À l'adage selon lequel «la première victime d'une guerre, c'est la vérité», le Pentagone a collé avec une volonté, une force, une constance inouïes. Grâce au travail de bénédictin, il n'y a pas d'autre mot, d'un journaliste du New York Times, on sait aujourd'hui que le pouvoir exécutif s'est appliqué à l'édification d'une machine de propagande si puissante qu'elle met en relief le dédain que Bush et compagnie nourrissent à l'égard de la démocratie.
Bien avant le drame du 11-Septembre, Torie Clarke, alors patronne des relations publiques au Pentagone, avait décidé la création d'un groupe de militaires retraités aptes à camper convenablement le rôle d'analyste à la télévision. Bien évidemment, elle avait pris un soin particulier à s'assurer que ces messieurs partageaient les vues néoconservatrices de l'administration.
Tout simple, son objectif consistait à subvertir le travail du journaliste traditionnel en occupant l'espace médiatique par l'intermédiaire d'experts à la solde du Pentagone. L'opération a remporté un succès dépassant les espérances de madame et celles de Donald Rumsfeld, alors ministre responsable de la Défense, et de Dick Cheney, le vice-président. Car les 80 généraux et colonels ayant défilé régulièrement sur les plateaux de télévision se sont révélés en fait les véritables chroniqueurs de la guerre en Irak. Et ce, à partir du moment où la Maison-Blanche avait décidé de renverser Saddam Hussein. Autrement dit, cette flopée de gradés a relayé et couvert jusqu'aux mensonges concernant les armes de destruction massive.
Le pire, c'est que les grands réseaux, de CBS à CNN en passant par Fox, NBC et ABC, ont eu recours à ces militaires sans avoir vérifié s'ils étaient en conflit d'intérêts, comme ils le font avec les journalistes. Or, selon l'enquête du New York Times, ces retraités de l'armée étaient et demeurent vice-présidents, conseillers ou lobbyistes pour un ensemble combiné de 150 compagnies fournissant le Pentagone en armes, biens et services divers. Plus ils martelaient les messages conçus par Rumsfeld et ses proches, plus le budget des armées augmentait et plus leurs entreprises empochaient.
Tout naturellement, ce conflit d'intérêts a eu pour effet pervers que ces soi-disant experts objectifs gommaient certains aspects du conflit irakien. Ainsi que le confie l'un d'entre eux, lorsque l'on savait que la stratégie de Rumsfeld et de son état-major connaissait des ratés, on s'abstenait de le mentionner de peur de perdre sur-le-champ tel ou tel contrat.
Tous les aspects, éléments ou facteurs de cette histoire permettent d'insister sur un... état d'esprit! Celui de Rumsfeld et Cheney. On ne répétera jamais assez que ces vétérans des administrations Nixon et Ford n'ont jamais digéré l'obligation qui leur a été faite, alors que Ford était à la Maison-Blanche, de gérer la réduction de pouvoirs conséquente au Watergate et à la Guerre du Vietnam. Lorsqu'ils sont revenus, leur inclination pour une Amérique impériale s'est combinée avec une délectation pour la revanche et la réappropriation des mandats perdus dans les années 70. Avec les dégâts que l'on sait.
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