Agnès Maltais se fiche de Movembre parce que féministe ?

Tribune libre

C'est malheureusement la question qu'il faut se poser à la suite d'une lettre mise en ligne sur Facebook par Guy Boivin, porte-parole du tiers-parti politique Équipe autonomiste, dont le programme consacre son quatrième article à la défense de la condition masculine. Faut-il souligner que cette réalité sans cesse balayée sous le tapis a bien besoin de se voir reconnue au Québec, où hommes et garçons sont devenus, au fil des ans et sous l'égide du féminisme d'État, des citoyens de second plan ? Voici la missive en question, adressée à nulle autre que la première ministre du Québec, Pauline Marois :
Bonjour madame Marois!
Il me fallait, sans faute, vous aviser de certaines dérogations du moins d'une de vos ministres. En effet, j'ai appris, par les coulisses, que madame Agnès Maltais aurait éconduit le groupe Movembre en leur répliquant: «Qu'elle n'avait rien contre eux car elle est elle-même lesbienne, mais que féministe, elle ne donnerait sûrement pas suite à une de leur demande.» Vous n'êtes pas sans savoir que le groupe Movembre est un groupe de défense des droits des hommes et qu'Équipe autonomiste a encouragé la promotion de la Journée internationale des hommes, le 19 novembre dernier.
Ce n'est que du ouï-dire mais je tenais à vous demander de rappeler à vos ministres qu'ils sont là pour représenter tout le monde et pas seulement certains groupes au détriment d'autres. Donc il vous faut défendre les droits des femmes comme ceux des hommes malgré l'incitation actuelle inverse, vu des organismes comme le Conseil du statut de la femme, le ministère de la Condition féminine, défrayés aussi par les hommes; les droits des entrepreneurs versus ceux des écologistes, etc. Je me surprends moi-même de ces histoires mais je demeure confiant en votre bon jugement et que vous saurez rappeler à l'ordre nos élus.
Espérant le tout à votre entière satisfaction, je vous adresse, madame Marois, mes salutations sincères.
Guy Boivin
Des clarifications s'imposent.
Guy Boivin se montre prudent dans son approche en évitant d'accuser sans réserve une ministre selon ce qu'il convient lui-même d'appeler des ouï-dire. Par contre, il aurait certainement été préférable, à moins que la démarche ait été tentée sans être rendue publique, que le porte-parole d'ÉA demande d'abord à Mme Maltais de clarifier son point de vue sur le litige invoqué avant de s'adresser à la première ministre du Québec. Même devant un refus de la ministre du Travail de s'expliquer, M Boivin aurait alors été tout à fait légitimé d'interpeller Pauline Marois et de lui demander d'intervenir afin de reconnaître la légitimité évidente et essentielle d'une initiative comme Movembre, quitte à remettre l'une des ses ministres à sa place.
Lesbianisme et Movembre, quel rapport ?
Si Mme Maltais s'est vraiment exprimée envers des représentants de Movembre comme on l'a rapporté à M Boivin, il y a de quoi se poser d'urgentes questions sur ses motivations comme sur son argumentaire. Les unes comme l'autre ne pècheraient pas alors par excès de pertinence...
En quoi, par exemple, le fait d'être lesbienne devrait-il inciter Mme Maltais à n'avoir rien contre Movembre, ni rien pour, apparemment ? Où serait donc le rapport entre son orientation sexuelle et le cancer de la prostate ? Les hommes aux prises avec des problèmes de santé ou de détresse émotionnelle représenteraient-ils par ailleurs à ses yeux une minorité opprimée, au même titre que les personnes homosexuelles ?
Elle n'aurait pas tort du tout, mais l'homosexualité peut-elle de son point de vue se comparer à la maladie physique ou mentale ? Les gays et les lesbiennes devraient-ils être envisagés comme des gens qu'il faille guérir de leur déviance ? N'est-ce pas contre ces perceptions que le mouvement de défense des homosexuels lutte depuis des années ? L'homosexualité, vécue par une minorité, est une réalité que rien ne peut changer. La maladie, physique ou mentale, doit être soignée, éradiquée, dans la mesure du possible.
Franchement, Mme Maltais, si vous avez tenu de tels propos, il faudrait clarifier vos positions, car vous ne viendriez pas de vous mettre les pieds dans les plats - une habitude, au sein de votre parti - qu'envers Movembre, mais aussi envers une communauté à laquelle vous appartenez et dont vous vous réclamez. Faites-vous partie - vous aussi - du club des mal cités ?
