Le Fédéral aboie...

La loi 21 au coeur de la tourmente

Des jeunes meurent sous les coups d’un tireur fou

Tribune libre



 


Avant même que la loi 21 sur la laïcité de l’État ait franchi l’étape de la Cour d’appel du Québec qui, en passant, n’a pas encore entendu l’affaire, le premier ministre Trudeau, qui a pourtant déclaré à plusieurs reprises qu’il laisserait les Québécois contester eux-mêmes l’interdiction imposée à certains fonctionnaires en position d’autorité d’afficher des signes religieux dans le cadre de leurs fonctions, argue maintenant qu’une fois que le débat arrive devant la Cour suprême du Canada, c’est par défaut un enjeu national.

Évidemment, la réaction de François Legaulr ne s’est pas fait attendre: «C’est un manque de respect flagrant de Justin Trudeau envers les Québécois», a-t-il lancé à sa sortie du Salon bleu. «Justin Trudeau vient dire: “Moi, je vais aller me mêler de ça et je vais aller contre la volonté d’une majorité de Québécois.”»

De son côté, le ministre David Lametti explique que «Nous avons des inquiétudes sur l’emploi préemptif de la “clause dérogatoire”. […] C’était [censé] être le dernier mot dans le dialogue entre les tribunaux et les assemblées législatives, pas le premier mot. Et quand c’est employé comme premier mot, ça coupe le débat politique». Or, selon le constitutionnaliste Patrick Taillon, les critiques du ministre Lametti contreviennent aussi au «compromis» établi en 1982 pour que la Charte canadienne des droits et libertés soit inscrite dans la Constitution. «Sans la [disposition de] dérogation, il n’y aurait jamais eu de charte», précise M. Taillon.

À mon sens, l’argumentaire de David Lametti vise à tuer l’emploi préemptif de la disposition de dérogation prévue à la Charte canadienne des droits et libertés. En termes clairs, si on consent à l’assertion de M.Lametti, on consent à tomber dans un gouvernement de juges, où il va falloir attendre des années avant de savoir si une loi dûment votée par un Parlement a le droit d’exister et d’être en vigueur.

Enfin, il m’apparaît fondamental que le politique soit scindé du judiciaire. Lorsque les élus de l’Assemblée nationale votent une loi, après tout le processus de consultation auquel elle a été soumise en commissions parlementaires et à l’Assemblée nationale, la loi est en vigueur dès le lendemain matin...parce qu’on est en démocratie.

Des jeunes meurent sous les coups d’un tireur fou

Je demeure toujours estomaqué quand j’apprends qu’un tireur fou a abattu froidement des enfants vulnérables dont le seul «crime» est de s’être trouvés à l’endroit choisi par le tueur au moment où il a décidé de poser son geste ignoble. Dans la foulée de la terrible attaque de l'école Sandy Hook, à Newtown au Connecticut, survenue il y a près d'une décennie, en 2012, la tuerie de l'école primaire Robb à Uvalde au Texas, à environ 140 kilomètres à l'ouest de San Antonio, a causé la mort de 18 enfants au dernier décompte.

Le massacre de jeunes enfants est un autre moment horrible pour un pays marqué par une série presque incessante de massacres dans les écoles. Et les perspectives d'une réforme de la réglementation nationale sur les armes à feu, encore aujourd’hui, 10 ans plus tard, n’ont pas bronché d’un iota depuis l'attaque à l'école Sandy Hook.

Et pourtant, l'année dernière, la Chambre a adopté deux projets de loi visant à étendre les contrôles d'antécédents pour les achats d'armes à feu. L'un de ces projets de loi aurait comblé une faille dans les ventes privées et en ligne. L'autre aurait prolongé la période de vérification des antécédents. Les deux projets sont restés bloqués au Sénat .

Les défenseurs des armes à feu évoquent continuellement le même argument: le problème n’est pas l’arme à feu mais celui qui se trouve derrière elle. Mais comment un détraqué peut-il se procurer une arme à feu sans coup férir, la pointer sur des enfants et perpétrer froidement son crime?

À l’époque, le président Obama s’est battu bec et ongle contre la possession abusive des armes à feu. Il a perdu son combat. La possession d’armes à feu semblent ancrée dans l’ADN des Américains, et tant et aussi longtemps que le vent ne changera pas de direction, nous assisterons malheureusement à des massacres d’enfants qui n’atteindront jamais l’âge de posséder une arme à feu...comme leur père. Triste et macabre scénario!


Henri Marineau, Québec


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Henri Marineau2016 articles

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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com





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1 commentaire

  • François Champoux Répondre

    27 mai 2022


    Bonjour M. Marineau,


    Manger et vivre décemment est une nécessité première avant la gloire de Dieu. Et celles et ceux qui ont des yeux pour voir et une intelligence pour tenter de comprendre, peuvent découvrir bien des causes à la violence et l’incivilité : elle n’est pas que religieuse et pas seulement islamique. Nous avons aussi nos gangs de rue, notre violence gratuite dans nos quartiers : ce sont des Québécois de souche, des "nous" comme disait Mme Marois. L’animal humain est de cette race de monde : violent, social, communautaire, imbu de lui-même, aimant, hypocrite, inconscient, etc., vraiment dangereux de vivre avec des humains. 


