Attentat de Québec

Tribune libre

NDLR

Afin de dissiper toute ambiguïté sur le fond de ces trois billets, je tiens à mentionner
que leur contenu représente le reflet de mes sentiments eu égard à l'assassinat de six innocentes victimes.

Je suis Québec

Ce qui semblait tenir de l’impossible est survenu chez nous, à Québec : un acte terroriste a fait six morts et huit blessés à la Grande mosquée de Québec le dimanche 29 janvier. Le terrorisme est maintenant en nos murs. Le doute a cédé sa place à la triste et implacable réalité. Après les nombreux attentats auxquels nous avons assisté impuissants dans notre salon, le terrorisme nous a rattrapés et frappés de plein fouet.

La Capitale nationale du Québec vient de s’ajouter à la liste noire des innombrables attentats terroristes qui se sont produits à travers le monde depuis des décennies. Dorénavant, nous vivrons dans la crainte et l’incertitude devant la présence du terrorisme entre nos murs.

À preuve ce témoin qui a désiré garder l’anonymat : «Mon père était à l’intérieur. Ils sont entrés après la prière, quand tout le monde discute ensemble. Certains avaient déjà quitté, mais il restait beaucoup de gens…C’est totalement gratuit. Tous ces gens-là n’avaient rien fait. Absolument rien. Des innocents. Jamais j’aurais pensé que ça nous arriverait ici à Québec. J’ai toujours senti que j’étais en sécurité, mais ce soir je me pose des questions.»

Aujourd’hui marque un épisode noir qui restera gravé dans la mémoire collective des Québécois. Aujourd’hui plus que jamais, « je suis Québec »!

Le revers de la radicalisation

Selon les informations des médias, le suspect de l’attentat de Québec, Alexandre Bissonnette, est un loup solitaire, un personnage renfermé et rejeté, une description qui répond à un besoin viscéral de poser un geste visant à attirer l’attention sur lui.

Néanmoins, une question se pose : pourquoi avoir choisi une tuerie aussi insensée sur des personnes innocentes en train de se recueillir dans leur temple? À mon sens, la réponse à cette question se retrouve en partie dans la couverture de certains médias qui, sans relâche, martèlent leur clientèle de propos islamophobes qui constituent un terreau propice à la radicalisation.

Tant et aussi longtemps que des Alexandre Bissonnette existeront et que certains médias entretiendront un discours prônant l’islamophobie, nous serons confrontés à des gestes barbares entrainant dans une mort atroce des hommes et des femmes victimes d’une propagande haineuse.

Place à la sérénité

S’il y a une leçon que la classe politique du Québec semble avoir retenue de l’attentat de Québec, c’est bien le climat de « sérénité » qui doit régner eu égard aux débats sur les accommodements et la neutralité religieuse de l’État. Un souhait partagé d’emblée par la communauté musulmane qui craint que le débat, qui doit reprendre bientôt à l’Assemblée nationale, ne dégénère en confrontation anti-islam.

À mes yeux, pour arriver à créer un tel climat de sérénité sur un sujet aussi délicat, voire explosif, il faudra que les députés, de tous partis confondus, évitent de tomber dans le piège malsain des « amalgames », tels le fait que tous les musulmans sont des radicaux ou, pire encore, des terroristes.

L’appui massif de la population du Québec et d’ailleurs au drame vécu par les musulmans ne doit surtout pas rester lettre morte. Il est temps de profiter des leçons de l’histoire et de porter bien haut la devise du Québec tout en gardant les esprits ouverts si nous souhaitons remettre le débat sur les rails de la nécessaire sérénité.

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Henri Marineau2093 articles

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Né dans le quartier Limoilou de Québec en 1947, Henri Marineau fait ses études classiques à l’Externat Classique Saint-Jean-Eudes entre 1959 et 1968. Il s’inscrit par la suite en linguistique à l’Université Laval où il obtient son baccalauréat et son diplôme de l’École Normale Supérieure en 1972. Cette année-là, il entre au Collège des Jésuites de Québec à titre de professeur de français et participe activement à la mise sur pied du Collège Saint-Charles-Garnier en 1984. Depuis lors, en plus de ses charges d’enseignement, M. Marineau occupe divers postes de responsabilités au sein de l’équipe du Collège Saint-Charles-Garnier entre autres, ceux de responsables des élèves, de directeur des services pédagogiques et de directeur général. Après une carrière de trente-et-un ans dans le monde de l’éducation, M. Marineau prend sa retraite en juin 2003. À partir de ce moment-là, il arpente la route des écritures qui le conduira sur des chemins aussi variés que la biographie, le roman, la satire, le théâtre, le conte, la poésie et la chronique. Pour en connaître davantage sur ses écrits, vous pouvez consulter son site personnel au www.henrimarineau.com





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6 commentaires

  • Pierre Grandchamp Répondre

    4 février 2017

    @ François Ricard
    A lire Antoine Robitaille: " Condamner l’«islamophobie», mais s’autoriser une «islamisto-phobie»: saine peur de l’islamisme? ".
    http://www.journaldemontreal.com/2017/02/04/la-motion-oubliee
    Je suis islamisto-phobe!

