À force de voir des chiffres de plus en plus effarants revoler de tous bords, tous côtés, on risque de développer quelque chose comme une cécité qui, à la limite, nous amène à ne plus rien voir du tout. Une surdité aussi. Des ventriloques, les chiffres. Encore faut-il les écouter.
La plupart du temps, ce sont les gros chiffres qui produisent cet effet.
On se souvient par exemple de cette fuite de pétrole dans le golfe du Mexique, au printemps 2010. Cinq millions de barils se sont retrouvés dans les eaux et sur les côtes. Ça fait quand même 835 000 tonnes d’hydrocarbures. Il en a coûté 9 milliards de dollars à British Petroleum pour indemniser les victimes. Les particuliers et les entreprises des États riverains ont reçu 9 milliards de dollars en dédommagement. Pour colmater la fuite et nettoyer les côtes, BP a engagé 15 milliards de dollars. Et pour avoir la paix avec le gouvernement étatsunien, la multinationale anglaise a accepté de payer des amendes totalisant près de 7 milliards de dollars.
De son côté, Transocean, propriétaire de la plateforme en cause, a payé une amende de 2,2 milliards de dollars. Pareils chiffres ne parlent pas. Ils hurlent plutôt ! On pourrait même soutenir qu’il y a du gaz dans l’eau ! Surtout qu’en plus, BP pourra déduire une grande partie du montant de cette amende de ses dépenses de fonctionnement, et sera donc en partie payée par les contribuables. Le système a de ces bontés pour les entreprises…
Comment alors comprendre qu’après ces tragédies, la question d’Énergie Est soit encore sur le tapis ! Un oléoduc qui pourrait passer sous 800 cours d’eau au Québec, dont le fleuve Saint-Laurent. Le spécialiste Éric Pineault estime que ce sont 7 287 500 de litres à l’heure qui couleront dans cet oléoduc. Ce qui fait pas moins de 174 900 000 de litres par jour ! Dans une année 63 835 000 000 litres. C’est du pétrole ça, monsieur ! Tout ça pour un grand total de … 33 jobs !
1,2,3
Gros chiffres que ceux-là. Mais il y en a de tout petits qui parlent tout autant. La preuve ! Pendant plusieurs jours, la société québécoise tout entière a débattu autour des chiffres 1, 2 et 3.
De quoi s’agit-il ? De bains ou de douches. Un, deux ou trois bains par semaine, dans les CHSLD ? Le ministre Barrette a été formel : la débarbouillette, ça fait la job. Alors, une fois par semaine, c’est bien suffisant.
On ne sait pas si le ministre voulait s’attirer les faveurs des écologistes en faisant ce plaidoyer pour éviter de gaspiller de l’eau. Peut-être ? Dans l’état actuel des choses, faut croire que les libéraux cherchent des appuis dans tous les milieux.
C’est un caricaturiste qui a le mieux illustré la vacuité du discours ministériel. Pendant que Barrette fait son plaidoyer pro débarbouillette, ses collègues de l’Assemblée nationale se sauvent de lui. Visiblement, ile ne peuvent plus le sentir…
Parlant de médecins, passons outre à cette « erreur » qui leur a permis de toucher quelque 400 millions de dollars en trop et constatons que 174 spécialistes ont empoché en moyenne 1 318 144,05 million de dollars en 2015. C’est la RAMQ qui nous l’apprend. Bien sûr, ils ont des frais de bureau, les pauvres… Même que certains y ont des douches ! Faut les payer, ces à-côtés, non ?
Robots
Un ami – JPP - soulignait récemment sur les réseaux sociaux l’incongruité d’une publicité de la BMO mettant en vedette la comédienne Sylvie Moreau. Cette dernière, recevant un appel de sa banque, croyait parler à un robot avant de s’apercevoir que son interlocuteur était bien vivant et qu’il s’appelait Jérémie. On appelle la chose « l’effet BMO ». Fort bien.
Là où l’affaire se corse, c’est quand on apprend fin mai que BMO compte mettre à pied 1847 personnes à son emploi. Les profits de la banque ont pourtant été de plus de 5 milliards de dollars pour le premier trimestre. Mais là où on reste bouche bée, c’est lorsqu’on constate que ces mises à pied sont le résultat de … l’implantation de services robotisés à la banque !
Et, en Chine, le fabricant d’iphones et autres bébelles du genre vient de remplacer 60 000 de ses 110 000 employés par des robots !
Un autre docteur libéral
Pour minimiser une manifestation de 25 000 personnes à la défense de la loi 101, en 1988, le docteur Guy Rivard, responsable de l’application de la loi, avait eu cette remarque, qui est tout ce dont on se souvient de lui : « Bah ! Il y avait 50 000 personnes à regarder tomber les cheminées de la carrière Miron… » Bah ! Un bain, c’est bien assez, disait un autre docteur.
Quand les chiffres parlent et qu’on les écoute, il arrive qu’on s’embarque dans une méchante jasette.
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