Pour en revenir à Movembre, il est difficile de concevoir, alors qu'il est de plus en plus reconnu, chiffres gouvernementaux à l'appui, que les soins de santé et de services sociaux demeurent onze fois plus subventionnés pour les femmes que pour les hommes, qu'une ministre, fut-elle péquiste, refuse de soutenir une cause aussi louable vouée à la santé des hommes. Si Mme Maltais reconnaît implicitement, en les comparant à des lesbiennes, que les hommes en difficulté constituent une minorité opprimée, pourquoi ne pas faire preuve envers eux de la même générosité et du même humanisme qu'elle préconise envers ses semblables ? La cohérence constitue-t-elle un tel luxe pour elle ?
Non, parce que je suis féministe !
Le motif qui aurait par ailleurs été invoqué par Mme Maltais pour se dissocier de Movembre a de quoi faire sourciller : elle ne peut épouser cette cause, vouée à la reconnaissance des problèmes de santé masculins, dont le cancer de la prostate, parce qu'elle est féministe. Bref, quand on se réclame du féminisme, on se doit de se montrer insensible envers les hommes au point de faire preuve de la plus totale inhumanité envers ceux d'entre eux qui souffrent ! Étonnante façon d'envisager l'engagement envers la collectivité, quand on en repousse la moité en fonction de son sexe. Ceci, évidemment, si Mme Maltais a été citée correctement.
Parce qu'elle est féministe, et que Movembre se voit de plus en plus associé à la Journée internationale des hommes - certains diront récupéré par ses organisateurs - , faut-il également conclure que Mme Maltais refuse de reconnaître l'apport essentiel de ces derniers à leur collectivité ? Une telle position ne serait pas surprenante de la part d'un membre d'un parti politique reconnu pour son caractère soi-disant progressiste parce que féministe, mais dans les faits sexiste envers les hommes.
Le premier ministère de la condition féminine n'a-t-il pas été instauré sous le premier mandat du parti québécois avec, à sa tête, Lise Payette, dont la misandrie presque pathologique n'est plus à démontrer ? N'est-ce pas sous le PQ qu'a été mise en place l'inquisitoriale politique d'intervention en violence conjugale qui fait que, chaque année, près de 10 000 hommes sont arbitrairement arrêtés sur simple dénonciation de leur conjointe, puis relâchés, après un séjour de 24 heures en cellule ? Ces arrestations injustifiées ne surviennent-elles pas à la suite de signalements métamorphosés chaque année, par la malhonnêteté du ministère de la Sécurité publique, en agressions sanctionnées par un verdict ?
N'est-ce pas sous Pauline Marois, alors ministre de la Condition féminine, que le désormais célèbre mensonge à l'effet que 300 000 femmes étaient chroniquement battues au Québec a été commercialisé, dans les courant des années 80 ? Et que dire de Louise Harel, qui proclamait, alors qu'elle était elle aussi ministre de la Condition féminine, que les hommes étaient trop souvent mauvais payeurs de pensions, avant de se faire remettre à sa place par Georges Dupuy auteur de Coupable d'être un homme,qui révélait la statistique à l'effet que 90 % des pensions parvenaient sans problème aux ex-conjointes ?
L'heure juste, s'il vous plaît!
Comme nous ne pourrons jamais compter sur les médias pour clarifier les déclarations de Mme Maltais, dans l'éventualité où ils en auraient été informés, c'est à nous, citoyens et citoyennes du Québec engagés dans la nécessaire reconnaissance de la condition masculine, de demander des comptes à la ministre péquiste. Agnès Maltais détient une page Facebook. Ensemble, nous devons lui demander si elle a bel et bien éconduit la délégation de Movembre sans lui accorder son soutien et, dans l'affirmative ou le refus de Mme Maltais de s'expliquer, lui manifester notre plus vive réprobation avant de dénoncer ses positions à la première ministre du Québec, également présente dans Facebook.
C'est l'accumulation de semblables gestes citoyens qui finira par éroder l'indifférence étatique envers les hommes et les garçons du Québec et par faire progresser notre société vers une véritable égalité homme femme incluant, cette fois, le principe de réciprocité, en dehors des stéréotypes réducteurs.


