La Russie promet une riposte après les sanctions «inadmissibles» de Washington

Be0a6cafe935399f69b0c3fcb1a10afb

Une douce Guerre froide

La Russie a promis jeudi des mesures de rétorsion aux nouvelles sanctions imposées par les États-Unis en lien avec l'empoisonnement à l'agent innervant Novitchok au Royaume-Uni, dénoncées par le Kremlin comme «inadmissibles», «inamicales» et «illégales».


Moins d'un mois après les échanges d'amabilités pendant le sommet d'Helsinki entre Donald Trump et Vladimir Poutine, l'heure est de nouveau à la confrontation. Si les sujets de discorde sont nombreux entre Moscou et Washington, ces nouvelles mesures punitives sont liées à l'empoisonnement début mars à Salisbury, au Royaume-Uni, de l'ex-agent double russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia.


«Quelles que soient les sanctions prises à l'encontre de la Russie, les mesures de représailles seront identiques. Elles seront prises en fonction des actions américaines», a indiqué à la presse la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova. «S'ils prennent des mesures, nous répondrons. Ce n'est pas notre choix», a-t-elle ajouté, assurant que Moscou ne se pliera pas «au langage des ultimatums et de la force».


Les sanctions envisagées par Washington, qui portent sur l'exportation de certains produits technologiques, comme des appareils ou de l'équipement électronique, pourraient coûter «des centaines de millions de dollars» à l'économie russe, a indiqué un responsable américain ayant requis l'anonymat.


En cas de non respect de ces exigences, une deuxième salve de sanctions «draconiennes» serait décrétée, a poursuivi ce responsable, notant qu'elles pourraient aller jusqu'à interdire les aéroports américains aux compagnies aériennes russes ou même suspendre les relations diplomatiques entre les deux pays.


Qualifiée d'«absolument inacceptable» par le Kremlin, leur annonce a provoqué un coup de froid jeudi à l'ouverture des marchés financiers russes. Les indices boursiers ont chuté et la monnaie russe est tombée à son plus bas niveau en deux ans face au dollar, avant un retour au calme progressif en cours de journée.


Le ministre des Finances Anton Silouanov a assuré que le gouvernement et la banque centrale disposaient de «tous les instruments nécessaires pour garantir la stabilité financière», relevant que l'économie russe était devenue «ces dernières années bien plus résistante aux chocs extérieurs».


La Russie est soumise à des sanctions occidentales de plus en plus strictes depuis l'annexion de la Crimée en 2014, contribuant avec la chute des prix des hydrocarbures à provoquer deux ans de récession dont elle est sortie fin 2016.


Les États-Unis n'ont cessé de renforcer leur arsenal ces dernières années sur fond d'accusations d'ingérence russe dans les élections américaines, ce malgré les promesses de réconciliation de Donald Trump.


Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a qualifié les États-Unis de «partenaire imprévisible», mais ajouté «garder l'espoir de relations constructives avec Washington»: «Ces relations ne sont pas seulement dans les intérêts de nos deux peuples, mais aussi de la stabilité et de la sécurité dans le monde».


Il a «démenti encore une fois de la manière la plus catégorique toutes les déclarations sur une quelconque implication de la Russie» dans l'empoisonnement de Salisbury.


L'empoisonnement confirmé de l'ex-agent double et de sa fille par leur exposition au Novitchok, un agent neurotoxique mis au point par l'Union soviétique à la fin de la Guerre froide, avait été attribué par Londres au gouvernement russe, qui avait nié toute implication et demandé des preuves.


Londres a salué les nouvelles mesures américaines comme «un message univoque à la Russie que son attitude impétueuse ne restera pas sans réponse».


À Moscou, le ministère des Affaires étrangères a accusé Washington d'avoir «sciemment choisi le chemin de la confrontation dans les relations bilatérales qui sont déjà pratiquement réduites à zéro par ses propres efforts».


Dès mercredi, les marchés russes avaient chuté après des articles de la presse russe faisant état de la volonté de parlementaires américains de s'attaquer à la dette de l'État russe.


Selon l'expert russe Vladimir Vassiliev, chercheur à l'Institut des États-Unis et du Canada à Moscou, les sanctions américaines visant la Russie sont désormais «plus seulement un moyen de pression, mais d'ultimatum».


«Cela nous renvoie vers un état du monde qui avait peut être été oublié, mais qui avait un nom très simple dans les années 1950: la stratégie du bord de l'abîme», a-t-il affirmé à l'AFP.