À l’insu de tous, la troisième guerre mondiale fait rage depuis près de trois décennies, depuis l’effondrement du mur de Berlin. Elle a été précédé par la Guerre froide, qui a pris fin lorsque Mikhaïl Gorbatchev a capitulé face à l’Ouest, provoquant dans la confusion la dissolution du Pacte de Varsovie. En dépit de cette capitulation, l’Occident n’a jamais abandonné son plan de détruire le Pacte de Varsovie avec certaines parties de l’ex-URSS, puis de conquérir et démembrer la Russie elle-même. En l’absence de toute menace militaire à l’Est, l’OTAN, avec son jumeau parasite, l’Union Européenne, s’est implacablement étendue vers l’Est, engloutissant pays après pays. Elle a maintenant conquis l’ensemble du Pacte de Varsovie, plus la Moldavie et les trois minuscules États baltes, et elle se lance maintenant vers d’autres espaces de l’ex-URSS : l’Ukraine, la Géorgie et l’Arménie. La raison pour laquelle presque personne en Occident ne se rend compte que la troisième guerre mondiale a eu lieu est que l’Occident a subi un effondrement mental aussi profond que l’effondrement physique de l’URSS. La Russie s’est remise de son effondrement ; l’Occident ne se remettra probablement jamais du sien.
La prétention de l’Occident de lutter contre la Russie est un pur fantasme. La posture défensive de la Russie est telle qu’aucune stratégie militaire contre elle n’est planifiable. La doctrine militaire russe stipule qu’il n’y aura plus de guerres sur le sol russe : si elle est envahie, elle portera immédiatement la bataille chez l’ennemi en utilisant des armes de précision à longue portée, y compris à portée intercontinentale. Elle stipule également que la Russie répondra à toute menace existentielle par l’utilisation d’armes nucléaires s’il le faut. De ce fait, le Pentagone, avec l’OTAN en remorque, ne peut même plus rêver d’attaquer la Russie. Ce rêve était vivant à un moment donné, quand les États-Unis ont cru possible d’éliminer la capacité de dissuasion nucléaire de la Russie en utilisant une première frappe nucléaire ; mais dans l’entretemps la Russie s’est réarmée avec des armes plus avancées que les États-Unis. Désormais, le rêve est mort.
Pour le remplacer et justifier la poursuite de la préparation militaire, on prétend « contrer une agression russe » qui n’existe pas. La Russie n’est simplement pas intéressée à envahir qui que ce soit ; elle possède toutes les terres et toutes les ressources naturelles dont elle pourrait avoir besoin. Après s’être réarmée et avoir fait ses preuves en Syrie, la Russie réduit maintenant ses dépenses de défense en faveur de programmes nationaux qui profiteront à sa population. Comparez cela aux dépenses de défense aux États-Unis et dans le reste de l’OTAN, qui établissent de nouveaux records. Clairement, l’Occident ne combat pas la Russie, il se bat contre lui-même et, par conséquent et en toute logique, il va à la fois perdre et gagner d’un même élan. Avec leurs dépenses militaires – de loin les plus importantes et le plus insensées du monde – les États-Unis se sont engagés dans la voie de la désagrégation financière, comme l’URSS auparavant.
Tout en prétendant combattre la Russie, l’Occident a attaqué et détruit divers pays dans le monde entier – toujours avec un grand succès mis à part quelques exceptions. L’Afghanistan, l’Irak et la Libye sont maintenant en ruines. Ce succès est tempéré dans les cas où la Russie est tangentiellement impliquée. Le résultat inévitable est alors un État fragmenté et à semi-défunt : l’Ukraine moins le Donbass et la Crimée, la Géorgie moins l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud et la province d’Idlib (réserve spéciale pour Gremlins) conservée à un prix colossal moins le reste de la Syrie. Partout où les Occidentaux empiètent sur les intérêts russes, ouvertement et violemment ou par des coups fourrés, la Russie impose facilement des lignes rouges que l’Occident n’ose pas franchir.
La seule sorte de guerre “chaude” entre l’Occident et la Russie (en réalité seulement tiède) est la “guerre des sanctions” qui satisfait particulièrement la Russie. Ces sanctions ont été très utiles pour stimuler le remplacement des importations, pour donner un élan nécessaire à la dédollarisation et pour développer des alternatives à la finance occidentale, tandis que les contre sanctions contre les exportations agricoles de l’UE ont stimulé l’agriculture russe. Depuis que les sanctions ont été imposées sur l’insistance des États-Unis et qu’elles se sont avérées nuire fortement aux pays de l’UE, une certaine désunion règne en Occident. En vérité, la Russie ne pouvait rêver meilleur ennemi : impressionnant sur le papier et toujours attentif à marquer contre son camp.
Mais toutes les bonnes choses doivent finalement prendre fin, et même cette remarquable troisième guerre mondiale ne peut pas durer éternellement. La prise de conscience de son inutilité et de sa contre-productivité s’impose lentement, entraînant diverses initiatives de trahison au sein du camp occidental, avec différents États récemment conquis par l’Occident qui commencent à se retourner vers Moscou. Le président moldave, Dodon, a déclaré que son adhésion à l’UE ne mettrait pas en péril ses bonnes relations avec la Russie. La révolution colorée des manuels scolaires en Arménie a conduit le nouveau président soi-disant pro-occidental à se précipiter pour rassurer tout le monde sur le fait que l’Arménie resterait un allié fidèle de la Russie, nonobstant les accords de coopération de l’UE.
