Lucien Bouchard, le Conseil Privé et le référendum de 1995
14 février 2011
@ Christian Montmarquette,
Là où nous nous rejoignons, j'en ai déjà fait mention dans un précédent commentaire, n'est pas tant dans la question gauche/droite mais bien dans notre passion commune pour une réelle démocratie au Québec.
Celle du peuple par le peuple et pour le peuple. En cela, contrairement au flou politique désespérément entretenu par l'élite péquisto-bloquiste, Québec solidaire
sait se faire plus transparent , autant dans la méthode d'accession que dans le sens à donner à la cause qui nous est chère, celle de l'indépendance du Québec.
Nous en avons une preuve, entre autres, dans cette lettre de Françoise David adressée aux trente jeunes souverainistes du Parti québécois, signataires d'un manifeste réaffirmant leur
appui à leur cheffe, Pauline Marois. Pour l'essentiel, Françoise David y posait des questions fondamentales quant à la nature à donner à cette indépendance.
Je cite Madame David :
« Un pays pour quoi? Un pays comment? À quoi ressemblerait-il sur le plan des institutions démocratiques et des valeurs communes? »
Source :
http://www.ledevoir.com/politique/quebec/310496/lettre-aux-jeunes-souverainistes
Lors des référendums de 1980 et de 1995, ce type de questionnement était reconnu comme douteux, voire sacrilège car il induisait un doute quant aux véritables intentions
du Pq de René Lévesque et de Jacques Parizeau en ce qui concerne la bonne marche vers le pays dont nous rêvions. Il allait donc de soi qu'un seul vote pour la souveraineté
nous ouvrait toutes grandes les portes vers la liberté sans autre procès. Voter OUI c'était donner toute notre confiance, toute la latitude nécessaire au parti qui avait initié ces deux consultations populaires.
Or, le Pq actuel devra comprendre qu'avec la démocratisation du savoir ( notamment Internet ); la facilité d'accès à l'information alternative et à sa grande et rapide diffusion,
tout exercice démocratique s'en trouve nécessairement reconsidéré, scruté à la loupe par quiconque s'y intéresse, peu importe son expertise. À plus forte raison, un référendum sur l'indépendance
d'un État. Le Pq-Marois croit-il vraiment qu'il peut renouveler l'expérience référendaire, calquée sur celles de 80 et 95, et que nous resterons les yeux fermés, sans questionnement sur la nature du projet de ce pays à venir ?!
C'est à se demander si l'« indépendance » que nous propose le parti de Pauline Marois n'en est pas une semblable aux « indépendances » accordées aux pays africains de l'époque de la grande décolonisation ?!
Nous voyons aujourd'hui de quels « indépendances » il s'agissait. L'exemple du Congo représentant l'exemple terrifiant de ce cadeau empoissonné !
Exagération me rétorquera l'élite péquiste. Mais à peine , lui répondrais-je à l'aune de ce qu'un Bernard Landry nous annonçait, mine de rien, dans une vidéo où il en appelait à « à la nécessité et l'urgence de faire l'indépendance » :
http://www.dailymotion.com/video/xfhux3_necessite-et-urgence-de-faire-l-independance-du-quebec_news
Or, à environ la 10ème minute de la vidéo, M. Landry nous annonce que le Québec indépendant fera partie des grandes instituions mondiales comme l'OMC et le FMI.
Tiens donc ! Mais d'où prend-il cette certitude ? Le silence de plomb qu'entretient le Pq, depuis sa fondation voilà quarante ans, quant à l'orientation économique, sociale et politique, du régime politique d'un Québec indépendant ne présage rien qui vaille pour la suite des choses. L'indépendance des nations en ce début du 21e siècle ne sera plus abordée comme dans les années précédentes. En cela, les soulèvements populaires en Tunisie et en Égypte, où les deux peuples respectifs en appellent à une DEUXIÈME indépendance, préfigurent un changement de paradigme de la démocratie, la vraie, celle des peuples et non des élites financières et politiques. Et une indépendance digne de ce nom ne peut s'incarner que par une Constitution rédigée par une Assemblée constituante à laquelle les membres seront élus au suffrage universel et dont la classe politique sera écartée. Car une véritable constitution doit être appréhendée comme un contre-pouvoir. C'est elle qui limite la toute puissance que s'octroient trop facilement les élus sur les citoyens.
En cela, oui, Québec solidaire a ce soucis d'une authentique démocratie mais, encore là, un parti politique ne peut s'arroger le droit de faire de cet exercice fondamental une promesse électorale, dépendant du destin d'un parti politique. Comme l'explique l'ancien député socialiste et philosophe, André Bellon à propos de cette même promesse faite par le co-président de la gauche actuelle et candidat à la présidentielle en 2012, Jean-Luc Mélenchhon aux citoyens français :
« La Constituante n'a pas à être confisquée par l'élection présidentielle. Elle ne peut être octroyée. Elle est la chose du peuple. »
http://www.rue89.com/2011/01/27/melenchon-et-la-constituante-renovation-ou-recuperation-187181?page=1
Ainsi donc, la réelle libération d'un peuple ne s'exprimerait-elle pas plutôt par les modalités de création de sa constitution que par une simple consultation populaire où la voix de ce peuple ne se résumera qu'à un OUI à l'aveuglette ?! En quoi cette dernière voie/voix est-elle synonyme de décolonisation et d'émancipation ?
Il faut quand même noter que le processus d'assemblée constituante ici n'est envisagée que par la gauche, autant en France qu'au Québec.
( Je suis désolée d'offrir une si longue réponse, autant au destinataire qu'à l'administration de « Vigile » et à son lectorat. )
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