’opinion de Françoise David à l’égard de Pierre Karl Péladeau se soit améliorée, maintenant que celui-ci est devenu chef du Parti québécois, n’a rien de trop étonnant. Ce qui l’est beaucoup plus, c’est que la porte-parole de Québec solidaire, presque 10 ans après la création de son parti, n’écarte pas clairement l’idée de créer une alliance électorale avec une autre formation politique.
Au-delà du principe, il ne fait pas de doute que forger une alliance, sur la base d’un partage de circonscriptions, se révélerait désavantageux pour les deux partis, particulièrement pour Québec solidaire, compte tenu des nouvelles règles liées au financement des partis politiques.
C’est aussi un message troublant, empreint de confusion, que Françoise David envoie à ses troupes et aux électeurs québécois.
Québec solidaire n’est-il qu’un autre parti du genre Option nationale? Québec solidaire n’est-il qu’une succursale « de gauche » du Parti québécois?
Cette constante valse-hésitation est peut-être une conséquence du statut de Françoise David, qui est la porte-parole des solidaires et non pas la chef de son parti. Est-ce que cela justifie son incapacité à défendre l’autonomie de son parti? Il semble que oui.
Pour ajouter à la confusion, les députés solidaires affichent une étrange posture politique à l’égard du PQ et du PLQ.
À l’occasion de ce bilan des travaux parlementaires, le communiqué de presse de Québec solidaire attaquait de front le gouvernement Couillard. Cependant, en point de presse, après avoir énoncé la ligne de presse d’usage qui s’en prenait aux libéraux, Françoise David a lancé plusieurs de ses flèches en visant le Parti Québécois. Comme d’habitude, diraient d’ailleurs les péquistes qui le rendent bien aux élus solidaires.
Cette impression que les députés solidaires sont davantage préoccupés par le Parti québécois que par le parti au pouvoir, est confortée de deux autres façons. Les questions de Québec solidaire à l’Assemblée nationale sont rarement formulées, tel que le veut la tradition, comme des critiques de l’action du gouvernement. QS cherche plutôt à mettre de l’avant ses propres positions.
Par ailleurs, de manière très opportune, le premier ministre Philippe Couillard ne manque pas une occasion d’encenser le travail de la députée de Gouin. Le chef libéral sait bien que les solidaires sont peu susceptibles de gruger le vote libéral mais, qu’en revanche, ceux-ci sont en mesure de réduire les chances du Parti québécois de remporter une majorité parlementaire.
D’ailleurs, cette évidence explique sans doute la raison pour laquelle les députés solidaires privilégient les attaques contre l’opposition officielle péquiste, plutôt que de viser sans relâche le gouvernement libéral. Or, cette attitude électoraliste sied mal avec la volonté de Québec solidaire de faire de la politique autrement. En quoi les attaques de Québec solidaire (de même que celles de la CAQ) contre le PQ (qui en font autant) bénéficient réellement aux Québécois? Le travail des partis d’opposition est normalement consacré à la critique (si possible constructive) du travail et des orientations du gouvernement.
Naturellement, les partis d’opposition sont parfaitement libres de se disputer entre eux, même à trois ans des prochaines élections. Il est aussi légitime pour ces partis de rappeler sans cesse aux Québécois que leur offre politique est différente des autres et de la mettre en valeur. Il n’empêche qu’ils ont une obligation absolue de demander quotidiennement au gouvernement de rendre des comptes.
Un éventuel (et encore hypothétique) appui des libéraux envers un projet de loi de QS qui vise à empêcher l’expulsion des aînés de leur logement ne peut justifier la moindre clémence des solidaires à l’égard du gouvernement Couillard.
Mais, pour ce qui est de ses rapports avec le Parti québécois, les élus de Québec solidaire semblent souffrir de schizophrénie.
D’une part, sa porte-parole ne rejette pas l’idée d’une alliance électorale avec le PQ tandis que, d’autre part, toutes les occasions sont bonnes pour attaquer l’opposition officielle et son nouveau chef dans l’espoir d’élargir sa base électorale.
Il est bien difficile de réconcilier ces deux attitudes.
Les résultats électoraux plutôt décevants de Québec solidaire depuis 18 mois (malgré l’élection d’une troisième députée) démontrent peut-être que les Québécois peinent à comprendre ses cheminements.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé