La tentative du président Mahmoud Abbas de faire reconnaître la Palestine comme État membre à part entière de l'ONU est vouée à l'échec. Sans l'appui d'au moins neuf des quinze membres du Conseil de sécurité, dont les États-Unis qui sont prêts à exercer leur droit de veto pour bloquer la demande, l'Autorité palestinienne devra se satisfaire d'un statut d'État observateur, voire de rien du tout. Mais même symbolique, la démarche aura eu le mérite de ramener le conflit israélo-palestinien sur le devant de la scène diplomatique mondiale.
Malgré les tentatives répétées du gouvernement Obama pour une reprise du dialogue entre Israël et l'Autorité palestinienne, l'impasse est totale. D'un côté, Israël se dit prêt à reprendre les pourparlers mais refuse de décréter un moratoire sur le développement des colonies juives; de l'autre, l'Autorité palestinienne refuse de reconnaître d'entrée de jeu qu'Israël est un «État juif» par opposition à un État ouvert, ce qui l'obligerait à laisser tomber sa revendication pour le retour des réfugiés chassés lors de la guerre des Six Jours, en 1967.
Dans ce jeu du chat et de la souris, on sait qui est le chat. Fort d'une armée extrêmement puissante et d'une diaspora dont l'influence politique est tentaculaire, Israël est aujourd'hui dirigé par une coalition de droite au sein de laquelle les religieux extrémistes occupent des postes stratégiques.
Quant à l'Autorité palestinienne, si les rapprochements récents avec le Hamas ont pu mettre un peu de baume sur les plaies causées par la division et la violence du passé, ils ont aussi ranimé la méfiance des pays occidentaux à son endroit.
Cela étant dit, en appuyant récemment la révolte populaire dans les pays arabes dirigés par des dictatures, les Occidentaux ont voulu éviter le risque d'un virage hostile à leurs intérêts, mais ils ont du même coup contribué à fragiliser la position d'Israël. Et comme le gouvernement israélien n'a souvent besoin de personne pour se faire de nouveaux ennemis, il a lui-même contribué à noircir sa réputation et à se mettre la Turquie à dos lors de l'abordage d'une flottille humanitaire qui s'est conclu par l'assassinat de neuf ressortissants, au large de Gaza, en 2010.
C'est donc dans ce contexte géopolitique pour le moins trouble que les Occidentaux doivent aujourd'hui choisir entre leur sympathie pour la nation palestinienne et la défense d'un allié de plus en plus dérangeant parce qu'exclusivement centré sur ses intérêts nationaux.
D'accord sur le fond avec les aspirations palestiniennes, ces pays savent que le geste serait bien reçu par leurs propres citoyens, et surtout qu'il aurait une influence déterminante dans les pays arabes ébranlés par des révolutions. Mais tant aux États-Unis qu'en Europe, diplomates et politiciens savent aussi que la reconnaissance de la Palestine comme membre à part entière de l'ONU mettrait le feu aux poudres en Israël et au sein de la diaspora juive, sans forcer pour autant l'avènement d'un règlement.
Ajoutons à cela la sale campagne menée par les républicains américains qui accusent le président Obama de lâcheté devant la menace du terrorisme arabe, et voilà brossé sommairement le portrait de cette nouvelle crise diplomatique. Une crise qui aura quand même eu le mérite, pour une fois, de ne tuer personne, et de rappeler que le règlement du conflit israélo-palestinien est une condition essentielle pour inciter les peuples de la région à rejoindre les rangs des démocraties modernes.
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j-rsansfacon@ledevoir.com
Palestine
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