L’élection de Jacques Sapir à l’Académie des Sciences de Russie : un bel hommage à la France et à la Russie

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Reconnaissance internationale pour Jacques Sapir, le théoricien du souverainisme

Avec l'annonce ce vendredi 28 octobre 2016 par l'Académie des Sciences de la Russie de l'élection en son sein de l'économiste Français Jacques Sapir à titre de membre étranger, c'est une nouvelle consécration qui s'ajoute à la chaîne des illustres prédécesseurs de notre pays précédemment reconnus par cette illustre institution.
La liste est en effet prestigieuse de ces remarquables scientifiques accueillis par l'Académie des Sciences de Russie qui vont de l'économiste Maurice Allais aux physiciens, mathématiciens, chimistes, historiens et géopoliticiens tels Henri Cartan, Georges Charpak, Alain Connes, Jean-Marie Lehn, Jean Lerays, Claude Lorius, Gérard Mourou, Hélène Carrère d'Encausse, Thierry de Montbrial.
Avant que d'inviter nos lecteurs à lire le beau texte que vient de publier M. Jacques Sapir, qu'il nous soit permis ici de rendre hommage à l'artisan principal de cette prestigieuse distinction, le non moins remarquable académicien Victor V. Ivanter (IPEN-ASR)
« L’Académie des Sciences de Russie vient d’annoncer, ce vendredi 28 octobre, mon élection en son sein, à titre de « membre étranger ». Cette annonce est pour moi un immense honneur et la source d’une profonde fierté. L’Académie des Sciences de Russie est une assemblée extrêmement prestigieuse, héritière de l’Académie Impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg, à laquelle ont participé de très grands scientifiques – tant russes qu’étrangers – depuis sa création au XVIIIème siècle. Un seul autre économiste français, Maurice Allais, avait été distingué de cette manière et je rejoins un petit groupe composé essentiellement de physiciens, mathématiciens et chimistes comme Henri Cartan, Georges Charpak, Alain Connes, Jean-Marie Lehn, Jean Leray, Claude Lorius, et Gérard Mourou, mais aussi d’historiens comme Hélène Carrère d’Encausse , Maurice Druon et de spécialistes en relations internationales comme Thierry de Montbrial.
Je vois dans cette élection la reconnaissance des liens étroits qui unissent, et ce depuis fort longtemps, les milieux scientifiques russes et les milieux scientifiques français ; des liens que les conflits politiques comme les campagnes récurrentes de calomnie et de dénigrement n’ont jamais pu altérer. Je l’entends comme la reconnaissance des travaux que j’ai menés depuis la fin des années 1970 à la fois sur l’URSS et la Russie, mais aussi sur la théorie économique, travaux que je n’aurai jamais pu conduire sans l’amour et le soutien de mon épouse Béatrice. Je comprends cette élection comme la manifestation d’une confiance que me font les économistes russes.
Je remercie mes collègues et amis, les académiciens russes Viktor V. Ivanter et Alexandre D. Nekipelov, qui ont porté ma candidature, et qui l’ont aidée à franchir les différents obstacles jusqu’au vote final. Je les connais depuis fort longtemps, depuis 1990 pour le premier et depuis 1993 pour le second. La confiance qu’ils m’ont accordée depuis le début se manifeste par le travail en commun que nous avons pu mener ensemble, que ce soit au sein du Séminaire Franco-Russe sur les problèmes monétaires et financiers du développement de la Russie, séminaire qui s’est constitué avec l’Institut de Prévision de l’Economie Nationale (IPEN-ASR) et qui fonctionne régulièrement depuis 1991, ou dans le cadre de la Moskovskaya Shkola Ekonomiki (Ecole d’Economie de Moscou) de l’Université de Moscou (MSE-MGU). Elle m’honore profondément.
Ce travail a largement contribué à ma compréhension des problèmes économiques de la Russie et de la transition, mais aussi à la formulation précise de mes réflexions théoriques sur la critique de l’équilibre général et sur l’origine des institutions. Il a aussi permis le développement de recherches extrêmement fructueuses qui se sont menées dans le cadre du Centre d’Etudes des Modes d’Industrialisation de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (CEMI-EHESS) et du groupe Institution et Régulation des Systèmes Economiques post-Socialistes de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (IRSES-FMSH). Ces recherches ont donné lieu à de multiples travaux ; elles ont aussi permis de former de nombreux jeunes chercheurs, tant français que russes. J’aime à penser que mon élection rejaillit aussi sur ces deux institutions qui ont été et qui sont toujours à la pointe de la coopération scientifique entre la France et la Russie (et avant 1992 l’Union soviétique).J’ai une pensée pour l’ensemble des administrateurs de la FMSH, Clémens Heller, Maurice Aymard, Alain d’Iribarne et Michel Wiewiorka, qui m’ont donné les moyens matériels pour la poursuite de mes travaux et dont l’engagement dans la coopération scientifique avec la Russie ne s’est jamais démenti, ainsi que pour les différents présidents de l’EHESS.
