Crise financière - Le tango des milliards

Rétrospectivement, il y a de quoi être profondément agacé, pour rester poli, par l'incurie crasse des agences de notation, les Moody's et Standard and Poor's de ce monde.

Crise mondiale — crise financière

En septembre dernier, l'aide consentie à AIG par le gouvernement américain avait été qualifiée de toutes les épithètes appartenant à la famille de l'énorme. Les autorités soi-disant compétentes, craignant que le premier assureur mondial ne déclare faillite et ne provoque du coup un tsunami financier, avaient accordé 85 milliards sous la forme d'un prêt devant être remboursé en deux ans. Depuis lors, un mois et demi s'est écoulé au cours duquel AIG a déclaré des pertes abyssales et a utilisé les trois quarts de la somme allouée par le Trésor américain, si l'on peut encore l'appeler ainsi.
Aujourd'hui, ce même Trésor a convenu de doubler la mise. AIG va bénéficier, c'est le cas de le dire, d'un prêt de 150 milliards. Dans cette histoire, le montant n'est pas seul à en imposer. Il y a les à-côtés, les accords conclus entre les parties. De deux ans, le délai afférent au remboursement a été fixé à cinq ans et le taux d'intérêt abaissé. Lorsque l'on s'attarde ne serait-ce qu'une seconde aux modifications de l'accord, on ne peut qu'être estomaqué par l'ampleur de celles-ci.
Une fois cette seconde passée, on constate que la refonte de l'accord a été commandée par les impacts plus grands que prévu des credit default swaps (CDS), produit financier se caractérisant ces jours-ci par son haut degré de toxicité. Avant de poursuivre, soulignons que la somme des CDS en circulation dans le monde est égale à 55 000 milliards. Et alors? Le PIB mondial est légèrement inférieur. Le PIB mondial! Quoi d'autre? La somme des actions inscrites à la Bourse de New York, du PIB des États-Unis et de la dette de ce pays est également inférieure au total des CDS. Ce n'est plus vertigineux, c'est absurde. D'autant que l'on apprend aujourd'hui, et après que le public a été appelé à la rescousse, que les vendeurs comme les acheteurs de CDS n'avaient pas une bonne maîtrise de cet engin comptable. Ce n'est pas tout.
Cet énième sauvetage d'AIG à même les deniers publics a été commandé, en partie il est vrai, par les secousses elles aussi toxiques d'un autre trou noir financier. Il s'agit des collateralised debt obligations (CDO) liées directement aux CDS. La définition de ces dernières, c'est à noter, s'étale sur quatre pages écrites en petits caractères. Format? Huit et demi sur quatorze. Pour faire court, la manipulation des CDO ne peut être faite que par des cracks parmi les cracks des mathématiques et de la physique. Et ce n'est vraiment pas des blagues. Qu'on se le dise, si les subprimes étaient des hypothèques exotiques, les CDS toxiques, le CDO est lui abscons et probablement plus néfaste. Toujours est-il qu'AIG et un certain nombre d'établissements financiers se sont gavés des trois.
Rétrospectivement, il y a de quoi être profondément agacé, pour rester poli, par l'incurie crasse des agences de notation, les Moody's et Standard and Poor's de ce monde. On se rappellera que c'est à la suite d'une baisse de la cote de crédit de Moody's qu'AIG a commencé à sombrer. Quand donc? En septembre dernier. Le marasme conséquent aux subprimes se poursuivait depuis août 2007, mais... Moody's s'est réveillée un an plus tard. Leur prétention d'exactitude comptable, de finesse financière se confond avec l'abject. Bonté divine! Le PIB mondial...


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