À Service Canada, on demande d’éviter les mots monsieur ou madame; père ou mère

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Décadence morale : la binarité sexuelle remise en cause par l'État post-national canadien

Les employés de première ligne de Service Canada doivent dorénavant privilégier un langage de genre neutre dans leur communication avec le public, une initiative qui a fait bondir l’opposition mercredi.


Une note de service invite les fonctionnaires à éviter notamment l’emploi des mots mère et père au profit du terme générique parent. On suggère aussi d’utiliser les noms et prénoms à la place des traditionnels monsieur ou madame.


«Nous vous demandons, personnel de première ligne, d’utiliser un langage neutre au niveau du genre», peut-on lire dans la note de service.


L’opposition n’a pas tardé à décrier la nouvelle approche. «C’est ridicule en ce moment où on s’en va. Est-ce qu’on va se mettre à dire aux gens qu’on abolit la fête des mères et la fête des pères? Je pense qu’on s’en va sur un terrain extrêmement dangereux», a déploré le député conservateur Alain Rayes.


Selon le député du Groupe parlementaire québécois, Rhéal Fortin, les libéraux exagèrent en voulant encore tout «dégenrer». «Je pense qu’on est en train de devenir fous. Il y a des problèmes pas mal plus urgents au sein de ce gouvernement-là», a affirmé l’ancien bloquiste, rappelant l’épisode où Justin Trudeau avait suggéré à la blague de remplace «mankind» par «peoplekind».


Confusion au gouvernement


La nouvelle directive a semblé prendre le gouvernement par surprise mercredi matin. «Je viens juste de l’apprendre. On va regarder ça», a commenté le premier ministre Justin Trudeau à son arrivée au caucus libéral.


«On vient de me parler de ça il y a à peine quelques minutes. Très honnêtement, je ne saurais pas quoi vous répondre», a indiqué pour sa part la ministre du Revenu national, Diane Lebouthillier, précisant que la mesure n’était pas en vigueur à l’Agence du revenu.


Le cabinet du ministre fédéral responsable de Service Canada, Jean-Yves Duclos, a indiqué que la mesure préparée par les fonctionnaires n’était pas claire et qu’elle semblait aller trop loin. Le ministre favoriserait une approche moins drastique, qui établirait d’entrée de jeu, par une simple question, la façon dont un citoyen souhaite qu’on s’adresse à lui, selon son attachée de presse Émilie Gauduchon.


«Soyons clairs, Monsieur/Madame continuera à être utilisé par @ServiceCanada_F Nous vérifions simplement comment les gens souhaitent qu’on s’adresse à eux. C’est une question de respect», a écrit sur Twitter le ministre Duclos, se disant fier que Service Canada reconnaisse la diversité.


La directive a été élaborée à la suite de cas de citoyens qui se sont plaints, notamment celui d’un couple de pères en Nouvelle-Écosse dont un des membres s’était fait demander de fournir son «nom de jeune fille» sur un formulaire.


«Certainement, ça ne correspond pas aux valeurs et aux conditions qui prévalent au Canada en 2018», avait alors déclaré le ministre Duclos.


Mesures sur le genre


Dans une volonté de «favoriser l’égalité des genres», le gouvernement fédéral a autorisé en août dernier la mention X sur les documents d'identité des personnes ne s'identifiant ni au sexe féminin ni au sexe masculin.


«En introduisant une désignation de sexe “X” dans les documents délivrés par le gouvernement, nous prenons une mesure importante pour favoriser l’égalité pour tous les Canadiens, quelle que soit leur identité ou leur expression sexuelles», avait fait savoir le ministre de l'Immigration, des réfugiés et de la citoyenneté Ahmed Hussen.


Rappelons que la loi sur l’identité de genre et expression de genre a également reçu la sanction royale, le 19 juin dernier. Elle vise à ce que «les personnes transgenres et autres personnes de genres divers puissent s’épanouir selon leur identité de genre et leur expression de genre, en les protégeant explicitement contre la discrimination, la propagande haineuse et les crimes haineux.