  • Henri Marineau Répondre

    3 février 2017

    Maintenant que les manifestations d’appui envers la communauté musulmane ont pris fin, qu’adviendra-t-il de tous ces témoignages d’amour et de sympathie lancés par la classe politique dirigeante? Une question qui, à mes yeux, mérite d’être posée compte tenu de la nature même de l’être humain qui a tendance à oublier vite et à « passer à autre chose ».
    En guise d’exercice, il suffit de se reporter le 28 janvier 2017, soit la veille de l’attentat de Québec, pour se rappeler les événements de vandalisme qui ont été les cibles des différentes mosquées du Québec au cours de la dernière année pour se demander si le mouvement d’intégration de la société musulmane aux Québécois se réalisera ou deviendra un vœu pieux.
    Sans verser dans un pessimisme chronique, ni même douter de la sincérité de nos chefs politiques, je suis d’avis que les risques de « rechute », à savoir une propension à l’islamophobie, demeurent toujours latents, particulièrement lorsqu’arrivera la prochaine campagne électorale où les vieux tabous envers la société musulmane risquent de ressurgir!

  • Henri Marineau Répondre

    3 février 2017

    De nombreuses hypothèses ont été émises sur les motifs ayant conduit Alexandre Bissonnette à commettre l’irréparable. Parmi celles-ci, il m’apparaît que nous ne pouvons pas passer sous silence l’influence exercée par les médias sociaux et les quelques stations radiophoniques de « poubelle » de Québec qui font leurs choux gras d’une propension à clamer haut et fort les « vertus » d’une islamophobie pernicieuse.
    En écoutant le député fédéral de la circonscription de Louis-Hébert, Joël Lightbound, demander pardon aux musulmans pour «la haine dont ils sont victimes», je n’ai pu m’empêcher de faire le lien entre l’attentat de Québec et la pluie d’amalgames qui déferlent à un rythme insensé dans certains médias, le plus pervers consistant à cataloguer tous les musulmans comme des radicaux, ou pire encore, comme des terroristes.
    Tant et aussi longtemps que nous assisterons à ce déferlement malsain dans ces médias de bas étage, ces derniers contribueront à semer une haine sordide dans le terreau fertile de certains de leurs auditeurs et lecteurs…Vivement un éveil collectif de la société québécoise qui doit dénoncer haut fort ces amalgames grotesques dont ont été victimes les innocents de l'attentat de Québec!

  • François Ricard Répondre

    3 février 2017

    Je suis islamophobe. Comme je suis christianophobe, comme je suis judaiphobe. En fait, je suis religiophobe. Les religions sont des idéologies. Et comme toutes les idéologies, on peut soit les craindre et les repousser ou bien les aimer. La libre expression démocratique nous permet de faire l'un ou l'autre.
    La majorité des Québécois a rejeté le christianisme, du moins dans sa manifestation ostentatoire. Et aujourd'hui on leur demanderait de devenir islamophiles? Pour quelles raisons? Pour être un peu moins québécois et un peu plus autre chose?
    Les adeptes du multiculturalisme, sans s’en rendre compte, veulent voir les musulmans évoluer dans un monde à part, avec des lois d’exception, des accommodements qui les distancient de la société ambiente. Pareille politique, plutôt que de favoriser les échanges interculturelles, encourage plutôt les replis identitaires.
    Les Québécois sont généreux. Les Québécois sont accueillants. C'est avec des bras bien ouverts qu'ils veulent recevoir de nouveaux concitoyens qui ont la volonté de devenir des Québécois à part entière.
    Et non des gens d'ailleurs qui vivent au Québec.

  • Pierre-Yves Dubreuil Répondre

    2 février 2017

    j'ai tendance à croire qu'ironiquement, l'attentat recèle exactement le même motif que ceux des islamistes qui ont eut lieu un peu partout récemment:
    Il s'agit d'un déséquilibré (évidemment) qui s'est senti rejeté par son entourage, immédiat ou non, et qui a cherché à se valoriser à travers un acte ''bravoure'' pour une cause qu'il croit juste. Il cherchait à être un héros, un martyr.
    Évidemment que l’antinationalisme (une forme naturelle de protection de la collectivité) dans toutes ses formes, comme politique nationale actuelle, tend à désorienter directement ou indirectement bien des gens.
    Donc pour ceux qui pensent qu'une forme de statut quo, d'abandon de leadership public, de modèles...que le dialogue sous une rectitude politique arrangera les choses....
    À méditer!

  • Archives de Vigile Répondre

    2 février 2017

    Si il y a une perssone de laquelle je souhaitais une réaction, c'est bien vous M. Marineau. Vous ne m'avez pas décu. Merci pour vos très sages paroles.
    Michel Lauzon, Montreal.