Strophes pour se souvenir

La nuit du 15 février

Nos Patriotes, mais aussi les "Résistants étrangers de 1944"

Tribune libre

« Pleurez, oiseaux de février… au sinistre frisson des choses »…
(À sa manière, Émile Nelligan décrivait la dureté de notre hiver, la lassitude de nos corps secoués par le froid, l’omniprésence de la neige, le manque de soleil.)
Ces mots ont servi à une fondation de charité pour nous rappeler que le « petit mois » ne doit pas nous amener à nous refermer sur nous-mêmes mais au contraire à nous rappeler des février plus dramatiques, des février historiques.
Madame Micheline Lachance http://www.vigile.net/C-etait-il-y-a-175-ans vient de nous faire don de détails sordides de la nuit du 15 février 1839 que choisit le bras vengeur (Colborne) de l’Empire pour donner en pâture au noir gibet douze Patriotes qui avaient combattu l’armée, sans espoir de lendemains. Elle nous fait même réaliser que le film de Falardeau, « 15 février 1839 » nous épargne quelques épisodes de la barbarie de ce régime génocidaire.
Moins connu de nous, peut-être, un autre macabre événement de février, en France, nous est rapporté par le poète Louis Aragon, et même chanté par Léo Ferré :
En 1955, à l’occasion de l’inauguration d’une rue « Groupe Manouchian » à Paris, Louis Aragon écrit le poème « Strophes pour se souvenir », dans lequel il rend hommage à ces résistants « étrangers » arrêtés par les Allemands et fusillés le 21 février 1944. http://www.cndp.fr/poetes-en-resistance/poetes/louis-aragon/strophes-pour-se-souvenir/pistes-pedagogiques/
L’affiche de la honte
La deuxième strophe fait ouvertement référence à l’affiche rouge, placardée de manière massive par les Allemands au moment de l’exécution. C’est le passage le plus célèbre du poème, grâce notamment à Léo Ferré qui, lorsqu’il mettra le texte en musique, délaissera le titre original pour celui, plus évocateur, de « L’Affiche rouge ». Le talent d’Aragon est de décrire l’affiche tout en la discréditant à chaque vers.
L’affiche montre les visages des 10 résistants, dont Manouchian, en les qualifiant de « libérateurs criminels », allusion à tous leurs gestes de résistance d’une bravoure remarquable. Fusillés le 21 février 1944.
« Strophes pour se souvenir » mérite une re-lecture, voire une inspiration pour nos poètes modernes. Alexandre Belliard rappelle les noms des Patriotes exécutés, dans sa chanson Papineau. Et il peut appuyer davantage en se rappelant des vers comme :
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur coeur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant.
Louis Aragon, Le Roman Inachevé
http://www.bacdefrancais.net/strophes.php

Squared

Ouhgo (Hugues) St-Pierre196 articles

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Fier fils de bûcheron exploité. Professeur retraité d'université. Compétences en enseignement par groupes restreints, groupes de réflexion, solution de problèmes. Formation en Anglais (Ouest canadien), Espagnol (Qc, Mexique, Espagne, Cuba), Bénévolat latinos nouveaux arrivés. Exploration physique de la francophonie en Amérique : Fransaskois, Acadiens, Franco-Américains de N.-Angl., Cajuns Louisiane à BatonRouge. Échanges professoraux avec la France. Plusieurs décennies de vie de réflexion sur la lutte des peuples opprimés.





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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    13 février 2014



    Le pluss meilleur pays au monde.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    11 février 2014

    On n’aime pas les 10 février
    Une date, deux actes : Traité de Paris (1763) et Acte d'union (1840)
    http://actualites.sympatico.ca/curiosite/en-ce-jour-du/10-fevrier
    __._,_.___
    JCPomerleau

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    11 février 2014

    "L'armée du crime" Léo Ferré chante "L'affiche rouge".
    http://www.youtube.com/watch?v=6HLB_EVtJK4

  • Marcel Haché Répondre

    11 février 2014

    Se souvenir...
    Aliénor
    Le temps est arrivé, mon père, d’enterrer notre douleur.
    Étienne
    Oui, mais dans quelle terre ? Et une fois enterrée, s’en aller encore une fois ?
    Aliénor
    C’est ici même que nous allons enterrer notre ancienne vie et en réinventer une nouvelle. C’est ici que nous allons redonner un autre nom au monde. Pour que le monde continue d’être à nous. Nous allons habiter ce monde-là, le remplir de beauté, le refaire pour qu’il nous ressemble, à l’image de notre courage. Bâtir un autre monde sur celui qu’ils ont mis en flammes.
    Étienne
    Qu’est-ce qu’on a fait qui pourrait faire croire qu’on a été si courageux que ça ? Qu’est-ce qu’on a à montrer d’autre que notre blessure qui n’arrête pas de s’ouvrir ?
    Aliénor
    Il faut mettre le passé en terre, il faut l’écrire dans un livre et enterrer le livre. Et les morts liront ce livre-là et eux aussi, ils pourront enfin s’endormir.
    Aliénor, Herménégilde Chiasson.