(Québec) Comme il fallait s'y attendre, le gouvernement Charest a bloqué la motion de l'ADQ qui réclamait une enquête publique sur l'industrie de la construction. Les enquêtes publiques, c'est toujours dangereux pour un gouvernement, surtout quand l'élément déclencheur, en l'occurrence l'administration du maire de Montréal, Gérald Tremblay, n'est pas loin du pouvoir. Et puis, sait-on jamais... Les entreprises soupçonnées de collusion ont-elles des liens avec le PLQ? Les entrepreneurs aiment ça, contribuer aux caisses électorales des partis politiques!
Le gouvernement attendra donc de voir ce qui ressort des enquêtes policières. Ça vous rappelle quelque chose... ou quelqu'un? «Laissons faire la police», disait Jean Chrétien dans le cas des commandites. «S'il y a des voleurs, qu'on les envoie en prison.» Jean Chrétien était un fin renard. Mais pas Paul Martin, qui a créé la commission Gomery, dont le travail a éclaboussé le Parti libéral.
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Jean Charest ne devrait pas être seul à se méfier d'une enquête publique sur la construction. Le PQ a été au pouvoir suffisamment longtemps pour avoir bénéficié de la générosité de certains entrepreneurs. Mais plus encore, le Parti québécois a des liens très étroits avec les milieux syndicaux, notamment avec la FTQ. Et puis il y a cette affaire, fort embarrassante, des Hells Angels et de l'élection du président de la FTQ construction. Vous pensez qu'on aime ça, à la FTQ, voir le PQ appuyer une demande d'enquête sur la construction?
C'est peut-être pour ça que Pauline Marois a d'abord demandé une enquête sur les «entreprises de construction». Elle ciblait l'administration du maire de Montréal, Gérald Tremblay, dont les accointances libérales sont connues, et elle aidait Louise Harel.
Une enquête sur les syndicats, c'est plus délicat. La FTQ a souvent contribué à l'organisation et au financement du PQ. Elle est demeurée neutre aux élections de 2003, mais elle est revenue au bercail en 2007. La centrale syndicale s'est abstenue d'appuyer la campagne nationale de Pauline Marois en 2008, mais ses conseils régionaux l'ont fait dans plusieurs régions, comme la Mauricie ou la Montérégie.
Les péquistes ont tout de même appuyé la motion de l'ADQ. Ils n'avaient guère le choix. Mais ils n'en sont pas les auteurs.
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Les enquêtes policières permettront de déterminer s'il y a lieu de porter des accusations au criminel. Si c'est le cas, les libéraux seront bien heureux d'en rester là. Mais si les enquêtes traînent en longueur et ne trouvent pas de coupables, les pressions pour une enquête publique deviendront intenables. Une telle enquête devient l'outil de dernier recours lorsqu'il est impossible de coincer les criminels. Le simple fait de braquer les caméras sur eux a pour effet de paralyser leurs activités et de nettoyer le système.
S'il y avait une enquête publique, la grande question portera sur la nature du mandat. Dans le cas de la commission Cliche, les commissaires Robert Cliche, Guy Chevrette et Brian Mulroney avaient pour mandat d'étudier «la liberté syndicale dans l'industrie de la construction». Même avec un mandat aussi restreint, ils étaient venus à un cheveu d'assigner le premier ministre Robert Bourassa à témoigner. C'est Jean Cournoyer qui s'était retrouvé sur le gril.
Quel serait le mandat d'une commission d'enquête en 2009? Il ne pourrait pas être limité aux entreprises de Montréal soupçonnées de collusion, et aux élections musclées au sein de la FTQ construction. Une fois le bras dans l'engrenage, c'est tout le corps qui y passerait, avec les dommages collatéraux que cela suppose.
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