Le procès des leaders indépendantistes catalans qui s’est amorcé en Espagne a quelque chose d’absolument glaçant. Ils seront douze à comparaître dans les temps à venir.
Leur crime ? Avoir pris au sérieux le droit des peuples à l’autodétermination et, plus exactement, avoir pris au sérieux le droit du peuple catalan à décider de son avenir. Ils ont organisé un référendum, décrété illégal par le gouvernement espagnol, absolument intransigeant devant la nation catalane et décidé à la faire rentrer dans le rang.
Indépendance
Au nom d’une vision juridique terriblement étroite, Madrid a entrepris de casser la volonté d’un peuple qui ne demande qu’une chose : se gouverner lui-même. En d’autres mots, c’est au nom de l’État de droit que la démocratie a été étouffée. Un cadre juridique désuet, fossilisé, arriéré et inadapté a servi à contenir un élan national.
Cela devrait nous amener à relativiser un peu le culte de la primauté du droit et des tribunaux qui prend tellement d’importance à notre époque.
On se souvient de la journée du référendum, le 1er octobre, quand l’État espagnol a décidé de réprimer de la manière la plus brutale qui soit un peuple ayant décidé d’organiser une consultation sur son autodétermination nationale.
La police espagnole n’a pas hésité à tabasser de simples citoyens qui allaient voter ou qui travaillaient à organiser le vote, et cela, dans l’indifférence de la classe dirigeante européenne. Officiellement, cette dernière se soucie des droits de l’homme et ne parle même que de ça. N’importe quelle minorité loufoque peut présenter ses revendications extravagantes au nom des droits de la personne et on lui donne raison.
Mais quand un peuple veut voter sur son avenir et se fait matraquer, on sifflote. On accuse même ce peuple d’être antidémocratique. À croire que ce sont les Catalans qui donnaient des coups de tête aux matraques espagnoles.
L’Europe semble absolument fermée à la naissance d’un nouvel État sur son territoire. Elle redoute à tort une contamination des mouvements séparatistes.
Ne nous faisons pas d’illusions. Carles Puigdemont, le président catalan aujourd’hui en exil à Bruxelles, a perdu son pari. Jusqu’au bout, il semble avoir cru que Madrid finirait par céder devant la pression populaire. Il voulait obliger l’Espagne à négocier. Il oubliait que la démocratie et la justice ne gagnent pas toujours.
Démocratie
Les indépendantistes catalans espèrent néanmoins que ce procès politique permettra d’internationaliser leur cause. Ils se content probablement des histoires. Car ce qui leur a manqué, justement, dans leur combat pour l’indépendance, c’est un appui extérieur, celui d’une grande puissance prête à soutenir leurs revendications, un peu comme la France était prête à le faire pour le Québec en 1995.
Les Catalans étaient mobilisés, joyeux et résolus, mais ils étaient terriblement seuls. Leur rapport de force était nul. Aujourd’hui, ils sont héroïques, mais défaits.
Et pourtant, le peuple catalan refuse de s’avouer vaincu. L’indépendance est une longue bataille. Peut-être ce procès ne représente-t-il qu’une étape de plus dans le combat catalan, et non son point final.