Trop de couacs, d'erreurs et de reculades

Qui gouverne, Marois, ou les mandarins libéraux nommés par Charest?

Chronique de Pierre Godin


Il est courant qu’un nouveau gouvernement se mette les pieds dans le plat. Le manque de connaissance des dossiers, la précipitation, le désir de remplir ses promesses électorales, de montrer ses muscles, etc. Mais dans le cas du gouvernement Marois, champion toute catégorie en inepties et maladresses depuis ses tout premiers pas, il faut peut-être faire appel à une autre explication.
Formée d’une batterie de hauts fonctionnaires fédéralistes nommés par les libéraux, la machine gouvernementale en place depuis l’arrivée du PQ peut faire la pluie et le beau temps, pousser le nouveau gouvernement dans des culs-de-sac, lui donner de belles jambettes sans trop en avoir l’air, voire même lui glisser sournoisement à l’oreille des choix pouvant se révéler suicidaires. Surtout que ces mandarins ont affaire à de jeunes ministres idéalistes, inexpérimentés et souverainistes en plus, comme c’est le cas de plusieurs ministres nommés par Pauline Marois.
Bon, certains naïfs diront : tu exagères, bonhomme, car les hauts fonctionnaires n’ont pas de couleur politique. Ce sont des techniciens qui font la politique de leurs maîtres du moment, que ceux-ci soient libéraux ou péquistes. Ça, c’est rêver en couleur : les mandarins votent, eux aussi. Comme les journalistes. Ils ont leurs partis pris idéologiques. En plus de cacher au fond de leur poche des « I owe you » à l’endroit de l’ancien gouvernement auquel ils doivent leur carrière. Il est donc tentant, face au nouveau gouvernement, minoritaire en plus, et dont ils ne savent trop s’il sera encore au bâton dans quelques mois, de préserver la loyauté les liant aux idées et politiques du parti qui les a recrutés.
Quitte à faire trébucher à l’occasion cette bande de ministres néophytes péquistes emmêlés dans leurs pinceaux. La dernière bourde, toute fraîche encore, du ministre de la Culture, Maka Kotto, paraît à cet égard typique. À moins de faire appel à l’incompétence (si c’était là l’explication à retenir, le ministre de la Culture ne serait pas le seul dans son camp ! ), comment peut-on lancer une grande discussion sur le livre sans inviter à la table certains gros joueurs de l’édition québécoise, comme HMH, Leméac, Fides, pour ne citer que ceux-là ? Faisant plutôt une place très large à des majors étrangers, comme Costco, Walmart, Target et Apple. Incroyable, mais vrai. On croit rêver… Devant les cris d’orfraie, plus que justifiés, de nos éditeurs, auteurs et libraires, l’entourage du ministre eut beau bafouiller des excuses aussi ineptes que la décision, le mal était fait.
Comment ne pas s’interroger sur le processus de décision du gouvernement Marois, tributaire de l’influence des mandarins libéraux en place, à la lumière de tous ses couacs et de son rétropédalage gênant dans certains dossiers majeurs comme le français, la santé, l’école passerelle, les signes religieux, les redevances minières ? Sans parler de la politique abracadabrante et dilatoire de Martine Ouellet, la ministre superécolo responsable de la mise en valeur de notre pétrole et de notre gaz de schiste qui, s’il n’en tenait qu’à elle, ne démarrerait pas avant la saint glinglin ? Pourtant, et l’enfer de Lac Mégantic nous l’enseigne : il vaudrait mieux sortir de terre au plus vite notre gaz et notre pétrole plutôt que de les importer par train ou pipe-line de l’Alberta ou de Tombouctou.
Quel est au juste le rôle des conseillers « techniques » du gouvernement dans cette improvisation généralisée ? Sans pour autant donner l’absolution complète aux conseillers « politiques » peuplant les différents cabinets, ne peut-on pas, sans tomber dans la paranoïa, y voir aussi la main du mandarinat libéral ? Comme lors de cet autre incident bizarre où la ministre de l’Éducation, Marie Malavoy, confia à des hauts fonctionnaires de son ministère, ceux-là mêmes qui avaient élaboré sous les libéraux le programme d’enseignement de l’histoire tant décrié, le soin de former un nouveau comité chargé de revoir… ledit programme. C’était un peu comme si elle avait confié les clés du paradis à Lucifer !
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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    9 juillet 2013