Ce travail et cette coopération vont continuer à s’approfondir en particulier pour la compréhension des implications sur l’économie des territoires des développements macroéconomiques, mais aussi pour la compréhension de l’apport des nouvelles technologies de l’information à l’organisation de ces territoires. Aujourd’hui, plus que jamais, il est important de jeter des ponts entre nos deux pays, de mieux comprendre les problèmes auxquels nous avons et nous aurons à faire face. A cet égard, cette élection à l’Académie des Sciences de Russie est un profond encouragement à la poursuite des travaux entrepris.
Cette élection distingue donc le travail qui a été fait dans le cadre du Centre d’Etudes des Modes d’Industrialisation de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Ce centre, créé par le regretté Charles Bettelheim au début des années 1960, a joué un rôle pionnier dans l’étude de l’économie soviétique (et des autres économies socialistes comme celles de la Chine et de Cuba), puis l’étude de l’économie russe. C’est ce Centre que j’avais rejoint à la suite de mes études à l’IEPP en octobre 1976, tout d’abord comme étudiant puis comme chercheur.
Le travail de recherches est toujours un travail collectif. Il est tributaire de l’esprit et du climat intellectuel qui se créé et se maintient dans des centres de recherches par des débats et des discussions. C’est cette esprit, cette ambiance intellectuelle, qui permet le développement de nos recherches personnelles. Sur ce point, j’ai été particulièrement favorisé par l’ambiance intellectuelle féconde et animée qui a régné (et qui règne toujours) au sein du CEMI. J’associe à la distinction qui m’est faite mes collègues et amis du CEMI avec qui j’ai travaillé depuis de longues années, mais aussi mes étudiants, qui ont eu à supporter mon caractère, mes exigences et mes impatiences, et à qui, même s’ils ne le savent pas, je dois beaucoup. J’ai une pensée pour le fondateur du Centre et mon premier « maître », Charles Bettelheim, à qui je dois tant, qui guida mes premiers pas hésitants sur le chemin de l’économie soviétique, et qui – plus que moi et mieux que moi – aurait mérité cette distinction.
C’est aussi avec une certaine émotion que j’accueille la nouvelle de mon élection. Mes origines familiales ont fait de la Russie un pays qui m’est proche et qui m’est cher. Je sais que ma mère et mon père se seraient naturellement réjouis de cette élection et de la reconnaissance de mes travaux qu’elle traduit, mais surtout que ma grand-mère paternelle aurait été immensément fière de l’honneur qui m’est fait. »
Source :
[https://russeurope.hypotheses.org/5379->« L’Académie des Sciences de Russie vient d’annoncer, ce vendredi 28 octobre, mon élection en son sein, à titre de « membre étranger ». Cette annonce est pour moi un immense honneur et la source d’une profonde fierté. L’Académie des Sciences de Russie est une assemblée extrêmement prestigieuse, héritière de l’Académie Impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg, à laquelle ont participé de très grands scientifiques – tant russes qu’étrangers – depuis sa création au XVIIIème siècle. Un seul autre économiste français, Maurice Allais, avait été distingué de cette manière et je rejoins un petit groupe composé essentiellement de physiciens, mathématiciens et chimistes comme Henri Cartan, Georges Charpak, Alain Connes, Jean-Marie Lehn, Jean Leray, Claude Lorius, et Gérard Mourou, mais aussi d’historiens comme Hélène Carrère d’Encausse , Maurice Druon et de spécialistes en relations internationales comme Thierry de Montbrial. Je vois dans cette élection la reconnaissance des liens étroits qui unissent, et ce depuis fort longtemps, les milieux scientifiques russes et les milieux scientifiques français ; des liens que les conflits politiques comme les campagnes récurrentes de calomnie et de dénigrement n’ont jamais pu altérer. Je l’entends comme la reconnaissance des travaux que j’ai menés depuis la fin des années 1970 à la fois sur l’URSS et la Russie, mais aussi sur la théorie économique, travaux que je n’aurai jamais pu conduire sans l’amour et le soutien de mon épouse Béatrice. Je comprends cette élection comme la manifestation d’une confiance que me font les économistes russes. Je remercie mes collègues et amis, les académiciens russes Viktor V. Ivanter et Alexandre D. Nekipelov, qui ont porté ma candidature, et qui l’ont aidée à franchir les différents obstacles jusqu’au vote final. Je les connais depuis fort longtemps, depuis 1990 pour le premier et depuis 1993 pour le