Le PQ, un parti fantôme?

Et si le prophète de malheur avait raison...

Chronique de Pierre Godin

« Bonne continuation… de course à la chefferie, les gamins! » Ce sobriquet pas très gentil m’est venu à l’esprit quand j’ai reçu un énième courriel de la lucide et vaillante équipe du Parti québécois qui supervise l’opération. Celle-là même, sans doute, qui a coulé Pauline Marois avec une campagne électorale si erratique que les mauvaises langues chuchotaient qu’elle avait été concoctée par les libéraux…

« En vue des débats, envoyez-nous vos questions! » suggérait la vaillante équipe, comme si elle était en panne d’idées pour le prochain débat entre les candidats, le 16 avril. En passant, où en est-on exactement dans les palabres? Y en reste-t-y encore beaucoup, des débats, avant d’avoir enfin un chef? Les seuls qui ne semblent pas réaliser qu’il y a urgence, ce sont nos angéliques de la vaillante équipe qui ont décidé de faire durer le plaisir le plus longtemps possible. Le temps que les banquiers anglicisés et cupides qui entourent Couillard, laissés depuis des mois sans adversaire valable, continuent de briser méthodiquement le cœur et les reins du Québec français historique.

Écœuré comme bien d’autres par cette course qui n’en finit plus, ma réponse à la question était toute prête : la meilleure idée que je pourrais vous suggérer, messieurs dames, c'est d'en finir au plus sacrant avec vos débats sur le sexe des anges — comme la date du foutu référendum — qui n'intéressent personne. Autre exemple, le thème palpitant du prochain débat : « indépendance et parti »…

Je me suis laissé dire aussi, mais j’espère que je me trompe, que vous songiez à prolonger la course jusqu'en… 2023. J’avoue cependant que je ne serais pas tant surpris que ça. Car j’ai encore en tête l’aberrante feuille de route dévoilée par le président du PQ, Raymond Archambault, après le départ de Pauline Marois. « Avant de désigner un nouveau chef, pontifia-t-il le plus sérieusement du monde, il faudra d’abord tenir un congrès d’orientation pour adopter un programme. Or ce congrès ne se tiendra pas avant… 2016. » Pas pressé, le monsieur ! Priver le PQ de leader durant deux longues années, soit la moitié du mandat de Philippe Couillard! Sans doute ignorait-il que la politique a horreur du vide.

Bon, heureusement, notre vaillante et lucide équipe a bousculé un peu son calendrier, mais pas suffisamment à mon goût. Rappelons les faits : battue aux élections du 7 avril 2014, Pauline Marois est rentrée sous sa tente le jour même. Or, un an plus tard, le PQ n’a toujours pas de chef. Incroyable, mais vrai! Les libéraux et leurs petits copains des médias, dont ceux de La Presse et de Radio-Canada particulièrement, se bidonnent. Dans leur for intérieur, ils adressent un gros gros merci à monsieur Archambault et Consorts. Par leur aveuglement angélique, ceux-ci confirment la boutade voulant qu’au pays du Québec, les péquistes soient les enfants de choeur et les libéraux, les enfants de chienne. Soit dit en passant, les libéraux le sont bien malgré eux, dans notre cas de figure. En effet, ils n’auraient même pas eu besoin de multiplier les coups tordus, comme ils savent si bien le faire, le PQ s’occupant lui-même de s’autotrucider.

On l’a tous compris, l’idée de la lucide et vaillante équipe du Parti québécois était de faire traîner les choses pendant une année ou deux, dans l’espoir de barrer la route à PKP. Le seul des candidats actuels capable de remettre sur ses rails le parti dont ils ont fait un « champ de ruines », pour citer le messager des mauvaises nouvelles, Jacques Parizeau, qui a été le premier à le creuser en abandonnant le navire au référendum de 1995. PKP, le seul candidat capable aussi de raviver la flamme de l’indépendance, en plus de rapprocher le PQ du pouvoir. Ça crève les yeux, libéraux, caquistes et fédéralistes de toute mouture se lèvent la nuit pour le haïr.

L’évidence est là : s’il veut faire mentir le prophète de malheur Parizeau qui le ravale à un parti fantôme, le PQ doit opposer aux Couillard et Legault un poids lourd qui a l’étoffe d’un chef et une feuille de route impressionnante. C’est le cas de Pierre Karl Péladeau, qu’on l’aime ou pas. Et non celui des poids plume comme Alexandre Cloutier ou Bernard Drainville qui possèdent certes d’immenses qualités, mais n’ont pas la stature pour se colleter à Couillard. Dans la présente et interminable course, le choix des militants péquistes se résume à ceci : élire comme chef un Drainville ou un Cloutier, c’est maintenir les libéraux en poste pour un autre mandat, peut-être même deux. Alors qu’avec PKP, plébiscité d’avance par la population, c’est se donner le maximum de chance de reconquérir le « divin pouvoir » avec tout ce qui vient avec, y compris l’indépendance.


