L'Université Concordia dans le collimateur de Québec

Le ministère s'interroge sur les départs de deux recteurs et de cinq hauts dirigeants depuis deux ans

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Kathleen Lévesque - Québec questionne l'Université Concordia sur ce qui semble être un problème de portes tournantes qui a entraîné, depuis deux ans, les départs successifs de deux recteurs et de nombreux cadres, administrateurs et professeurs. Le dossier a coûté plus de deux millions de dollars en fonds publics.
Comme l'a confirmé hier au Devoir le cabinet de la ministre de l'Éducation, l'entourage de Line Beauchamp a contacté cette semaine la haute direction de l'Université Concordia. Bien qu'il s'agisse d'un dossier de «régie interne» à l'université, la ministre s'interroge sur la situation réelle au sein de l'établissement. C'est d'autant plus vrai que d'importantes indemnités de départ ont été versées. Pour les deux recteurs, la dépense de fonds publics s'élève à plus de deux millions de dollars, sans compter les primes payées aux autres personnes visées.
L'intervention ministérielle vient donner une nouvelle coloration au dossier. À Concordia, on tentait toutefois hier de minimiser la situation, et ce, bien qu'en coulisse, certaines personnes proches de la tourmente parlaient de décisions financières douteuses au sein de l'université ainsi que de tiraillements sur la gouvernance de l'établissement. «Le climat est très malsain», a précisé une source qui a requis l'anonymat par crainte de représailles.
La porte-parole de l'Université Concordia, Christine Mota, a cherché à se montrer rassurante. Selon elle, la ministre voulait des clarifications sur les motifs du départ de la rectrice Judith Woodsworth. «Il n'y a pas d'inquiétude, mais la ministre va regarder de près ce qui va se dérouler dans les prochains jours et les prochaines semaines. Et s'il faut parler avec la ministre, on va le faire certainement», a-t-elle ajouté.
Le 22 décembre dernier, le conseil d'administration de Concordia annonçait le départ pour «des raisons personnelles» de la rectrice Judith Woodsworth. Cette dernière a affirmé plus tôt cette semaine, sur les ondes de CTV, qu'il s'agissait plutôt d'un congédiement. Mme Woodsworth a expliqué que certains membres du conseil d'administration avaient perdu confiance en elle. Aucune précision n'a été apportée. Mme Woodsworth n'a pu être jointe hier.
Le président du conseil d'administration, Peter Kruyt, vice-président de Power Corporation, a souligné dans un communiqué de presse, diffusé en décembre, le «leadership» et les «réalisations» ainsi que l'«engagement» de la rectrice. M. Kruyt a refusé hier la demande d'entrevue du Devoir.
Mme Woodsworth a reçu une indemnité de départ de 703 000 $, soit l'équivalent de deux années de salaire, comme le prévoit son contrat. Son prédécesseur, Claude Lajeunesse, avait également quitté ses fonctions en 2007 avec une indemnité, cette fois de 1,3 million. M. Kruyt avait alors publiquement salué l'engagement de M. Lajeunesse à l'égard de la communauté universitaire. Hier, la porte-parole de Concordia a toutefois précisé qu'il y avait mésentente entre les parties, ce qui avait forcé M. Lajeunesse à quitter l'établissement.
En plus de ces départs dans un contexte nébuleux, de hauts dirigeants (au moins cinq personnes), des administrateurs et des professeurs ont quitté leurs fonctions depuis deux ans. L'université précise qu'il s'agit, pour la plupart d'entre eux, de départs à la retraite ou d'une réorientation de carrière. «Dans une université, ce n'est vraiment pas exceptionnel. Il y a toujours beaucoup de mouvements», a assuré Christine Mota.
Selon les informations recueillies par Le Devoir, certaines démissions n'étaient pas volontaires.
Dans l'immédiat, c'est le secrétaire général et vice-président des affaires externes de l'université, Bram Freedman, qui a pris la relève de Mme Woodsworth. M. Freedman siège également au conseil d'administration de la Fondation de Concordia, entièrement dédiée au développement de l'université, de la recherche et à l'accès aux études supérieures.
Au cours des prochaines semaines, Concordia devra confier le rectorat de façon intérimaire à une personne. En parallèle, le conseil d'administration enclenchera le processus de recrutement d'un nouveau recteur permanent. Ces démarches pourraient s'étendre sur plus d'une année, a expliqué Mme Mota.
L'Université Concordia est en situation déficitaire depuis quelques années. Pour l'année 2008-2009 (les derniers résultats disponibles), le déficit accumulé s'élève à 9 millions de dollars. Le rapport annuel pour 2009-2010 est présentement en préparation. Selon Mme Mota, il devrait démontrer que Concordia est parmi les universités avec le plus bas déficit financier.
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Avec la collaboration de Lisa-Marie Gervais


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