Retard du pont Champlain : « Il y aura des conséquences » pour le constructeur, dit Ottawa

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La mafia de l'asphalte dirige les chantiers de construction du Québec

Les pénalités prévues au contrat qui lie le gouvernement fédéral au consortium Signature sur le Saint-Laurent seront imposées, a confirmé jeudi matin François-Philippe Champagne, ministre responsable du nouveau pont Champlain.


« Quand il y a un retard, il y a des conséquences », a-t-il répété, après avoir confirmé le délais de livraison du pont, actuellement en chantier entre Montréal et Brossard.


Le ministre de l’Infrastructure et des Collectivités a ainsi confirmé la nouvelle dévoilée mercredi par Radio-Canada à l’effet que le pont pourrait ne pas être livré avant juin 2019.


Selon le contrat, des pénalités de 100 000 $ par jour peuvent être imposées pendant les sept premiers jours de retard. Elles passent ensuite à 400 000 $ par jour, jusqu’à concurrence de 150 millions de dollars.


Il est encore toutefois trop tôt pour déterminer la date précise à laquelle les pénalités commenceront à s’accumuler, a précisé M. Champagne, considérant qu’il « y a certains délais qu’on appelle excusables » prévus au contrat.


Le pont Samuel-de-Champlain – ce sera son nouveau nom – devait être livré et ouvert à la circulation permanente dès le 21 décembre 2018. Des retards ont été accumulés au cours des trois dernières années et demie de construction, notamment lors d’une grève des grutiers l’été dernier.


François-Philippe Champagne a précisé que la structure du pont sera terminée comme prévu le 21 décembre. Toutefois, les travaux de « finition » doivent attendre le retour du beau temps au printemps, puisqu’ils ne peuvent être effectués en hiver.


Ainsi, l’asphaltage et l’imperméabilisation du tablier sont tributaires d’un certain niveau d’humidité et de température, a expliqué le ministre. « Il n’y a personne qui asphalte la cour d’entrée en janvier, les gens comprennent ça », a-t-il dit.


M. Champagne n’a pu donner de date précise quant à l’ouverture du pont à la circulation, celle-ci étant dépendante du moment où la météo permettra la tenue des travaux.


En entrevue sur ICI RDI, le directeur de la coordination au consortium Signature sur le Saint-Laurent Daniel Genest, a précisé qu’il faut une température supérieure à zéro degré Celsius pour poser la membrane imperméable qui protège les dalles et le tablier en béton.



Plus on rentre dans le creux de l’automne, plus difficile que c’est de faire ce type d’opération là.


Daniel Genest, directeur de la coordination au consortium Signature sur le Saint-Laurent


Selon M. Genest, une première portion de 500 m du pont a été imperméabilisée et a reçu une première couche d’asphalte, sur les deux qu’elle doit contenir. Une telle opération nécessite cinq jours de travail. Or, il reste 13 portions de 500 m à préparer, et les fenêtres de beaux temps de cinq jours consécutifs se font plus rares, dit-il.


L’ancien pont sécuritaire, confirme le ministre


Le maintien de l’actuel pont Champlain engendrera des dépenses supplémentaires de l’ordre de 10 millions de dollars, a par ailleurs confirmé le ministre Champagne.


« C’est un pont sécuritaire, monitoré (sic) en temps réel », a-t-il indiqué, précisant que « les gens doivent avoir confiance ».


« Il faut comprendre que 60 millions d’usagers passent sur ce pont chaque année. On parle de plus de 20 milliards (de dollars) de marchandises. C’était un investissement nécessaire pour maintenir un accès névralgique », a dit M. Champagne.


La construction du nouveau pont Samuel-de-Champlain, d'une longueur de 3,4 km, est évaluée à 4,2 milliards de dollars. Quelque 1600 ouvriers y travaillent. Le pont est conçu pour avoir une durée de vie de 125 ans.


Le nouveau pont Champlain à côté de l'ancien.La livraison du nouveau pont Champlain est retardée de plusieurs mois. Photo : Radio-Canada/Radio-Canada


Réactions résilientes


Le Conseil du patronat du Québec (CPQ) ne s’offusque pas de ce retard. « Cette décision permettra de livrer de façon sécuritaire un chantier qui est crucial pour la vitalité économique de la métropole, dont le legs devra durer pendant plusieurs décennies », écrit-il, dans un communiqué transmis jeudi.


Il souligne en outre qu’« il importe de bien faire les choses » étant donné que le nouveau pont Champlain accueillera le Réseau express métropolitain (REM), un autre « projet stratégique pour l’économie du Québec et la mobilité des travailleurs ».


Mercredi, la mairesse de Montréal Valérie Plante avait déjà avoué « une certaine déception », tout en reconnaissant l'importance de « bien faire les choses ». « C’est un pont pour 125 ans, on ne va pas lésiner sur la finition », a-t-elle dit.


« On continue dans les entraves six mois de plus », a pour sa part réagi Jean-François Parenteau, maire de l’arrondissement de Verdun, qui comprend l’Ile des Sœurs, d’où part le pont.


Une rencontre est prévue sous peu avec les parties prenantes au dossier pour revoir les mesures de mitigation autour des accès du pont, explique M. Parenteau. « Il y a des choses qui vont être modifiées par rapport à l’aménagement qu’on a en ce moment », ajoute-t-il, précisant qu’il « faut absolument, dans un court délai, améliorer la situation pour les gens de l’Ile des Sœurs. »


« C’est sûr qu’on a hâte de sortir des travaux », ajoute M. Parenteau. Toutefois, « les gens de l’arrondissement ont eu une résilience incroyable, dit-il. Ils comprenaient que ce n’était pas un petit chantier. »



On se croise les doigts pour que ça perdure 125 ans.


Jean-François Parenteau, maire de Verdun