    Peu importe l'étiquette politique, les politiciens sont tous redevables au Système.
    C'est pour cela que d'un parti à l'autre, les politiques se ressemblent. Il s'agit tout simplement d'une politique-Système.
    Malgré qu'il y ait plein de gens au pays qui n'ont pas un revenu suffisant pour une vie décente (je pense en particulier aux assistés sociaux à 600$ par mois) et malgré qu'au Québec dans les 30 dernières années, c'est dans les couches socio-économiques les plus défavorisées qu'il y a eu le plus de solitude et le moins d'enfants, et malgré que dans les 30 dernières années la base manufacturière du pays a été en grande partie déménagée dans des pays où la main-d'oeuvre est à bon marché, on a un exemple de ce qu'un politicien du Système pense de la situation au pays en regardant ce qu'a dit monsieur Toews lors de son discours de démission hier:
    «Je quitte la politique à un moment où je crois que notre pays est plus sensible aux besoins des victimes, en meilleure santé financière et plus sûr pour les citoyens canadiens des générations futures»
    http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-canadienne/201307/08/01-4668762-le-ministre-vic-toews-quitte-la-politique.php
    C'est que le Système est déconnecté des besoins des citoyens et seulement tourné vers les besoins du marché.

  • Archives de Vigile Répondre

    9 juillet 2013

    J'ai écrit ce matin assez à bonne heure une "Réplique à Pierre Godin, une tempête dans un verre d'eau". j'espère que Vigile va la publier. Cette réplique respecte toutes les règles de Vigile: pas d'attaques ad hominem et pas de vulgarité.
    Comme il était sept heures du matin, je me suis rappelé un adage que je vous cite d'abord en anglais et que je vous traduis.
    Early birds eat worms, the others follow the horse.
    Les oiseaux matinals mangent des vers, les autres suivent le cheval...et picorent le crottin :)
    robert barberis-gervais, 9 juillet 2013

  • Archives de Vigile Répondre

    9 juillet 2013

    Comme disait Président Truman..The Buck Stops Here.
    Madame Marois qui a été dans plusieurs ministères est la seule responsable des actions de son gouvernement.
    On fait chiant-culotte en masse, toujours blamer les autres. Quand est ce que nous allons être assé grands pour prendre nos responsabilités, bout de viarge !

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    9 juillet 2013

    M. Godin,
    « Pourtant, et l’enfer de Lac Mégantic nous l’enseigne : il vaudrait mieux sortir de terre au plus vite notre gaz et notre pétrole plutôt que de les importer par train ou pipe-line de l’Alberta ou de Tombouctou. »
    Ou mieux : "laisser dormir au plus profond de l’abîme les sources d’énergie fossile et pratiquer le principe : la meilleure énergie est celle qu’on n’utilise pas."
    Pour arrêter les olympiques de l’énergie, il faut faire la promotion des moyens moins énergivores. Pour les mettre en application, il faut affronter l’hydre de l’ÉCONOMIE combattant l’ÉCOLOGIE. Les pétrolières ont bloqué le moteur-roue, l’hydrogène, voire le moteur à l’eau. Elles font exploser des bombes pour se montrer essentielles : pipeline au lieu de convois rouillés. Répondons : pas pantoute!
    Quand le Gouvernement du Québec aura balancé ses mandarins anti-écolos, il pourra se gagner la solidarité de sa population devant l’électrification des transports et le relais des énergies sales à quelques fonctions dinosaures plus longues à dompter. Pour ces résidus de besoin, rien n’oblige à canadianiser les sources qui nous ont approvisionnés à moindre risque. On a bien réussi à bloquer le port méthanier en face de l’Île d’Orléans, berceau de la nation. La marche du jour de la terre, l’an passé, a fait capoter Lucien et son gaz de shale. Pauline doit respecter sa ministre des ressources plus naturelles que le voudraient ses conseillers de Sagard. Le moment est idéal pour sortir de terre, non pas de la marde noire, mais une république verte, modèle même pour Tombouctou, en ce début de XXIième siècle.

