C’est une Crimée, qui fait oui, oui, oui, oui, oui, oui…

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La voix des peuples qui dérange l'ordre établi par d'autres qu'eux

On vote donc aujourd’hui en Crimée. Les conditions dans lesquelles a été décidé et se déroule ce referendum sont il est vrai assez particulières. Justifient-elles pour autant les cris d’orfraie que pousse et les menaces de sanctions que brandit l’Occident au nom de principes qu’il ne respecte pas toujours lui-même et en feignant d’ignorer que les pressions de tout ordre qu’il reproche à la Russie vont au-devant plutôt qu’à l’encontre des vœux de la population concernée ?
Certes, il n’est pas douteux que la minorité tatare dont je ne sache pas que l’on ait fait si grand cas à l’époque où Staline l’avait déportée en masse et en avait liquidé la moitié est opposée à la version poutinienne de l’Anschluss. En revanche, les envoyés spéciaux des médias du monde entier, si prévenus qu’ils fussent en faveur de la version bernardhenrilévyenne des événements, ont dû convenir au fur et à mesure qu’ils découvraient l’histoire et la réalité de la Crimée que la très grande majorité de ses habitants, arbitrairement détachés il y a soixante ans de la Fédération de Russie par un ukase de Nikita Khrouchtchev, souhaitaient redevenir et rester définitivement russes. Est-il donc si choquant de les consulter et de leur remettre le choix de leur destin ?
Mais, nous dit-on, il s’agit d’une ingérence du puissant voisin « soviétique » (pour employer le vocabulaire nuancé qui a cours ces jours-ci). Il est clair que la Russie se mêle de très près des affaires de l’Ukraine. Mais l’Union européenne, vivement encouragée par les Etats-Unis (« vas-y, mord-le ! ») a tendance pour sa part à s’ingérer fortement dans les affaires de la Russie, tout comme elle a pu le faire, pour n’en citer que les exemples les plus récents, dans celles de l’Irak, de l’Afghanistan, de la Libye, du Mali ou du Centrafrique, avec une brutalité qui dépasse de loin celle du « dictateur fou » qu’il est désormais de bon ton de comparer à Hitler. Les peuples, en l’occurrence, font preuve de plus de sagesse et de discernement que leurs gouvernements puisqu’il apparaît à la lumière d’un sondage réalisé cette semaine que 64% des Français et 57% des Allemands ne souhaitent pas que l’U.E. aide financièrement l’Ukraine, et qu’ils sont respectivement 71% et 62% à refuser l’admission de l’Ukraine au sein de l’U.E. L’ingérence a ses limites qui sont aussi celles du bon sens.
Mais, nous dit-on, l’intervention de la Russie en Crimée viole le sacro-saint principe de l’intangibilité des frontières. Sans remonter à 1919 ou 1945, quand à la suite des deux conflagrations mondiales les vainqueurs du moment ne se sont pas privés de faire joujou avec des frontières parfois plusieurs fois séculaires, aurait-on déjà perdu le souvenir d’une certaine intervention de l’OTAN contre la Serbie à la suite de laquelle celle-ci fut bel et bien amputée du Kosovo, en toute désinvolture et en violation non seulement de la souveraineté et de l’intégrité de la Serbie mais des engagements solennellement pris ?
Et nous, Français, aurions-nous décidément la mémoire courte ? C’est en vertu d’un autre principe, celui du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, dont nous voyons présentement se prévaloir Ecossais et Catalans, que par deux fois Paris organisa sur le territoire de la Sarre occupée par nos armées et administrée par nos fonctionnaires un plébiscite par lequel il était demandé à la population de ce confetti du Reich si elle souhaitait, pour son plus grand bien, être rattachée au pays des Droits de l’homme ou retomber dans son erreur teutonique ? Par deux fois, les Sarrois, à 90% en 1935, à 68% en 1955, déclinèrent notre offre généreuse. Au fait, n’est-ce pas seulement parce que la réponse des Criméens au referendum de ce dimanche nous est connue d’avance que l’Occident s’indigne qu’on ait osé leur poser la question ?


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