second. La confiance qu’ils m’ont accordée depuis le début se manifeste par le travail en commun que nous avons pu mener ensemble, que ce soit au sein du Séminaire Franco-Russe sur les problèmes monétaires et financiers du développement de la Russie, séminaire qui s’est constitué avec l’Institut de Prévision de l’Economie Nationale (IPEN-ASR) et qui fonctionne régulièrement depuis 1991, ou dans le cadre de la Moskovskaya Shkola Ekonomiki (Ecole d’Economie de Moscou) de l’Université de Moscou (MSE-MGU). Elle m’honore profondément. Ce travail a largement contribué à ma compréhension des problèmes économiques de la Russie et de la transition, mais aussi à la formulation précise de mes réflexions théoriques sur la critique de l’équilibre général et sur l’origine des institutions. Il a aussi permis le développement de recherches extrêmement fructueuses qui se sont menées dans le cadre du Centre d’Etudes des Modes d’Industrialisation de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (CEMI-EHESS) et du groupe Institution et Régulation des Systèmes Economiques post-Socialistes de la Fondation Maison des Sciences de l’Homme (IRSES-FMSH). Ces recherches ont donné lieu à de multiples travaux ; elles ont aussi permis de former de nombreux jeunes chercheurs, tant français que russes. J’aime à penser que mon élection rejaillit aussi sur ces deux institutions qui ont été et qui sont toujours à la pointe de la coopération scientifique entre la France et la Russie (et avant 1992 l’Union soviétique).J’ai une pensée pour l’ensemble des administrateurs de la FMSH, Clémens Heller, Maurice Aymard, Alain d’Iribarne et Michel Wiewiorka, qui m’ont donné les moyens matériels pour la poursuite de mes travaux et dont l’engagement dans la coopération scientifique avec la Russie ne s’est jamais démenti, ainsi que pour les différents présidents de l’EHESS. Ce travail et cette coopération vont continuer à s’approfondir en particulier pour la compréhension des implications sur l’économie des territoires des développements macroéconomiques, mais aussi pour la compréhension de l’apport des nouvelles technologies de l’information à l’organisation de ces territoires. Aujourd’hui, plus que jamais, il est important de jeter des ponts entre nos deux pays, de mieux comprendre les problèmes auxquels nous avons et nous aurons à faire face. A cet égard, cette élection à l’Académie des Sciences de Russie est un profond encouragement à la poursuite des travaux entrepris. Cette élection distingue donc le travail qui a été fait dans le cadre du Centre d’Etudes des Modes d’Industrialisation de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Ce centre, créé par le regretté Charles Bettelheim au début des années 1960, a joué un rôle pionnier dans l’étude de l’économie soviétique (et des autres économies socialistes comme celles de la Chine et de Cuba), puis l’étude de l’économie russe. C’est ce Centre que j’avais rejoint à la suite de mes études à l’IEPP en octobre 1976, tout d’abord comme étudiant puis comme chercheur. Le travail de recherches est toujours un travail collectif. Il est tributaire de l’esprit et du climat intellectuel qui se créé et se maintient dans des centres de recherches par des débats et des discussions. C’est cette esprit, cette ambiance intellectuelle, qui permet le développement de nos recherches personnelles. Sur ce point, j’ai été particulièrement favorisé par l’ambiance intellectuelle féconde et animée qui a régné (et qui règne toujours) au sein du CEMI. J’associe à la distinction qui m’est faite mes collègues et amis du CEMI avec qui j’ai travaillé depuis de longues années, mais aussi mes étudiants, qui ont eu à supporter mon caractère, mes exigences et mes impatiences, et à qui, même s’ils ne le savent pas, je dois beaucoup. J’ai une pensée pour le fondateur du Centre et mon premier « maître », Charles Bettelheim, à qui je dois tant, qui guida mes premiers pas hésitants sur le chemin de l’économie soviétique, et qui – plus que moi et mieux que moi – aurait mérité cette distinction. C’est aussi avec une certaine émotion que j’accueille la nouvelle de mon élection. Mes origines familiales ont fait de la Russie un pays qui m’est proche et qui m’est cher. Je sais que ma mère et mon père se seraient naturellement réjouis de cette élection et de la reconnaissance de mes travaux qu’elle traduit, mais surtout que ma grand-mère paternelle aurait été immensément fière de l’honneur qui m’est fait. » Source : https://russeurope.hypotheses.org/5379]


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