Un contrat de téléphonie «intéresse» le vérificateur

Scandales à Montréal - téléphonie

Le vérificateur général de la Ville de Montréal, Jacques Bergeron, a observé que Telus avait déposé des soumissions bien moins élevées que celles de son concurrent, ce qui lui aurait mis la puce à l'oreille. Photo: Ivanoh Demers, La Presse

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Denis Lessard - (Québec) Le vérificateur général de la Ville de Montréal, Jacques Bergeron, a décidé de mettre son nez dans le dossier du gigantesque contrat de téléphonie de la Ville qui a changé de mains au début de 2008.
Dans les derniers mois de l'administration de Frank Zampino à la tête du comité exécutif, Montréal avait changé de fournisseur pour ses communications téléphoniques, traditionnelles, pour les cellulaires ainsi que pour les échanges de données.
Les deux plus importants contrats à long terme, sur 10 et 7 ans, dépassaient les 80 millions. À la surprise générale, devant Bell qui assurait ces services depuis des années, Telus avait emporté la mise en déposant des soumissions presque deux fois moins élevées que son compétiteur qui était déjà en place.
C'est ce constat qui a allumé un clignotant rouge sur le tableau de bord du vérificateur, qui a «un intérêt certain» à clarifier ce qui s'est passé dans l'attribution de ce mégacontrat, a appris La Presse. «Quand le vérificateur dit qu'il est "intéressé", cela se transforme généralement en vérification en bonne et due forme», a-t-on expliqué à l'hôtel de ville.
Plusieurs sources dans l'administration montréalaise constatent que la «migration» promise d'un système à l'autre a plusieurs mois de retard, parce que le fournisseur éprouve des problèmes importants. La situation est si problématique qu'on a dû lancer un appel au secours à Bell pour qu'il vienne appuyer son compétiteur - un coup de pouce qui coûte une fortune. La Ville et Telus ne s'entendent pas, semble-t-il, sur qui épongera ces factures imprévues.
En janvier 2008, Telus Québec avait obtenu le mandat de fournir des services de téléphonie IP à plus de 300 bureaux administratifs de la Ville de Montréal répartis dans toute l'Île, comptant en tout près de 17 000 postes téléphoniques.
Montréal voulait officiellement uniformiser et simplifier des structures disparates. En 2003, la Ville avait décidé de renouveler le contrat avec Bell, afin d'assurer plus de fiabilité durant la phase des fusions municipales.
Du «simple au double»
Le vérificateur Bergeron a déjà, a-t-on indiqué, fait colliger des informations sur les dérapages prévisibles de cette opération. L'hôtel de ville bourdonne de rumeurs sur l'attribution de ce mandat important. On se demande si Telus avait en main tout l'inventaire des services à assurer quand il a déposé sa soumission.
Car l'intérêt du vérificateur a été suscité, a-t-on indiqué, quand son bureau a observé que Telus avait déposé des soumissions bien moins élevées que son compétiteur, «du simple au double», a confié un élu d'Union Montréal.
Telus avait puissamment appuyé un projet du maire Tremblay, en finançant pour 1 million la Société de verdissement de Montréal, de 2007 à 2009.
Dans les dossiers des compteurs d'eau et de la Société d'habitation et de développement de Montréal, c'est l'administration Tremblay qui avait, après de longues semaines de révélations dans les médias, demandé des enquêtes à son vérificateur. Le contrat de 356 millions pour les compteurs d'eau a été stoppé par l'administration durant la campagne électorale. Les constats du vérificateur sur l'administration de la SHDM ont été remis directement à la Sûreté du Québec.
Dans le dossier de la téléphonie, l'administration est restée muette.
À l'ouverture des appels d'offres, pour la téléphonie filaire, Telus avait fait une proposition de 35 millions, Bell n'avait pu faire mieux que 47 millions alors qu'il était sur place depuis des années et qu'il était, par conséquent, le plus à même d'évaluer précisément les coûts du projet.
En ce qui a trait aux échanges de données, Telus a proposé une soumission à 47 millions, Bell n'a pu rivaliser, avec 83 millions. Encore une fois, une marge étonnante séparait les deux firmes, confient des gens proches du dossier.
Dans la téléphonie cellulaire, c'est cette fois Bell qui l'a emporté, avec une soumission de 7 millions plus que deux fois moins élevée que les 15 millions réclamés par Telus.
Tous ces prix pouvaient être revus à la hausse, de 20%, pour des contingences. Avec ces suppléments, le contrat de Telus frôle désormais les 100 millions.


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