Effet induit des sanctions contre Moscou, les entreprises européennes qui prendront part au projet de gazoduc entre la Russie et l'Allemagne seront dans le viseur de Washington, qui assure vouloir «protéger la sécurité énergétique de l'Europe».
«Comme beaucoup de gens le savent, nous nous opposons au projet Nord Stream 2, le gouvernement américain s'y oppose» : la porte-parole du département d'Etat américain Heather Nauert a rappelé lors d'une conférence de presse, le 20 mars, que Washington ferait tout ce qui est en son pouvoir pour faire capoter le projet russo-européen de gazoduc. Avec, en ligne de mire, les entreprises européennes, que les Etats-Unis menacent de sanctions si elles prennent part au projet.
Un mal pour un bien, selon Washington, qui assure chercher à protéger les intérêts de ses alliés européens. «Nous pensons que ce projet nuirait à la sécurité énergétique et à la stabilité globale de l'Europe. Cela fournirait à la Russie un nouveau moyen de pression sur les pays européens, particulièrement l'Ukraine», a ainsi lancé Heather Nauert.
Les entreprises européennes victimes des sanctions contre Moscou
Le gazoduc, qui doit relier la Russie à l'Allemagne en passant par la mer baltique, doit être construit par un joint venture entre le géant russe du gaz Gazprom et ses partenaires européens, à savoir le français Engie, l'autrichien OMV, les allemands Uniper et Wintershall ainsi que le néerlando-britannique Shell.
Mais, comme l'a souligné Heather Nauert, ces entreprises se retrouvent sous la menace américaine en raison des sanctions votées contre Moscou en juillet dernier, à travers le Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act (CAATSA). «Au département d'Etat, nous avons passé beaucoup de temps à discuter avec nos partenaires et nos alliés pour leur expliquer les ramifications du CAATSA et comment un individu, une entreprise ou un pays peut y contrevenir et s'exposer à des sanctions», a ainsi déclaré Heather Nauert.
Le CAATSA vise – entre autres – à sanctionner les activités de la Russie dans le domaine énergétique, et permet donc, selon Heather Nauert, de s'en prendre par ricochet aux entreprises qui travailleraient avec Moscou dans ce secteur.
Conscient du danger pour ses entreprises, Berlin était monté au créneau en juillet dernier, estimant que ces dispositions violaient le droit international et appelant Bruxelles à considérer des contre-mesures. Jean-Claude Juncker avait alors affirmé être prêt à défendre les intérêts économiques des européens face aux Etats-Unis, déclarant que des contres-mesures pourraient «être prises en quelques jours», sans toutefois passer à l'acte.