Résister aux culs serrés

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Le totalitarisme de la bien-pensance se radicalise

La semaine dernière, l’hebdomadaire français Le Point publiait un passionnant dossier sur la « tyrannie des susceptibles ».


Il présentait de manière convaincante notre société où ils sont de plus en plus nombreux à s’offusquer de tel discours ou de telle œuvre et qui, presque automatiquement, en appellent à son interdiction. Leur passion, c’est la censure. Leur fantasme, c’est de bâillonner ceux qui n’ont pas les mêmes aversions qu’eux.


Censure


On l’a encore vu avec Google tout récemment. En mettant à jour son emoji de salade, la célèbre compagnie a décidé d’en retirer l’œuf. Simple modification esthétique, répondrez-vous, sans trop vous inquiéter ? Erreur ! Terrible erreur. Il s’agissait plutôt de rendre la salade plus végane et plus inclusive.


En gros, il fallait se plier à un petit lobby souvent sectaire et fanatique, qui politise l’alimentation et parle des consommateurs de viande comme des barbares presque meurtriers. L’œuf faisait scandale : il représentait la corruption d’une salade par des matières animales. Comment ne pas voir là un puritanisme de l’assiette ?


Le véganisme vire rapidement à l’antihumanisme.


Certains diront, avec un air bon enfant, qu’il ne faut pas s’en faire pour un simple emoji. Il y a des limites à s’indigner pour pas grand-chose, ajouteront-ils. Pour eux, rien n’est jamais vraiment grave.


C’est le contraire ! Quand le moindre racoin de la vie quotidienne est scruté par des inquisiteurs idéologiques, c’est que vous subissez une surveillance généralisée. Faudra-t-il bannir du cinéma la viande, la cigarette, l’alcool ou le sexe, pour ne pas déplaire aux différentes ligues de vertu qui veulent moraliser la vie publique ? C’est le triomphe de la société aseptisée qui deviendra insignifiante à force d’être lisse.


Autre exemple : un métier se développe peu à peu dans le milieu de l’édition aux États-Unis : celui de « sensivity reader ». Leur mission : relire les manuscrits des auteurs pour s’assurer qu’ils ne tiennent pas des propos qui pourraient heurter les différentes minorités, qui par ailleurs se multiplient.


En d’autres temps, on révisait les ouvrages pour s’assurer qu’ils ne heurtent pas la morale sexuelle de l’Église, ou alors l’idéologie officielle des régimes communistes. En deux mots, on les censurait s’ils s’en éloignaient trop. Aujourd’hui, on réinvente la censure selon de nouveaux critères, mais c’est toujours de la censure. Ce qui est encore plus fou, c’est que cette censure vient souvent de l’université, qui devrait lutter contre elle.


Littérature


Pourrons-nous encore, dans quelques années, lire les classiques de la littérature sans que le livre soit recouvert d’une mise en garde, comme on ajoute des photos de poumons malades sur les paquets de cigarettes ? Attention, ne lisez pas ce livre de Michel Houellebecq, le haut comité du féminisme officiel l’a décrété sexiste ! Attention, ne regardez pas le film Excalibur, on y retrouve une conception trop genrée des rôles masculins et féminins ! Ne regardez pas Autant en emporte le vent, on y présente une version romantique du Sud des États-Unis. Attention, ne lisez pas ce poème de Baudelaire, il chante les joies de l’ivresse !


L’heure est venue de résister aux culs serrés.