(Ottawa) Expulsé de la Chambre des communes après avoir traité de « raciste » un député du Bloc québécois qui a refusé de donner son accord au dépôt d’une motion condamnant le racisme systémique au sein de la GRC, le chef du NPD Jagmeet Singh persiste et signe.
Le refus du député bloquiste Alain Therrien de donner son consentement à la présentation de sa motion, alors que la brutalité policière envers les peuples autochtones fait les manchettes depuis quelques semaines, est hautement condamnable, selon lui.
Et il refuse net de présenter ses excuses au député bloquiste, malgré les demandes en ce sens de la part du Bloc québécois.
En conférence de presse après que le président de la Chambre des communes Anthony Rota l’eut expulsé, M. Singh a paru bouleversé par moments, ayant du mal à contenir sa colère et ses émotions à la suite des événements survenus aux Communes en cette dernière journée de séance avant la pause estivale.
M. Singh, qui a lui-même été victime d’actes racistes dans le passé, a eu un échange de regard avec le député Alain Therrien après que ce dernier eut dit non à sa demande de présenter la motion.
« J’ai vu ce député non seulement dire non à la motion, mais aussi balayé d’un revers de la main les inquiétudes de ceux qui sont victimes du racisme, des gens qui ont été tués par la GRC. Il a fait exactement ce que l’on fait depuis des décennies. À ce moment-là, je suis devenu furieux. À ce moment-là, j’ai vu le visage du racisme », a-t-il affirmé.
« Je suis triste maintenant. Pourquoi ne pouvons-nous pas agir ? Pourquoi ne pouvons-nous rien faire pour sauver la vie des gens ? Nous pouvons faire quelque chose. Comment une personne peut-elle dire non à cela ? », a lancé d’un autre trait le chef du NPD, refoulant des larmes.
« Des milliers de gens manifestent dans les rues dans le monde et au Canada pour dénoncer la racisme systémique. (….) Le racisme systémique existe au Canada aussi. Nous avons vu des exemples horribles seulement au cours des deux derniers mois. Des images qui nous brûlent l’esprit, des images d’autochtones qui sont battus et brutalisés, et on a vu des agents de la GRC tuer des autochtones », a aussi dit M. Singh.
« Les gens sont frustrés, les gens sont fâchés de voir que le gouvernement fédéral n’a adopté aucune réforme. C’est pourquoi nous avons présenté notre motion », a-t-il dit, soulignant que sa motion visait à entreprendre un examen approfondi des protocoles de la GRC en matière d’utilisation de la force, et de meilleurs investissements en santé mentale.
Interrogé à savoir s’il maintient toujours son accusation contre le député Therrien, le chef du NPD a déclaré : « Oui, toute personne qui s’oppose à une telle motion est raciste ».
M. Singh devait absolument obtenir le consentement unanime de la Chambre pour déposer sa motion. Après avoir fait sa sortie, la whip du Bloc, Claude DeBellefeuille, a exigé des excuses de sa part.
« Chacun a le droit à son opinion et je ne crois pas qu’un chef d’un parti peut traiter, ici, un membre de cette Chambre de “raciste” parce qu’on ne partage pas la motion qui vient d’être discutée », a-t-elle dit.
La députée néo-démocrate qui tenait le siège de la présidence à ce moment-là, Carol Hugues, a aussi demandé à M. Singh de s’excuser.
« C’est vrai, je l’ai appelé un raciste et je le crois ! » a rétorqué M. Singh, se levant à son tour. Et « je ne vais pas (m’excuser) », a-t-il renchéri.
Après quelques minutes, le président des Communes, Anthony Rota, a repris son siège et ordonné à M. Singh de quitter la Chambre pour le reste de la journée. M. Singh n’y était déjà plus.
Dans un communiqué de presse, le Bloc québécois a affirmé avoir appuyé la demande proposant que le comité de la sécurité publique étudie l’existence du racisme systémique dans la GRC. « Nous sommes convaincus que la discrimination à l’égard des communautés autochtones et des minorités culturelles est un enjeu majeur. Cependant, il nous apparaît inapproprié d’imposer des conclusions à un comité avant que celui-ci n’ait procédé à son étude. Nous respectons le processus parlementaire », a affirmé la whip du Bloc québécois, Claude DeBellefeuille.
« Parce que le Bloc québécois a dit non à la motion du NPD, le chef du NPD a diffamé le leader parlementaire du Bloc québécois avec une insulte injustifiée qui salit sa réputation. Il doit s’excuser immédiatement », a-t-elle ajouté.