Laissez un commentaire



4 commentaires

  • Olivier Kaestlé Répondre

    11 décembre 2012

    Je ne me donnerai pas la peine de disserter sur le flot d'arguments plus que contestables que vous me présentez, mon temps étant précieux. Parmi eux, le discours victimaire et débilitant du texte mis en lien par vous me semble si biodégradable et prévisible que je me dis que si vous y souscrivez sérieusement, je ne pourrai rien pour vous, et je n'ai pas une âme de sauveur. Je doute fort qu'une majorité parmi la population souscrive à de tels propos, et c'est bien ce qui inquiète visiblement les auteures.
    Enfin, invoquer la moustache de Movembre en opposition au lesbianisme de Mme Maltais, franchement, êtes-vous sérieux ?
    Quant à mon affirmation à l'effet que les garçons et les hommes du Québec sont des citoyens de seconde zone, je la maintiens devant ce petit détail appelé évidence : un système scolaire sur mesure pour les filles, incluant des programmes universitaires de discrimination positive et des bourses d'études pour filles seulement; dans la fonction publique provinciale, des programmes du genre ont fait que maintenant, la fonction publique provinciale est à plus de 60 % féminine, et les initiatives de discrimination positive sont toujours en vigueur; les hommes représentent l'écrasante majorité des itinérants et regroupent plus de chômeurs et d'assistés sociaux que les femmes; les soins de santé et de services sociaux restent 11 fois moins financés pour les hommes que pour les femmes; toujours aucune maison d'hébergement pour les hommes et leurs enfants, malgré les avertissements répétés d'intervenants sociaux; la justice familiale, en cas de conflit pour la garde des enfants, attribue cette dernière aux mères dans 80 % des cas, les hommes constituant 95 % des payeurs de pensions alors que le revenu moyen des femmes représente désormais 86 % de celui des hommes (et encore, le temps partiel est très populaire chez elles par choix), nous apprend Statistique Canada; les hommes cumulent plus de 80 % des suicides et le Québec affiche l'un des taux les plus élevés au monde. Si avec ça, vous n'avez toujours pas de pistes de réflexion à l'effet que les hommes et les garçons du Québec sont désavantagés en regard des femmes et des filles, c'est que vous aurez décidé de jouer à l'autruche.

