(Québec) Le bureau de Stephen Harper m'a appelé hier matin. Pas pour un poste au Sénat, rassurez-vous! On était à la recherche d'une vieille entrevue de Jacques Parizeau au Soleil, faisant l'éloge de l'instabilité politique au Canada.
Pas besoin de faire une demande d'accès à l'information, tout ça est public. Voici donc la citation de Jacques Parizeau qui faisait saliver le premier ministre du Canada :
«Un gouvernement plus faible à Ottawa fait éminemment mon affaire. Les souverainistes n'ont pas intérêt à ce qu'un grand nombre de gens regardent encore Ottawa comme un gouvernement stable, sérieux. Il faut que l'image projetée soit celle d'un gouvernement faible, désorienté, et qui va l'être encore plus dans l'avenir. Ça, c'est parfait». - Jacques Parizeau, le 18 janvier 1991
Pas besoin d'être la tête à Papineau pour comprendre l'intérêt soudain de Stephen Harper pour cette entrevue. Le separatist bashing a toujours été une arme très fiable au gouvernement fédéral pour se rallier le Canada anglais. Or c'est précisément ce que font les conservateurs depuis mardi, pour dénoncer l'entente de Stéphane Dion et de Jack Layton avec Gilles Duceppe. Alors vous comprenez que du Parizeau, dans les circonstances, c'est du gâteau! Il n'est donc pas surprenant que la première citation de M. Harper, hier, à la période de questions, c'était celle de Jacques Parizeau... En anglais, évidemment!
Un sondage publié hier par Angus Reid illustre bien le potentiel d'une campagne contre les «séparatistes» dans le reste du Canada. La majorité des provinces anglophones sont réticentes ou opposées à la formation d'un gouvernement de coalition qui dépendrait du Bloc. Le Québec est la seule province à se montrer favorable au remplacement du gouvernement conservateur par une telle coalition, avec un bémol : 60 % des Québécois se disent inconfortables à l'idée de voir Stéphane Dion devenir premier ministre. Pour le reste, ils n'ont pas trop peur de voir Gilles Duceppe dans le décor, et ils ne sont que 21 % à dire que le Parti conservateur mérite encore de gouverner.
Je ne sais pas à qui profitera cette crise parlementaire à Ottawa, mais Jean Charest est chanceux qu'elle n'ait pas éclaté deux semaines plus tôt. Parce qu'à la vitesse à laquelle les conservateurs réveillent les vieux démons antiséparatistes au Canada anglais, il ne faudra que quelques jours pour ranimer les passions nationalistes au Québec. Et cela, ça ne peut qu'aider Pauline Marois lundi prochain, même si les péquistes sont mal à l'aise de voir Gilles Duceppe faire copain-copain avec Stéphane Dion, dans l'intérêt public... du Canada! S'il fallait que cette crise parlementaire prenne l'allure d'une campagne sur le dos du Québec, elle pourrait inciter les souverainistes à sortir en masse pour appuyer le PQ lundi.
Il n'est pas surprenant que Jean Charest garde le silence dans ce suspense, dont l'issue est tellement incertaine. Ses sondages internes montrent que la position des partis n'a pas bougé depuis le débat. S'il parvient à se rendre jusqu'au 8 décembre sans se faire attraper par la folie outaouaise, il conserve ses chances de gagner une majorité. Il reste quatre jours. Je vous parie qu'il compte les heures...
«Harper au Soleil...»
à la vitesse à laquelle les conservateurs réveillent les vieux démons antiséparatistes au Canada anglais, il ne faudra que quelques jours pour ranimer les passions nationalistes au Québec.
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