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6 commentaires

  • Jean Gilles Répondre

    12 avril 2015

    "Le prophète de malheur" a tort dans sa façon de faire, une fois de plus, et dans le timing.
    Il arrive avec sa pelure de banane à la dernière minute puis il nous lance sa fatwa.
    C'est ainsi que Landry a perdu, à la première élection de Charest: la veille du débat
    le prophète de malheur est sorti avec ses gros souliers.
    Sur le fond, il a raison. Mais pourquoi ne pas avoir soumis cela à l'intérieur du PQ?
    Pourquoi sort-il pour aller se cacher dans ses terres? Sans qu'on puisse le questionner? Est-il encore un fan de ON? Appuie-t-il un candidat?
    Je regrette de dire qu'il joue à la belle-mère frustrée. Et pourquoi nous a-t-il laissé tomber en 1995?

  • Archives de Vigile Répondre

    12 avril 2015

    ''Les seuls qui ne semblent pas réaliser qu’il y a urgence, ce sont nos angéliques de la vaillante équipe qui ont décidé de faire durer le plaisir le plus longtemps possible.''
    Excellent texte M. Godin.Merci.
    Je laisse en lien,l'entrevue de Bernard Gauthier(Rambo)aux Francs Tireurs,qui a le mérite de défendre dans l'ici-maintenant ses intérêts et ceux des travailleurs de la Côte-Nord.
    Inspirant également,lorsque qu'on y compare les stratégies de style guimauve royale sous le PQ ayant servis à se rendre là où nous sommes,quand c'était le temps de mettre son poing sur la table.
    Entrevue Bernard "Rambo" Gauthier
    http://lesfrancstireurs.telequebec.tv/occurrence.aspx?id=443

  • Archives de Vigile Répondre

    9 avril 2015

    M. Godin j'ai tellement dit et répété à ma manière ce que vous écrivez que lorsque je vous ai lu, je me suis dit oufffffffffffffffffffffffffff! Enfin!!!!!!!!!!!! c'est tellement cela et dire que M. Péladeau ne répond pas à ces connards, c'est déjà une marque d'intelligence stratégique! Encore quatre longues semaines! C'est long en politique!
    Merci pour vos articles toujours d'une grande pertinence!

  • Fernand Lachaine Répondre

    9 avril 2015

    Merci monsieur Godin.
    Pierre Péladeau, le père de Pierre-Karl, avait cette passion pour le Québec et je suis assuré que son fils a cet objectif de faire du Québec UN PAYS libre et souverain.
    Je crois aussi qu'il savait pertinemment dans quel bateau il s'aventurait. Donc les attaques des adversaires politiques ne le surprennent pas.
    Ce qui est un troublant ce sont les attaques viennent de l'intérieur.
    Monsieur Le Hir en parle abondamment dans sa chronique de ce matin.
    À moins d'un tsunami PKP deviendra le chef du PQ au mois de mai prochain et il devra effectuer un ménage dans la maison du PQ.
    C'est assez de faire les enfants de chœur. Dorénavant le PQ devra avoir du chien...
    Nous faire piler dessus par certains médias, il me semble que ça devrait suffire bientôt. La présente direction du PQ n'a même pas attaqué ce sérieux problème. Les membres s'attendent à ce que des changements soient apportés car plusieurs sont "tannés" à se faire ballotter par tous et chacun, même les belles-mères.

  • Jean Archambault Répondre

    8 avril 2015

    Je suis complètement en accord avec vous. Plusieurs militants péquistes vivent dans une sorte de nirvana apolitique. Vous savez que les militants et membres du PQ font de savantes réflexions... et plus ils ont des goûts: trop à droite... trop vieux....
    Pendant ce temps-là, les radio-poubelles polluent les esprits dans la région de Québec et le PQ se retrouve bon troisième. Bernard Drainville m'a même dit qu'il ne fallait pas les appeler par ce nom car les gens de Québec écoutent ce genre de radio. De plus, il s'y rend en leur disant qu'ils ne doivent pas " le blaster après" quand il quitte le plateau. C'est de l'angélisme à la sauce radio-canadienne. Il y a des habitudes qui ne se perdent pas.
    En 1924, dans son livre Mein Kampf, Hitler écrivait cette phrase « ( ) Ce que nous désignons toujours par « opinion publique » ne repose que pour une part minime sur l’expérience personnelle et sur les connaissances des individus ; par contre, elle est en majeure partie suscitée, et cela avec une persévérance et une force de persuasion souvent remarquable, par ce qu’on appelle l’information ». Dans ce livre inintelligible, pour cette fois, il a raison.
    Je suis un militant très axé sur le terrain. Depuis le départ, je crois que PKP devrait être élu par 95 % des membres... et je suis de gauche, si ça veut dire quelque-chose, aujourd'hui. Dans mon recrutement, 98 % des personnes n'ont jamais adhéré à un parti ou reviennent après plusieurs années, à cause de PKP.
    Mais à voir le déroulement de cette course à la chefferie, je me demande si PKP va nous lâcher. Endurer toutes les bêtises qui se disent sur lui, endurer la propagande des médias contre sa candidature. Il faut être fort. Je souhaite qu'il continue de se battre, car il y a des milliers de militants qui croient en lui. Je lui lève mon chapeau.

  • Mario Pelletier Répondre

    8 avril 2015

    Entièrement d'accord avec vous, Pierre Godin !
    C'est le gros bon sens, et c'est la seule voie possible pour sortir du défaitisme et de l'auto-destruction qui grugent le Québec depuis 1995!
    Mario Pelletier