    Socrate a été condamné à prendre la ciguë tellement l’autorité le craignait; moi, je ne crains plus aucune autorité sauf celle qui tue. Les lâches tuent. Voyez Poutine, voyez Hitler, voyez tous les tyrans que cette planète a portés. On a eu notre Lucien Bouchard qui a banni Yves Michaud... Je ne suis ni tyran ni tueur, et pourtant, je suis un dangereux humain que d’autres humains ont exclu de leur groupe : ils ont eu peur. 

     

    La loi 21, dite « loi de la laïcité du Québec » est une loi gruyère (pleine de troues), électoraliste du parti politique de François Legault. Elle permet aux municipalités du Québec l’affichage des signes religieux (catholique surtout) sur les murs des salles du conseil municipal, mais elle interdit sous menace d’exclusion du corps professoral, les personnes qui auraient sur leur corps un signe religieux ostentatoire (surtout le voile islamique des femmes). Les murs des salles de conseil municipal n’ont pas des droits et libertés; ce sont les personnes qui ont des droits et libertés.  

    La loi 21 dite de la laïcité du Québec n’interdit pas des dons aux religions (catholique surtout) par ces municipalités à même les impôts fonciers soutirés aux citoyens de toute allégeance (exemple : Trois-Rivières; 360 000.$/année pendant 20 ans à la basilique du Cap : tourisme religieux). Elle n’interdit pas pour aucune religion et secte leur congé d’impôt foncier sur leur immeuble : tout demeure libre d’impôt comme toujours : aucune taxe à payer par les religions et sectes sur toutes les églises, mosquée, etc.


    La loi 21 n’interdit rien aux institutions d’enseignement privées; seules les écoles publiques sont sous le joug d’interdit de signes religieux ostentatoires. Si les signes religieux ostentatoires endoctrinent par leur seul fait d’être visibles, tous les signes en tout temps (privés ou publics) endoctrinent. Ce qui ne peut pas être vrai : c’est le prosélytisme qui endoctrine comme nous l’avons trop vécu au Québec pendant des générations et des générations par cette religion catholique pour les Canadiens français, et le protestantisme pour les anglophones. Même les cloches qui sonnent l'angelus seraient endoctrinales selon certains! La possible laïcité de l'État par la loi 21 devient risible.



    Pour moi, l’État du Québec est laïc depuis 1975 par sa charte des droits et libertés de la personne. C’est là, le document fondateur de notre État québécois laïc. Cette charte a suivi de loin la Déclaration des droits de l’Homme : vaut mieux être en retard que de ne pas arriver. Mais nous étions en avance sur l'État du Canada et sa charte. Nous sommes du concert des nations où il faut respecter tout un chacun. Nous ne sommes pas racistes ni xénophobes, mais dans les faits, il demeure douteux (le doute systémique cartésien) que ces droits et libertés civils existent pour vrai : en vérité, ils demeurent à construire, à bâtir quotidiennement comme le font la majorité des citoyens de toutes allégeances. Sinon, si le respect de l’autre dans la vraie vie du quotidien ne se construit pas, charte ou non, loi 21 ou non, rien n’existera de fait : ni laïcité, et surtout, ni paix. Dans la réalité de tous les jours de vie, de nos vies respectives, la charte ne sera qu’un autre gros mensonge d’un enfant incapable d’accéder à une maturité : son fruit n’atteindra jamais sa maturité ni son suc. 

     

    En terminant, permettez-moi cette citation d’Henri Laborit :


    Partons du principe que notre monde ne sera jamais parfait; « Ce n’est pas être pessimiste, mais au contraire optimiste, de dire qu’elle n’existera jamais (la société idéale). (…) Nous ne pouvons progresser que pas à pas, étape par étape, en tâtonnant. Cela veut dire que nous ne pouvons imaginer qu’une société faite à notre taille, pour ce jour, de cette année, de ce siècle. Nous ne savons pas ce que sera la société idéale de demain. »  seule, l’espèce humaine est capable d’imaginer des moyens de plus en plus complexes et efficaces pour assurer la réalisation de son activité prédatrice. »


    « Cette agressivité fondamentale est si bien ritualisée et institutionnalisée qu’elle … a même pris l’aspect du bon droit, de la justice et de l’absence d’agressivité. À tel point qu’elle se trouve à l’origine de professions de foi humanistes, de pitié, de charité et de mansuétude, tout en stigmatisant les explosions brutales de violence de la part des dominés, contre lesquels on organise des guerres «  justes » pour l’établissement d’un nouvel ordre international, celui qu’imposent les nations dominantes et les mieux armées. »


    « Le discours législatif n’est jamais que l’alibi logique d’une pulsion dominatrice inconsciente, établissant les règles de la structure hiérarchique d’une société. »


    Laborit, H. (1994). La légende des comportements. Flamarion, pages 273 à 300.



    L'évolution des mentalités prend des siècles : depuis Copernic, Galilée, la Révolution des Lumières, etc., nous ne sommes qu'en évolution.