Budget fédéral : telle la cigale, on a « chanté tout l’été »

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17,3 milliards de déficit

Alors que le gouvernement fédéral s’apprête à présenter son troisième budget depuis les élections qui l’ont porté au pouvoir, un bilan s’impose. Et ce bilan n’est pas flatteur, puisque le gouvernement a systématiquement trahi ses promesses fiscales depuis son arrivée au pouvoir.


Compte tenu des menaces qui planent sur l’économie canadienne, le non-respect des engagements pris lors de la campagne électorale placent le gouvernement dans une situation financière délicate, alors que la croissance exemplaire de l’économie canadienne et le quasi plein emploi que nous vivons auraient dû nous procurer une certaine marge de manœuvre.


En campagne, le gouvernement avait promis que le déficit s’élèverait à « seulement » 10 milliards $ les deux premières années. Cette promesse de ne pas respecter la tradition de recherche de l’équilibre budgétaire qui prévalait au Canada depuis les gouvernements de Jean Chrétien et de Paul Martin présentait déjà un risque pour les finances publiques. Mais le déficit a finalement largement dépassé les 10 milliards $ prévus pour s’établir à près de 18 et 20 milliards $ de dollars, soit près du double chaque fois.


Et malgré l’embellie de l’économie canadienne, l’énoncé économique de l’automne dernier prévoyait un autre déficit de 17,3 milliards $ l’an prochain, alors que la promesse électorale était d’atteindre l’équilibre. Non seulement aucune cible n’a été atteinte jusqu’ici, mais même si les déficits s’avéraient moindres que ce qui a été annoncé, le gouvernement demeurera loin de ses objectifs. Aucun retour à l’équilibre n’est prévu.


Il semblerait d’ailleurs que le gouvernement ne sera pas plus en mesure de respecter sa promesse de réduire la dette à 27 % du PIB en fin de mandat. Elle devrait plutôt atteindre 29,9 %, ce qui signifie qu’elle se sera creusée de dizaines de milliards de dollars de plus. Enfin, le coût de la dette augmentera constamment, puisque plus d’intérêts devront être versés.


L’ironie, c’est que l’économie canadienne est en pleine croissance, si bien que le Fonds monétaire international et la Banque du Canada doivent régulièrement revoir leurs prévisions à la hausse. Le marché de l’emploi impressionne avec un très faible taux de chômage. Mais comme « la cigale, ayant chanté tout l’été », le gouvernement n’en a pas profité pour se créer une marge de manœuvre. Il n’y a actuellement aucune raison d’être dans une situation aussi délicate. Pourtant, comme le veut la fable, le gouvernement devra maintenant « danser » pour maintenir des finances publiques saines.


Des vents contraires


Le Canada fait aujourd’hui face à plusieurs vents contraires. Notamment les diminutions d’impôts aux États-Unis, qui mettent à mal notre compétitivité fiscale, mais aussi l’incertitude qui plane sur la renégociation de l’ALÉNA. Déjà, des experts soulignent le faible niveau d’investissements dans l’économie canadienne, alors que l’ALÉNA n’a pas encore été modifié et que la réforme fiscale américaine est entrée en vigueur depuis moins de deux mois. Cette réforme affecte très concrètement des pans entiers de l’économie canadienne. Par exemple, le secteur pétrolier souffre déjà depuis 2014 d’une baisse de 46 % de ses investissements à cause des lenteurs administratives ou des annulations de projets.


Des mesures, qui semblent malheureusement avoir été écartées, mériteraient d’être sérieusement considérées. Il s’agit entre autre de la diminution des impôts des entreprises pour maintenir notre compétitivité fiscale fortement amoindrie, mais aussi de s’attaquer au déficit, ce qui nécessiterait de diminuer certaines dépenses publiques. Un travail de fourmi, moins tape-à-l’œil que des dépenses extravagantes, mais nécessaire pour que le bel élan économique que vit présentement le Canada se poursuive.