Pendant ce temps, à travers l’océan Atlantique, les divers plans financiers frauduleux qui ont permis aux États-Unis, avec l’OTAN en remorque, de vivoter dans l’inconscience, montrent des signes d’effondrement. Les barrières douanières appliquées aux pays avec lesquels les États-Unis accusent des déficits commerciaux vont obliger ces pays à se tourner vers des producteurs nationaux. Il y a bien entendu une raison pour laquelle les USA importaient ces produits : les USA sont un producteur relativement coûteux. Faire redémarrer la production au niveau national va donc entraîner de l’inflation. Comme une grande partie de la dette américaine est indexée sur l’inflation, les paiements d’intérêts vont rapidement engloutir le budget fédéral dont dépendent les dépenses d’armement. La seule solution est que les États-Unis renforcent encore plus leur colossale montagne d’endettement … Mais alors la dédollarisation va progresser à travers le monde et la demande pour la dette américaine sera en baisse.
Ce manque à gagner imminent dans les dépenses de défense peut-il être compensé ailleurs ? Certes non. La France et l’Allemagne – les pays qui constituent une part du le noyau de l’Imperium occidental – rejettent les demandes américaines d’augmentation des dépenses de défense, réalisant, malgré leur propre rhétorique, qu’il s’agit d’un gaspillage d’argent pur et simple. Il apparaît progressivement que les nouveaux systèmes d’armements défensifs et offensifs de la Russie ont rendu la plupart des armements occidentaux obsolètes et empêcheront les forces occidentales d’opérer dans les zones où leurs armements sont déployées. Par conséquent, ces systèmes d’arme russes connaissent un grand succès à l’exportation. La Turquie, le deuxième membre de l’OTAN par l’importance numérique de ses forces, a l’intention d’acquérir plusieurs bataillons du système de défense antiaérienne S-400, malgré les vives protestations américaines. L’Arabie saoudite, un allié américain convaincu, cherche à faire de même, ayant réalisé que les missiles Patriot de Raytheon qu’elle avait acquis sont pires qu’inutiles. En investissant plus d’argent dans les poches de Raytheon, Lockheed Martin, Boeing, BAE System ou d’autres entreprises de défense américaines (et britannique pour BAE), certains riches deviendront encore plus riches, mais cela ne rendra pas leurs produits plus abordables ou plus efficaces.
Pendant ce temps, l’OTAN continue d’avancer – une fuite en avant vers nulle part. L’OTAN est un mastodonte bureaucratique avec dans ses poches une poignée de soldats qui n’ont pas mené à bien une seule mission depuis des décennies. La bureaucratie se concentre sur la construction de l’Empire, toujours à la recherche de plus de points sur la carte à colorier, dans le but… d’ajouter à la taille de sa bureaucratie, bien sûr ! Mais il n’y a nulle part vers où l’OTAN puisse se développer une fois que les minuscules miettes du Monténégro et de la Macédoine auront été englouties. Ni l’Ukraine ni la Géorgie ne sont digestes puisque ces deux pays ne contrôlent même plus leurs propres territoires. En désespoir de cause, les bureaucrates de l’OTAN ont décidé de s’étendre… en Colombie, faisant de cette nation sud-américaine un “partenaire de l’OTAN”. Peut-être un changement de nom est-il envisagé en laissant tomber le “N” ?
Ou peut-être est-il temps d’arrêter toute cette opération ? Mais comment faire ? La réponse est évidente : la troisième guerre mondiale doit se terminer par une victoire retentissante de l’Occident sur lui-même. La manière exacte de procéder est une question de communication mais comme en Occident la plupart des médias sont aux mains de quelques conglomérats intimement en accord avec la CIA, l’écriture du scénario ne devrait poser aucun problème. Notez bien qu’il n’y a pas la moindre nécessité que la nouvelle réalité ait quoi que ce soit de commun avec la réalité réelle. Cela peut être une alarme éculée comme “l’agression russe” (selon laquelle la Russie est prête à envahir la Lituanie ou l’Estonie – une suggestion qui fait mourir de rire les Russes) ou l’idée que la Russie “a envahi” la Crimée ou l’Ukraine orientale. Les médias occidentaux mentent tous les jours, que ce soit sur les attaques chimiques syriennes ou sur les empoisonnements russes “hautement probables” au Novitchok en Angleterre. Les populations de l’Ouest sont déjà habituées à être trompées, il n’y aura donc pas grand-chose de changé.
Mais puisque l’Occident a combattu contre lui-même lors de cette troisième guerre mondiale, sa victoire sera aussi sa défaite. En effet, non seulement il est en train de perdre, mais il est également envahi – par des foules de migrants des différents pays qu’il a détruits, les ayant utilisés comme ennemis de substitution dans sa bataille fictive contre la Russie. Donnez-lui quelques décennies de plus, et à ce rythme, l’Occident ne sera plus, sa population à reproduction lente étant remplacée par les nouveaux venus beaucoup plus féconds. Les pays qui le composent se dissoudront dans une mer de migrants et ressembleront aux régions les plus peuplées du Tiers Monde. Cela rendra sans doute les Russes un peu tristes ; après tout, ils n’auraient pu avoir un meilleur ennemi.