  • Marcel Haché Répondre

    9 juillet 2013

    Vous avez raison Pierre Godin. Lorsqu’Agnès Maltais a entamé son couplet sur les « coupures » à l’Aide Sociale, les « coupures » de l’ésotérique Françoise David, ce n’était pas le réaménagement plus que nécessaire des argents à l’intérieur des « mesures » d’employabilité qui était déplorable, c’était qu’Agnès Maltais reprenait à son compte et celui de tout le gouvernement Marois la cassette d’Emploi-Québec, dont elle était la ministre responsable.
    La cassette d’Emploi-Québec c’est la cassette de l’officine la plus fédéraliste de toute la fonction publique du Québec. C’est la cassette qui Nous explique que Nous avons des pénuries de main d’œuvre à profusion, la cassette payée par Nous pour Nous expliquer que Nous manquons de tout et, comme par hasard, Nous manquons aussi d’immigrants.
    Emploi-Québec, c’est l’officine la plus anti Québec de toute la fonction publique du Québec.
    C’est le discours feutré d’Emploi-Québec que Nous a tenu Agnès Maltais lors de ses « annonces ». Le savait-elle ? Je ne le pense pas. Elle ne voulait « perdre personne » à l’occasion de sa mini-réforme. Il m’avait semblé au contraire que la ministre en avait perdu un p’tit bout…
    Tout votre texte auquel je souscrits devrait inciter les indépendantistes à réaliser qu’un Redressement National pourrait s’exécuter à l’intérieur de l’État bien réel que Nous avons déjà, sans attendre la semaine des quatre jeudis non plus que la révolution que Nous suggère O.N. Autrement, l’Indépendance risque de devenir une affaire ésotérique, aussi ésotérique que la mini-réformette de l’Aide Sociale d’Agnès, et que l’opposition plus ésotérique encore de Françoise David.

  • Alain Maronani Répondre

    8 juillet 2013

    Vous pouvez toujours faire sortir de terre tout ce que vous voulez....en passant il parait peu probable que ce qui existe sous le sous-sol québécois puissent remplacer l'intégralité de ce que nous importons, en volume, type et qualité, mais c'est un autre débat....Relisez les cris d'horreurs de certains sur Vigile, le pétrole c'est sale, pas chez nous, nous sommes différents, etc...pour vérifier que ceci n'est meme pas sur...il semble pour ceux ci que l'on peut créér tout et n'importe quoi a partir de l'électricité...entropie connait pas.
    Le point que vous manquez totalement est le fait cruel que le transport ferroviaire est une prérogative exclusive du gouvernement fédéral et que Québec ou pas le trains vont continuer a circuler.
    Ce fait désagréable et dangereux, l'utilisation de bombes roulantes, est l'un des résultats de la campagne menée contre les pipelines, campagne soutenue par Vigile, entre autres, pour des raisons diverses...je vous laisse faire la liste.
    Ne manquait plus que Amir Khadir qui s'est présenté sur place, pour faire le malin, et a demandé que nous réduisions notre dépendance au pétrole, il a raison sur ce point, mais surement pas sur les alternatives...
    Il oublie simplement que sans pétrole il n'y a pas de techniques modernes de médecine, que la plupart des médicaments n'existeraient pas, etc...pour un médecin pas mal.
    Electricité ou pas....