Je dis que l’approche du Québec face à l’attaque du Coronavirus est sensée parce qu’elle correspond très généralement à la volonté de la population québécoise. Ce n’est pas en raison d’une propagande des autorités que la population se rallie à l’approche gouvernementale. Peut-être que dans un an on comprendra que le Québec, et beaucoup d’autres pays, se sont trompés ou se sont fait trompés. Cependant, selon l’information disponible en mars, le risque était jugé très élevé de ne pas imposer un confinement généralisé et encore maintenant les gens comprennent que la prudence s’impose. On constate aussi que la majorité souhaite reprendre une vie normale le plus vite possible. C’est le confinement qui constitue la situation anormale. Le gouvernement dit aux citoyens que même si vous n’avez pas peur de sortir et d’aller travailler, vous n’êtes plus libre de le faire. Le déconfinement c’est le retour à la normale, les gens décident pour eux-mêmes s’ils vont sortir ou non. Il s’agit de bien évaluer les risques collectifs. Par exemple, tout le monde sait que parmi les personnes décédées de la Covid-19, environ 8% ont entre 50 et 69 ans, donc un peu moins entre 60 et 69 ans. Est-ce qu’il faut empêcher les personnes de cet âge d’aller travailler ou les laisser décider par eux-mêmes?
La difficulté pour les décideurs c’est qu’il y a peu de consensus scientifiques clairs. Comme s’est empressé de le dire le gouvernement fédéral il n’y a pas de preuve que l’immunité collective fonctionne, mais il n’y a pas de preuve non plus que le confinement prolongé à plus d’avantages que d’inconvénients. Il y avait un consensus tôt en mars, c’est qu’il fallait contrôler les frontières, tous les cas d’infection arrivant de l’étranger. Le premier ministre Trudeau s’est fait tirer l’oreille pendant une semaine, où était sa conseillère scientifique, qui demande maintenant à voir notre paperasse?
L’approche du gouvernement fédéral est totalement différente, ça coutera ce que ça coutera. Le gouvernement fédéral emprunte et distribue des dizaines de milliards de dollars pour maintenir les revenus et faire rouler l’économie, et il fait comme si cette solution pouvait durer. Cela lui permet de faire la leçon aux provinces comme le Québec qui sont prêts à prendre des risques avec la vie des gens pour les retourner en classe et au travail, et lui permet en même temps d’amplifier la crainte de la population face à la situation. C’est comme si la vie, dans un pays riche comme le Canada, n’avait pas de prix. Il y a des milliers de personnes qui meurent de la grippe à chaque année au Canada. En dépensant quelques milliards de plus on pourrait probablement en sauver la moitié. On ne le fait pas, on considère ces décès comme des morts naturelles. Il y aura une limite à garder 25% ou 50% des travailleurs au chômage, payés ou non. Si la pandémie dure des années, il faudra retourner travailler et accepter les décès.
Selon moi, pour les Québécois du moins, recevoir une prestation du gouvernement fédéral ne diminue pas le désir profond de retourner au travail et de reprendre une vie normale.
L’approche générale du gouvernement québécois, et des décisions spécifiques, sont critiquées, c’est tout à fait normal et souhaitable. Cependant, certaines critiques ignorent volontairement de tenir compte des contraintes réelles comme le manque de consensus scientifique, d’équipement et de personnel. L’impression désagréable qui se dégage de ces critiques souvent c’est que comme Québécois nous ne savons pas faire les choses comme il faut.
Il ne faut pas oublier que les difficultés à faire face à la situation actuelle résultent en bonne partie des orientations budgétaires des dernières décennies. L’austérité budgétaire, de nature idéologique, explique l’état de délabrement des soins aux personnes âgées mais aussi le manque de préparation pour faire face à une crise. Quand on n’a pas suffisamment de budget pour soigner les patients, la prévoyance devient un luxe qu’on ne peut pas se payer.
Il faut d’abord penser aux coupures dans les transferts fédéraux en santé, qui ont mis une pression énorme sur les finances du Québec. Le premier ministre canadien est donc très mal placé pour faire la leçon. Le premier ministre québécois a aussi une part de responsabilité dans le sous-financement des soins aux personnes âgées et ainsi la crise dans les CHSLD l’a énormément déstabilisé. À son arrivée au pouvoir il aurait pu faire évaluer l’impact des coupures libérales sur la qualité des services publics. Il était trop content de se retrouver avec une alléchante marge de manœuvre et de pouvoir faire miroiter des baisses d’impôt.
C’est ce qui fait la différence entre les décideurs et les gérants d’estrade, ces derniers ne se retrouvent jamais au bâton. Plusieurs des critiques les plus sévères actuellement applaudissaient à chaque fois que les politiciens réussissaient à raccourcir la ceinture d’un trou et salivaient à chaque fois qu’on parlait de baisses d’impôt. Au fait, le docteur Arruda, ayant fait preuve d’un peu trop d’assurance, devrait se préparer à passer au bâton dans les prochains mois.
Les Québécois sont très capables ne s’occuper de leurs affaires. Ils devraient s’y mettre plus sérieusement dès maintenant en indiquant clairement à leurs politiciens quelles sont leurs priorités budgétaires. Ces priorités ne peuvent s’appliquer tant que cinquante pourcents de nos impôts vont à Ottawa. Les Québécois devraient d’abord comprendre que le Canada n’est pas leur pays.
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