  • Élie Presseault Répondre

    10 décembre 2012

    @ Olivier Kaetslé,
    Une guerre à l’information nécessite de tenir compte de certains critères de proximité avec l’auditoire afin de le sensibiliser à ce qui le concerne immédiatement. Parler d’islam politique qui se passe dans un autre pays outre-Atlantique nécessite beaucoup plus d’efforts de persuasion. En conséquent, je n’adhérai pas à votre assertion selon laquelle nous parlons d’imposteurs qui dénoncent les «bedaines de bière». Bien sûr, je déforme ce que vous venez de dire.
    Puisque vous dénoncez l’attitude d’Agnès Maltais, je dénoncerai la propension et/ou le biais que vous avez de laisser entendre que : «hommes et garçons sont devenus, au fil des ans et sous l’égide du féminisme d’État, des citoyens de second plan ?».
    Je vous invite à relire certains passages du texte cité en lien plus haut :
    «Les médias ont si bien invisibilisé les injustices et la discrimination que subissent les femmes à cause de leur sexe qu'une partie importante de la population est persuadée que nous avons atteint l'égalité... même que le féminisme serait allé trop loin! Pourtant, une campagne de promotion de la domination des hommes sur les femmes n'a rien d'égalitaire et nous rappelle que le féminisme est, plus que jamais, nécessaire.»
    Agnès Maltais se dit lesbienne et revendique son statut de féministe. Quant à savoir : «Où serait donc le rapport entre son orientation sexuelle et le cancer de la prostate ?»… Pourriez-vous me répondre, quant à vous, quel est le rapport entre la moustache et le cancer de la prostate? Il n’y en a pas à ce que je sache. Vous n’êtes pas blanc comme neige quand vous citez «la détresse émotionnelle» et «la maladie mentale» pour décrire ce qui relèverait de la condition masculine. Vous passez sur le mode de la contre-attaque pour laisser sous-entendre que «les hommes en difficulté constituent une minorité opprimée».
    Je vous invite à reprendre un passage du texte de MamZelle Tourmente que voici :
    «Ainsi, utilisant la symbolique du pouvoir masculin, le groupe à l'origine des Movembers à travers le monde travaille à renforcer le genre sexuel – que l'on appelle à tort la masculinité et que l'on traite comme s'il s'agissait d'une essence distincte de la féminité, son opposée – creusant à la fois le gouffre des différences sexuelles et travaillant à rétablir les ségrégations de sexe et l'exclusion des femmes ainsi que la négation d'hommes autres (différents) que ceux répondant aux critères de virilité.»
    Touche à ma moustache et pas à ma prostate… j’exagère à peine. Il est tout de même spécieux que Movember se soit révélé aux lendemains du cancer de la prostate contracté par Moustache Layton. Oui, c’est un bon jack, mais… un deuil, vraiment... ;) À voir comment les gars réagissent quand on chatouille un tant soit peu le début d’une moustache… Oui, je suis un gars et pis… des fois, je nous regarde… ;)
    Reprenons un autre passage soi-disant paranoïaque :
    «Dans la population, la conséquence directe de la propagande médiatique est une adhésion complète doublée d'un sentiment de culpabilité envers les hommes que l'on aurait oubliés pendant qu'on travaillait à des levées de fonds pour la recherche contre le cancer du sein... comme si chaque action vers une cause liée à un sexe était une inaction et même un dommage envers l'autre sexe! Cette attitude résonne avec l'idée que l'homme est l'Homme, c'est-à-dire le référent général en matière de genre humain, tandis que la femme en est une expression spécifique, une catégorie à part. Par conséquent, les causes des femmes ne rejoignent pas le genre humain tandis que celles des hommes devraient d'emblée toucher tout le monde.»
    Je suis d’accord pour financer la recherche sur le cancer de la prostate… Par contre, quand nous lisons ceci :
    «Bien sûr, l'idée d'un concours auquel presque tous les hommes peuvent participer, devenant ainsi des symboles publicitaires ambulants et, on espère, des cueilleurs de fonds pour la cause, est une idée géniale. Toutefois, la position masculiniste et antiféministe à l'origine du mouvement, le choix du symbole, la valorisation de la virilité qui prennent le pas sur la levée de fonds et l'exclusion des personnes non-viriles sont très inquiétantes.»
    Ce qui est d’autant plus inquiétant, c’est cette propension à gommer la nécessité des luttes féministes et leur opposer une condition masculine qui, mise sur un pied d’égalité, saurait peut-être tirer son épingle du jeu. Il nous faut cheminer tout de même dans le sens où nous devons cesser de dénier le droit d’autrui à mener une cause de front. À mon sens, Movember est très superficiel dans la mesure où il ne parle pas de condition masculine sauf pour souligner la différence apparente entre hommes et femmes et qui plus est, un critère de pilosité foncée… heu heu. Pertinence…?

  • Olivier Kaestlé Répondre

    9 décembre 2012

    Bonjour, M Presseault.
    Ne le prenez pas mal, mais j'avais déjà lu le torchon paranoïaque de désinformation féministe que vous avez mis en lien. Je ne me donnerai même pas la peine de le commenter, de le contester ni de l'analyser.
    Un tel document reste à mes yeux aussi pertient que les habituelles ritournelles féministes radicales sur le complot patriarcal international, le plafond de verre, le mur invisible, le syndrome de la femme battue, les statistiques dopées sur la violence conjugales où le ministère de la Sécurité s'obstine à faire passer de signalements pour des agressions sanctionnées par des verdicts, sans compter les agressions sexuelles regroupant des "délits" aussi graves que regards insistants, sifflements dans la rue et plaisanteries grivoises.
    Toutes ce jérémiades primaires ne font que nuire à la cause des femmes, surtout celles aux prises avec des civilisations rétrogrades dominée par l'islam politique qui réclameraient une attention prioritaire d'imposteures qui préfèrent se scandaliser de pubs de bière.
    Pour ce qui est de l'attitude de Mme Maltais, si elle a bel et bien tenu les propos qu'on lui prête, il s'agirait alors d'un comportement rétrograde, misandre et même stupide. À bon entendeur, salut.

  • Élie Presseault Répondre

    9 décembre 2012

    M. Kaestlé, @ tout le monde,
    Tout d'abord, la défense politique d'un dossier peut s'avérer parfois comme relevant de l'art de marcher sur des oeufs. Tout ce que nous pourrons dire du mouvement de Movember relève d'une nécessité de remettre en question son propre regard à tout moment.
    Pour ma part, une telle réflexion m'amène à une posture de caution à l'égard du mouvement, bien que semblant louable sous certains aspects...
    http://mamzelltourmente.blogspot.ch/2012/11/se-mefier-du-movember-regard-critique.html?spref=tw