«Ça va mieux»?

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Fin de règne en France

Le zouave a les pieds dans l’eau ! C’est sur cette statue d’un soldat de la guerre de Crimée fixée à l’un des piliers du pont de l’Alma que les Parisiens mesurent depuis toujours les crues de la Seine. Malgré leur caractère dramatique pour certains, parions que les inondations qui menacent la France ces jours-ci ont été accueillies comme un baume par le gouvernement de François Hollande. Qu’il était rassurant de voir à la télévision des familles secourues par de valeureux pompiers et des grands-mères hébergées dans des centres d’accueil. Tout un contraste avec les scènes de manifestations, de blocages et d’affrontements qui émaillent le quotidien des Français depuis deux semaines.

Et pourtant, « ça va mieux », avait dit le président François Hollande il y a un mois à peine. Oui, oui ça va mieux ! Et le pire, c’est que c’est vrai. En effet, croyez-le ou non, l’économie française connaît une éclaircie. La croissance a atteint 1,5 % en 2015 et, si elle continue à ce rythme, elle pourrait dépasser 2 % en 2016. Malgré un déficit toujours à la traîne, on assiste à une reprise de la consommation. Même le chômage, qui a baissé depuis deux mois consécutifs, est passé sous la barre des 10 %. On compterait même 12 000 jeunes pousses industrielles dans la grande région parisienne. Plus qu’à Londres et à Berlin !

Alors, comment expliquer ces manifestations et cette anarchie qui semblent incontrôlables ? Pourtant, là aussi le mythe ne résiste pas à la réalité. Les grévistes ont rarement été si peu nombreux. Rien à voir avec les manifestations contre le Contrat première embauche en 2006. Et encore moins avec la grande grève générale de 1995. Seule la Confédération générale du travail (CGT) est partie en guerre contre la loi El Khomri réformant le Code du travail alors que la Confédération française démocratique du travail (CFDT) parle, elle, d’« avancées » pour les travailleurs.

Il faut savoir que les syndicats français ne représentent qu’une infime partie des salariés. À 8 %, le taux de syndicalisation français est le plus bas de l’Union européenne avec l’Estonie ! Ce qui n’empêche pas les syndicats de négocier pour l’ensemble des salariés. Nous sommes donc devant le paradoxe suivant : moins il y a de syndiqués, plus les syndicats ne représentent que les plus déterminés. Moins les syndicats rassemblent de monde, plus ils doivent recourir à des actions d’éclat pour se faire entendre. Ajoutez à cela quelques grèves d’« opportunité » comme celles des chemins de fer et des contrôleurs aériens qui n’ont rien à voir avec la réforme du Code du travail, et vous aurez la cacophonie qui perdure depuis deux semaines.

On a eu un bel exemple de ce radicalisme hors sol le 26 mai dernier lorsque le syndicat du livre a bloqué l’impression de tous les quotidiens qui avaient refusé de publier la lettre ouverte du président de la CGT, Philippe Martinez. Seule l’Humanité a été publiée ce jour-là.

Au fond, dans ce conflit, chacun joue une partition sans rapport avec ce projet de loi très édulcoré et somme toute mineur qui ne changera pas grand-chose à la situation de l’emploi en France. La CGT, qui a vu l’ultragauche triompher à son dernier congrès et qui risque de perdre sa place de premier syndicat de France, cherche par tous les moyens à en découdre avec un gouvernement qu’elle sait très vulnérable et très impopulaire.

Le premier ministre Manuel Valls n’en espérait pas tant, lui qui cherche à s’imposer à gauche comme celui qui ne recule pas devant les réformes. On se demande même parfois si ce conflit ne lui offrirait pas une exceptionnelle porte de sortie avant la présidentielle de 2017 alors même que le très populaire ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, lui fait de l’ombre.

Du côté de la présidence, il y a longtemps que le scénario est devenu illisible. On n’a jamais vu un président proposer en fin de mandat une telle réforme, qui ne faisait d’ailleurs pas partie de ses promesses. Un sujet aussi sensible en France aurait dû être présenté au tout début du quinquennat. Contre toute attente, François Hollande a préféré conforter sa gauche en début de mandat avec le mariage homosexuel, alors qu’il la mécontente au moment où il en a le plus besoin. Comprenne qui pourra.
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