Comment Arthur Porter a-t-il pu rouler autant de monde dans la farine?

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L'aveuglement volontaire des amis de Porter

Un mandat d’arrestation a été lancé contre l’honorable Dr Arthur Porter, membre à vie du conseil privé de la Reine pour le Canada, protégé du premier ministre Harper, «bonne connaissance» et partenaire en affaire de Philippe Couillard, candidat au leadership libéral.
La police reproche au bon docteur quelques peccadilles: fraude, complot pour fraude, fraude envers le gouvernement, abus de confiance, commissions secrètes et recyclage des produits de la criminalité. Une petite irrégularité de 22,5 millions de dollars dans l’attribution du contrat du centre de Santé McGill à SNC-Lavalin.
Pas con le doc Porter, il a foutu le camp aux Bahamas dès que certaines de ses pratiques douteuses ont commencé à être ébruitées dans les médias en 2011. Propriétaire d’une clinique privée d’oncologie et du plus gros bar à danseuses de Nassau, je pense que les chances de le voir un jour répondre de ses crimes à Montréal sont pratiquement nulles.
D’abord, il s’est auto diagnostiqué un cancer des poumons qui ne lui donnerait que quelques mois à vivre. Compte tenu de ce qu’on sait du personnage, une confirmation indépendante de ses dires ne serait pas inutile.
Même s’il était pétant de santé, son extradition ne serait pas facile. L’Honorable Porter est riche et a des amis politiques puissants aux Bahamas dont le Premier ministre Perry Christie. Et si jamais les Bahamas se révélaient vulnérables aux pressions d’Ottawa, Porter pourrait toujours noliser un jet privé pour s’enfuir dans son pays d’origine la Sierra Leone dont il est «ambassadeur plénipotentiaire» et ami personnel du président Ernest Bai Koroma.
Ce qui est à la fois fascinant, triste et mystérieux dans cette affaire, c’est comment l’honorable Dr Porter a réussi à berner autant de membres des élites du pouvoir au Canada et au Québec. Au point où l’on se dit que c’est impossible, qu’il doit y avoir une explication secrète et inavouable derrière autant d’incompétences qui frôlent l’absurde.
Ici, au Québec d’abord. Avant de se pointer à Montréal, l’homme a été forcé de démissionner du centre de santé de Détroit. Son administration, marquée par des conflits d’intérêts, a créé un épouvantable gouffre financier. Le périodique L’actualité médicale détaille l’affaire pour ceux qui auraient été incapables de lire les journaux de Détroit.
Pourtant le sénateur conservateur, David Angus, et l’ancien président de l’Alcan, David Culver, deviennent les ardents apologistes de Porter. Le petit rondouillet sympathique est identifié comme l’homme le plus apte à diriger le centre de santé McGill par une firme de recrutement prestigieuse. La recommandation est entérinée par un comité de sélection interne et confirmée par le conseil d’administration.
On est en droit de se poser la question. Comment est-il possible qu’il y ait autant d’insouciants, d’empotés aux fonctions mentales émoussées dans des organes de décision au Québec? Qui les nomme à ces postes? Et Pourquoi?
Dans l’affaire Porter, le virus d’imbécillité s’est rapidement propagé à Ottawa où il a frappé le groupe le plus vulnérable à ce genre d’affection: le gouvernement conservateur.
Harper nomme Porter au Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. Le CSARS est chargé de s’assurer que les services secrets se conforment aux lois dans l’exercice de leurs fonctions. L’homme actuellement recherché pour 13 crimes différents par la SQ se voit accorder l’habilitation sécuritaire TOP SECRET/TRÈS SECRET lui donnant accès aux secrets les mieux gardés du gouvernement du Canada.
Harper le fait également conseiller de la Reine à vie. Personne au bureau du premier ministre ne s’est donné la peine de faire la vérification la plus élémentaire sur le personnage. Mieux Harper, avec la même irresponsabilité insouciante, le nomme ensuite président de l’organisme.
Aussi idiote, la direction du SCRS a laissé faire sans poser de questions sur l’homme à qui Harper donne accès à tous ses dossiers: un manquement gravissime à ses devoirs qui frise l’incompétence criminelle.
Harper et les patrons du SCRS ont découvert le pot aux roses en lisant le National Post fin 2011. Porter était non seulement un «ambassadeur plénipotentiaire» d’un pays étranger, mais il était en affaires avec un trafiquant d’armes méprisable, Ari Ben Menashe, qui se présente lui-même comme un ancien du Mossad. Le bon docteur voulait qu’il se charge de convaincre la Russie d’investir plus de cent millions de dollars dans une de ses entreprises en Afrique.
C’est là que tout le monde est sorti de la mystérieuse léthargie qui embrouillait les esprits au sujet de Porter. Harper l’a rapidement viré du comité de surveillance et un mois plus tard, il a démissionné du centre de santé McGill pour fuir aux Bahamas.
Maintenant, le Canada et le SCRS sont la risée des services de renseignement du monde entier. Un fugitif traqué par la police est en possession d’une partie de leurs secrets. J’exagère? Le chef libéral Bob Rae, qui a déjà fait parti du CSARS, explique : «Si vous êtes un membre de ce comité, vous avez accès à beaucoup d'informations de haute sécurité que vous ne pouvez révéler à personne.» Il ajoute: «Il est important de savoir exactement comment le nom de M. Porter est arrivé au bureau de M. Harper.»
Jamais le gouvernement Harper n’acceptera qu’un comité parlementaire se penche sur la question et fasse la preuve de son incompétence et de son irresponsabilité.


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